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Réflexion sur nos perceptions sensorielles

Que ce soit consciemment ou inconsciemment nous sommes constamment assujettis à nos perceptions et dans cet article plus précisément les perceptions sensorielles. Pour bien comprendre celles-ci, commençons par leur définition. Dans le chapitre « Perceptions sensorielles et perceptions mentales » du livre « Comment comprendre l’esprit », G. K. Gyatso nous dit que, je cite : « La perception sensorielle est, par définition, une perception qui se développe en dépendance de sa condition dominante non commune, un pouvoir sensoriel possédant une forme« . La fonction principale d’une perception sensorielle est, respectivement pour nos cinq sens, de voir des formes, d’entendre des sons, de sentir des odeurs, de faire l’expérience de goûts et de saveurs, et de faire l’expérience du contact avec des objets.

Chacune de ces cinq perceptions sensorielles se développe en dépendance de sa condition dominante, c’est-à-dire ce qui aide principalement à son développement. Par exemple la perception sensorielle de l’œil se développe en dépendance du pouvoir sensoriel de l’œil, la perception sensorielle de l’oreille se développe en dépendance du pouvoir sensoriel de l’oreille, et de même pour les autres perceptions sensorielles. Chacun de ces pouvoirs sensoriels a pour fonction de générer la perception de l’organe correspondant. Ainsi, le pouvoir sensoriel de l’œil a pour fonction de générer directement la perception de l’œil. Les autres pouvoirs restant se comprennent de manière semblable. Pour chaque perception sensorielle il existe une condition dominante commune et une condition dominante non commune.

Pour qu’une perception se développe, celle-ci a besoin d’un pouvoir mental qui est sa condition dominante non commune. Sans le pouvoir sensoriel correspondant, la perception ne pourrait pas se développer. Ce n’est pas parce que nous possédons l’organe œil par exemple que forcément nous pouvons voir. S’il n’y a pas le pouvoir sensoriel de l’œil, même si nous avons nos deux yeux, nous ne pouvons voir. Parce que la perception de l’œil dépend avant tout du pouvoir sensoriel de l’œil. Toujours dans le livre « Comment comprendre l’Esprit », il est mentionné que :  « Le pouvoir sensoriel de l’œil est un pouvoir intérieur, ou énergie qui réside au centre même de l’organe œil, dont la fonction est de générer directement la perception de l’œil« . Si nous n’avons pas ce pouvoir sensoriel de l’œil ou que ce dernier est défectueux, nous n’allons pas pouvoir voir. De même avec l’oreille, l’organe oreille, sans le pouvoir sensoriel de l’oreille, parce que absent ou défectueux, soit nous n’allons pas pouvoir entendre, soit nous allons entendre mal.

Ce que nous connaissons à travers nos perceptions sensorielles nous aide à générer un esprit conceptuel, c’est-à-dire une pensée qui appréhende son objet par l’intermédiaire d’une image. Lorsque nous disons que « Tout est création de l’esprit » cela veut dire que celui-ci crée une image de l’objet. Lorsque nous observons une bougie allumée, aucune bougie allumée ne se trouve dans notre esprit, mais seulement son image générique. Et à partir de cette image  l’esprit génère une perception conceptuelle en imputant une désignation, une étiquette « bougie » à cet objet perçu. Selon le même processus de raisonnement nous pouvons développer la réflexion pour l’oreille, la langue, le nez et le toucher.

Rédigé d’après mes révisions du livre « Comment comprendre l’Esprit », sujet du Programme fondamental enseigné en 2016 au Centre Atisha de Genève.

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Verre à moitié plein, verre à moitié vide

Imaginons que Vincent et Pierre observent deux verres posés sur la table devant eux et soyons attentifs à leurs propos. Des deux verres observés, quel est celui qui est à moitié plein et quel est celui qui est à moitié vide ? Vincent dira : « C’est celui de gauche qui est à moitié plein et celui de droite qui est à moitié vide ! » Non, rétorquera Pierre : « C’est le verre de gauche qui est à moitié vide et celui de droite qui est à moitié plein ! » Qui de Vincent ou de Pierre a raison?

D’un certain point de vue les deux ont raison. Pourtant, d’un autre point de vue les deux verres, de par leur aspect ils sont identiques. Alors, par exemple, qu’est-ce qui fait dire à Vincent que c’est le verre de gauche qui est celui à moitié plein? Il doit bien y avoir une caractéristique du côté de l’objet qui atteste cela. Mais si tel était le cas, cette caractéristique serait contestée par Pierre qui dit exactement le contraire. Cette contradiction nous amène logiquement à la conclusion que les caractéristiques intrinsèques « à moitié plein »  et « à moitié vide » ne peuvent coexister simultanément du côté du verre. De la même manière qu’un objet ne peut être à la fois noir et blanc. En d’autres termes, le verre ne possède pas de telles caractéristiques puisqu’elles s’excluent l’une l’autre.

Verre-moitié-moitié-02Pourtant, Vincent et Pierre sont de bonne foi dans leur affirmation. Alors comment comprendre cela? Chacun a la conviction d’avoir raison, pourquoi? Parce que leur état d’esprit est différent, et selon l’état d’esprit du moment, l’un voit le verre à moitié plein et l’autre à moitié vide. Chacun désigne l’objet qu’il voit soit avec l’étiquette « verre à moitié plein » soit avec l’étiquette « verre à moitié vide ». Cette étiquette, cette désignation ou encore cette imputation est créée par l’esprit en relation dépendante de l’objet perçu. Cette caractéristique du verre est un attribut ou une qualité affectée par l’esprit qui le perçoit. En fait, nous attribuons des noms, des caractéristiques et des états à tout ce que nous percevons. Et au cours de toute notre vie, nous avons appris à désigner et nommer les choses perçues.

À ce propos, les enseignements de Bouddha sont sans équivoque. Tout est création de l’esprit. Rien n’existe de manière intrinsèque, de son propre côté en dehors de notre esprit. Oui bien sûr, ils existent d’une manière conventionnelle mais de manière ultime ce n’est pas le cas. C’est là que cela devient intéressant. Chaque fois que nous percevons un objet et que nous avons la conviction qu’il existe de la manière dont il nous apparaît, nous sommes sûrs de nous tromper. Chaque fois que nous avons l’évidence d’un objet qui existe en face de nous, nous sommes piégés par notre ignorance. Comprendre l’existence vraie d’un objet fera appel à notre esprit de sagesse qui, par une analyse méthodique, arrivera à la conclusion qu’un tel objet est vide d’existence inhérente. En conclusion, aussi bien « le verre à moitié vide » que « le verre à moitié plein » n’ont d’existence indépendamment de notre esprit.

Compilé d’après mes notes prises durant une période de retraite en 2015 d’après une transcription d’un cours au Centre Atisha de Genève

Comment faire grandir l’amour qui chérit

Tant que notre esprit contaminé considère les êtres en se basant sur une perception discriminatoire nous ne pouvons développer valablement un amour qui chérit. Nous devons éliminer la partialité que nous avons envers certaines personnes afin d’obtenir un amour égal inconditionnel. De la même manière que le soleil éclaire également tout ce qui se trouve sous ses rayons, nous devons considérer ceux qui se trouvent avec nous sans discrimination. Nous Grandir Amour-01devrions avoir un amour semblable au rayonnement du soleil pour tous les êtres qui gravitent dans notre vie. L’amour dans notre cœur devrait briller également pour tout le monde.

Avant de pouvoir apprécier la qualité d’un tel amour, nous devons reconnaître les problèmes que notre partialité nous crée. La plupart de nos problèmes dans ce sens viennent lorsque par exemple nous devons être en présence de gens que nous n’apprécions guère. Nous avons tous vécu de telles expériences que ce soit au travail, dans nos familles, avec nos amis ou ennemis. Dans certaines circonstances nous préférerions éviter leur présence et nous faisons tout notre possible pour nous soustraire à une situation embarrassante. Parfois, malgré tous nos efforts pour nous dérober, nous sommes obligés d’affronter cette présence. À ce stade un grand inconfort s’installe dans notre esprit, n’ayant pas de stratégie d’évitement.

Et dans ce cas, quand nous sommes avec de telles personnes, nous les rendons responsables de notre inconfort. Ce qui nous semble du reste tout à fait logique puisque lorsque nous ne sommes pas avec cette personne indésirable, nous ne ressentons aucun inconfort particulier. Alors qu’en sa présence le trouble se manifeste. Donc, de notre point de vue, la personne en question est la cause de notre Grandir Amour-02incommodité, raison pour laquelle nous cherchons à l’éviter. En réalité notre sensation d’inconfort ne vient pas de la personne, mais provient du fait que notre esprit ne sait pas comment interagir d’une manière saine et confortable  avec celle-ci.

À l’origine, face à cette personne, ce sont nos propres perturbations mentales qui se manifestent dans notre esprit. Elles sont la cause de notre inconfort, quelque chose hors de notre contrôle due à la situation. Et les empreintes karmiques potentielles relatives à la présence de l’autre se manifestent sous la forme d’une certaine aversion. En l’absence de telles empreintes karmiques, aucune réaction ne peut se manifester et nous pouvons aisément être en présence de qui que ce soit sans problème. Cet embarras que nous pouvons ressentir est le principal obstacle qui nous empêche de développer un amour inconditionnel pour tous sans discrimination.

Habituellement nous aimons bien les gens qui nous plaisent et nous avons de l’aversion pour ceux qui ne nous plaisent pas. Si nous pouvons apprendre à voir tout le monde d’une manière plaisante, nous aurons une bonne perception pour tous et cela nous sera facile d’aimer tout le monde. Certainement nous pouvons dire que nous aimons tout le monde, mais d’une manière nuancée. Il est bien clair que nous ne pouvons aimer tous les autres de la même manière. Grandir Amour-03Ainsi nous n’aimons pas notre partenaire de la même façon que nous aimons notre chef de bureau ou que notre concierge. Ceci vient du fait que nous partageons des karmas mutuels différents les uns avec les autres.

En chaque être nous apprécions des qualités et des caractéristiques différentes et de cette manière nous pouvons donner une cohérence à notre équanimité. Par ailleurs, cet amour pour les autres ne se limitera pas à un amour superficiel et hypocrite qui ne présente aucun intérêt pour notre développement spirituel. Une telle attitude est aussi le plus souvent très mal perçue par les autres, ne sachant pas comment le recevoir parce que manquant de sincérité et trop accommodante.  Cela provient de ne pas savoir adopter une manière appropriée à chaque situation. Nous devons être capables d’adopter la manière d’aimer les autres en fonction de leur diversité.

Compilé d’après transcription et notes d’un enseignement d’après « Huit Etapes vers le Bonheur » du Programme Fondamental transmis par Kadam Ryan au Centre Atisha de Genève en 2009

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La cause de nos problèmes et leur solution

Probleme-01Lorsque dans notre vie quotidienne nous sommes confrontés à un problème, naturellement nous recherchons une solution afin d’en être libéré. Si nous n’arrivons pas nous-même à construire une solution valide à ce problème, nous avons recours à une aide externe. Comme par exemple, lorsque nous avons un problème de santé, naturellement nous recherchons les compétences d’un médecin qui, une fois l’anamnèse établie, nous prescrira les remèdes et le traitement à suivre. Si la chasse d’eau de notre salle de bain ne fonctionne plus, nous faisons appel à un dépanneur sanitaire. Dans tous les cas, nous établissons une relation de cause à effet qui nous semble fonctionner indépendamment de notre volonté. Comme par exemple, si notre train à un retard significatif et que nous allons manquer un rendez-vous important, nous dirons : « C’est parce que le train avait du retard que j’ai perdu une occasion unique de rencontrer un important personnage ». Il est très facile de trouver dans notre vie d’autres exemples similaires et nous sommes persuadés que les circonstances extérieures sont à l’origine de la plupart de nos problèmes.

Probleme-03Nous sommes tentés de penser que la malchance, le destin ou encore un mauvais coup du sort sont à l’origine de nos problèmes. C’est du moins ce que les gens pensent sans connaître les mécanismes du karma. De plus, sous l’influence de notre ignorance de saisie d’un soi, nous persistons à croire que les objets et les phénomènes existent réellement de la manière qu’ils nous apparaissent. Nous pensons que les objets et les phénomènes existent de manière intrinsèque, existent de leur propre côté. Bouddha nous dit que tout ce qui apparaît à notre esprit est semblable à une illusion, semblable à un rêve et que rien n’existe en dehors de l’esprit. La cause de nos problèmes se trouve dans notre propre esprit. Cette conclusion contredit notre esprit grossier rationnel qui recherche une relation directe entre une action et son effet, sans tenir compte du fonctionnement subtil du karma. Si la cause de nos problèmes se trouve dans notre esprit, les problèmes également se trouvent dans notre esprit. En fait les problèmes que nous rencontrons sont produits par nos perturbations mentales qui en sont la cause.

Pour revenir à l’exemple de la maladie cité plus haut, il se peut bien que le médecin nous guérisse de celle-ci, ce qui ne nous dispensera pas de tomber malade une autre fois. De même, la chasse d’eau, même une fois réparée pourra ne plus fonctionner quelques mois plus tard. Dans ces deux cas nous avons de la peine à imaginer que nous sommes le « metteur en scène » de ces expériences, pourquoi? Parce que nous faisons abstraction de l’aspect karmique de celles-ci. En fait, nous voyons assez mal notre rôle direct  dans le dysfonctionnement de la chasse d’eau, comme nous ne réalisons pas que nous sommes pour quelque chose dans notre maladie. Ce sont là des aspects subtils cachés que les obstructions présentes dans notre esprit empêchent de comprendre. Les causes de nos problèmes sont des actions dans le passé proche ou lointain et nos problèmes en sont leurs effets. Les plus redoutables effets qui donnent lieu à nos problèmes sont des actions négatives et non vertueuses générées dans le passé. Et à l’origine de ces actions il y a de nombreuses perturbations mentales.

Probleme-02Donc, si nous voulons être libérer de nos problèmes qui comme nous le comprenons proviennent de notre esprit, nous devons rechercher une solution intérieure à notre esprit. Tout comme nous avons recherché de l’aide auprès d’un médecin ou d’un dépanneur sanitaire, nous devons rechercher une aide à l’intérieur de notre esprit. Pour ce faire, nous pouvons principalement appliquer deux choses.

  1.  Chercher refuge dans les trois joyaux, Bouddha, le dharma et la sangha. Dans le « Nouveau Manuel de Méditation » (*), il est dit que le dharma est comme un remède, que Bouddha est le médecin qui nous donne ce remède et la sangha les infirmières qui nous assistent. Le plus souvent et chaque fois que nécessaire nous générons une forte conviction que les trois joyaux sont de véritables objets de refuge qui nous viennent en aide en toute circonstance.
  2. Faire des requêtes à Bouddha, notre guide spirituel suprême, en lui demandant dans une expérience spécifique une requête comme par exemple : « S’il te plaît aide-moi à pacifier mon esprit de cette perturbation mentale à l’origine de cette mauvaise expérience. Puisse cette expérience être une cause de la purification de mon karma négatif à l’origine de celle-ci« .

En conclusion, nous avons par le passé recherché de l’aide pour une solution à nos problèmes à l’extérieur de notre esprit, l’intention était certes louable. Seulement nous cherchions au mauvais endroit, dans le samsara. Si nous nous tournons vers l’intérieur, au fond de notre esprit en prenant refuge en les trois joyaux et en faisant des requêtes à notre guide spirituel suprême, nous ne tarderons pas à voir nos problèmes recevoir une solution.

 (*)  le « Nouveau Manuel de Méditation » de Ghéshé Kelsang Gyatso aux Editions Tharpa

Éveiller en nous le sens des mots

Si nous cherchons la définition d’un mot dans le dictionnaire, dans la plupart des cas plusieurs significations nous sont proposées. Elles dépendront du contexte où ce mot est utilisé. Le sens, du point de vue de notre esprit, est donc une caractéristique se trouvant imputée par celui-ci et non une propriété intrinsèque du mot lui-même. Les Sens-Mots-02esquimaux, par exemple, ont des douzaines de façons différentes de définir la neige. Ainsi dans le même ordre d’idées, le simple mot « Bonjour » est tout en nuances, et dépend de l’état d’esprit de la personne qui le dit et également de l’état d’esprit de celui qui le reçoit. Étymologiquement bonjour veut dire : « Ayez un bon jour ». Ce peut être une simple formule de politesse, mais cela peut également être un souhait provenant d’un esprit bienveillant. Et c’est là que cela devient intéressant.

Dans la vie courante, nous sommes en interaction avec les autres. Fort est de constater que l’échange verbal que nous avons parfois avec l’autre souvent est un rituel dans lequel nous ne nous impliquons pas vraiment. Ainsi, lorsque nous croisons notre voisine Sens-Mots-01de palier, nous répondons à son « Bonjour » sans nous impliquer vraiment dans cet échange. Pourquoi? Parce que nous sommes plus absorbés dans nos pensées ou encore attentifs à son allure, à son habillement plutôt qu’à ce qu’elle vient de dire. Et nous répondons également par un « Bonjour » tout en continuant notre observation. Mais avons-nous vraiment pensé à ce que nous avons dit, avons-nous vraiment écouté ses paroles?

Ce simple mot « Bonjour » peut aussi être une action vertueuse, parce que nous souhaitons à l’autre de vivre cette journée pleinement sans souffrance et remplie de bonheur. Si nous mettons toute notre attention sur le fait de souhaiter quelque chose de bénéfique pour l’autre, nous serons de moins en moins prédisposés à un jugement sur la personne en question. Parce que le bonheur des autres est également important, par ce simple bonjour, nous pouvons partager avec tous le bonheur qui se manifeste en nous. En éveillant le sens de ce simple mot nous renforçons notre bodhitchitta, notre intention de libérer les êtres vivants de leur souffrance et les conduire vers l’illumination. Nous construisons un lien karmique avec la personne par lequel nous pourrons vraiment l’aider dans le futur.

Sens-Mots-03Ce qui est valable pour le mot « Bonjour » ci-dessus s’applique également à une conversation. Lorsque nous parlons avec notre interlocuteur, si nous voulons comprendre son propos, nous devons d’une part être à son écoute et pas seulement mais d’autre part aussi capter le sens de ses paroles. Alors seulement nous pouvons recevoir correctement son message et lui répondre de manière qualifiée. Si notre intérêt pour ce qu’il nous dit est manifeste cela mettra à l’aise ce dernier qui se sentira accueilli avec ce qu’il veut partager avec nous. Qui n’a pas déjà entendu une remarque pertinente du genre « Tu écoutes ce que je suis en train de te dire? ». C’est en effet très désagréable de ressentir l’absence d’intérêt dans les yeux de celui qui est censé nous écouter. Au lieu de l’aider nous lui infligeons une souffrance supplémentaire sous la forme de la frustration de ne pas être entendu. Souvent, le piège consiste à interpréter ce que nous dit l’autre personne en portant un jugement de valeur à son propos. Ce jugement se basant sur nos propres projections dénaturera probablement ce que veux dire l’autre personne. Notre écoute doit être active mais centrée sur notre interlocuteur et non sur notre esprit subjectif. Nous devons élargir notre perception pour y inclure son expérience. Comment pourrions-nous être vraiment à l’écoute de l’autre si nous n’éveillons pas en nous le sens des mots?

Les autres nous révèlent qui nous sommes

Reveler-01Lorsque nous vivons notre quotidien, nous avons de temps à autre un peu d’estime pour ce que nous sommes. Parfois même nous exagérons ce sentiment en pensant que nous sommes un super héros, en maximisant ce que nous croyons être nos qualités et en minimisant ce que nous savons être nos défauts. Sans ambages, c’est du moins de cette manière que sincèrement nous nous percevons. Parfois nous avons une piètre image de nous-même que nous voudrions pourtant améliorer. Alors comment faire? Milarepa disait ne pas avoir besoin de livres, car tout autour de lui pouvait être pris comme un enseignement du dharma. Nous pouvons très bien nous inspirer de cela.

« Bien! Mais tout autour de moi, je ne vois que de la violence, de la colère, de l’intolérance! En quoi tout cela peut être profitable pour moi? » En aucun moment nous nous identifions à ce que nous voyons constamment autour de nous. Nous sommes tellement habitués à percevoir les fautes chez les autres que nous ne voyons plus correctement ce qui se passe dans notre propre esprit. Pourtant, nous pensons aussi : « Moi, je ne suis pas comme cela! Je n’ai pas de telles attitudes fautives! C’est aux autres de changer de comportement et de façons d’agir dans leur vie ». Et nous pensons que les autres ont la responsabilité entière d’éliminer les fautes que nous percevons en eux.

Cette conclusion hâtive est la conséquence de notre ignorance de saisie d’un soi. Celle-ci nous persuade que les autres existent vraiment de manière intrinsèque là en dehors de notre esprit. De ce fait, leur comportement et leurs actions sont entièrement imputables à leur propre esprit et ne nous concernent pas. Mais c’est oublier que la fonction de l’esprit est de tout percevoir et de tout connaître. Par conséquent, le monde que nous expérimentons est le monde auquel nous prêtons notre attention. Et en pensant plus Reveler-02profondément à cela, nous réalisons que nous sommes l’unique responsable de tout ce que nous percevons et même des fautes chez les autres.

Si nous investissons la quasi-totalité de notre attention à observer uniquement les fautes des autres, il nous semble que la presque totalité des gens que nous percevons sont mauvais et sous l’emprise de leurs mauvaises intentions. Mais ce que nous voyons chez les autres est la manière subjective de notre esprit de projeter sur eux ce que nous croyons leur appartenir de leur propre côté. C’est de cette façon que nous créons « des ennemis », « des amis », « nos collègues aimés ou mal-aimés » et ainsi de suite. Généralement, nous créons tous les êtres qui se manifestent dans notre vie. C’est une réalité que nous avons souvent de la peine à admettre, parce que nous n’avons pas suffisamment de compréhension de la vacuité des objets et des phénomènes.

Reveler-03Il y a différentes possibilités d’approfondir notre compréhension sur ce sujet. Nous pouvons par exemple prendre le mécanisme du rêve. Lorsque nous rêvons, les personnages de notre rêve nous paraissent exister vraiment car nous sommes capables de vivre avec eux toutes sortes de sensations et d’émotions. Avec l’esprit du rêve, nous n’avons aucun doute quant à leur existence et à leurs actions bonnes ou mauvaises. Sommes-nous responsables des fautes et des actions des personnages de notre rêve? Oui, car l’intégralité du rêve, les personnes et leurs actions sont l’expérience créée par l’esprit du rêve. Si de telles personnes faisant de telles actions existaient vraiment de manière intrinsèque, elles continueraient d’exister au moment de notre réveil. Pourtant, toutes ces personnes disparaissent complètement. Elles ne sont ni venues d’un quelconque endroit ni reparties nulle part. Alors, finalement où sont ces êtres violents, colériques et intolérants que nous rencontrons tous les jours? Si nous voulons améliorer notre vision du monde, cela se produira qu’en dépendance des changements que nous faisons dans notre esprit en fonction de ce que nous percevons chez les autres.

Inspiré de mes lectures des enseignements transmis par Kadampa Ryan sur son blog en 2013

Méditation : La nature conventionnelle de l’esprit

Préalable : Cette méditation dure une vingtaine de minutes. Assurez-vous de ne pas être dérangé par le téléphone, par les membres de votre entourage et animaux domestiques. Choisissez un endroit tranquille, loin de bruits habituels susceptibles de vous distraire. Étant donné la durée de cette méditation, une fois celle-ci terminée, accordez-vous un moment de transition avant de reprendre toute activité.

Installez-vous confortablement avec le dos bien droit en ayant au préalable vérifié de ne pas être dérangé pendant la durée de cette méditation.
Clarté-Esprit-01Portez simplement toute votre attention sur votre respiration naturelle en percevant l’air qui effleure vos narines en inspirant et en expirant.
Laissez votre respiration naturelle vous accompagner pendant quelques instants tout en laissant momentanément toutes vos préoccupations de côté.
Sentez progressivement un état de calme s’installer en vous et faites ceci pendant quelque instants encore.
[pause 2 minutes]

Clarté-Esprit-04Puis contemplons maintenant ce que nous allons entendre.
Nous avons tous un esprit, mais savons-nous vraiment ce qu’il est?
Si quelqu’un nous demande la vraie nature de celui-ci, comment il fonctionne, nous sommes incapables de donner une réponse précise.
Parce que nous n’en avons pas une compréhension claire, habituellement nous pensons que l’esprit est notre cerveau.
Mais le cerveau est un organe physique matériel, une partie de notre corps.
Or l’esprit n’est pas une partie de celui-ci, il est un continuum complètement dépourvu de matière et de forme qui ne peut se voir au sens de notre vision.
Il est principalement situé dans la région du chakra du cœur.
Contrairement à la flamme d’une bougie, qui elle est produite par la cire de celle-ci, l’esprit lui n’est pas produit par le corps.
Et quand le corps meurt, l’esprit persiste et va vers la prochaine existence.
La nature de notre esprit lui-même est clarté, une lumière aussi vaste que l’univers dans laquelle tout, absolument tout se passe.
Sa fonction est de tout connaître. Ainsi, il a le pouvoir également de connaître toute chose, où que ce soit et simultanément partout.
Seul l’esprit a le pouvoir de connaître et de comprendre les objets.
Lorsque nous disons que nous comprenons quelque chose, c’est seulement parce que notre esprit comprend cette chose.
Toutes nos pensées, nos paroles et nos actions physiques dépendent entièrement de notre esprit.
Notre esprit est le créateur de toute chose.
Tout ce que nous pensons, que nous voyons, entendons, sentons, goûtons ou touchons à travers nos perceptions sensorielles est créé par l’esprit.
Comprendre que tout est créé par l’esprit nous aide à comprendre son pouvoir.
Chaque être vivant est sous le contrôle de son esprit.
L’esprit lui-même est un champ clair et universel de connaissances qui a le pouvoir de tout créer.
[pause 2 minutes]
Tout en restant dans la claire lumière de notre esprit, essayons maintenant de gagner une expérience personnelle, en contemplant ce qui suit :
Clarté-Esprit-03Puisque notre esprit est le créateur de tout, il peut percevoir toute forme et peut se manifester sous toute forme.
Puisque notre esprit n’est pas un son, il peut entendre et émettre tous les sons.
Puisque notre esprit n’est pas une odeur, il peut sentir toute odeur et toutes les odeurs proviennent de lui.
Puisque notre esprit n’est pas le toucher, il peut avoir toute sensation et peut tout éprouver.
Puisque notre esprit n’est pas le goût, il peut goûter à tout et créer toute saveur.
Puisque notre esprit n’est pas une pensée, il peut penser à tout et générer toute pensée.
Puisque notre esprit est le créateur de tout, il peut tout créer.
Puis sur la base de cette contemplation, essayons de générer le sentiment de la présence de l’esprit lui-même et de rester dans sa nature égale et immuable.
Imprégnions-nous de ces affirmations pendant quelques instants encore.
[pause 2 minutes]
Si une distraction se manifeste, réalisons que c’est un objet de notre esprit et non notre esprit lui-même. Ce n’est qu’une pensée dans notre esprit et en comprenant ceci, laissons-la simplement disparaître tout en reportant notre attention sur l’esprit lui-même.
Laissons cette distraction se dissoudre dans notre esprit comme un nuage se dissipe dans un ciel clair et revenons une fois encore dans le calme immuable de notre esprit.
[pause 1 minute]
Si une image se manifeste, réalisons toujours que c’est un objet de notre esprit et non l’esprit lui-même.
Ce n’est qu’une image mentale dans notre esprit que nous laissons simplement s’éloigner, semblable à un nuage qui se dissipe dans un ciel clair et revenons  dans le calme immuable de notre esprit.
[pause 1 minute]
Si un son se manifeste, réalisons que ce n’est qu’un objet de notre esprit et non l’esprit lui-même. En l’entendant, laissons ce son se dissoudre tel un nuage dans le ciel clair de notre esprit.
[pause 1 minute]
Si une perturbation mentale se manifeste, nous réalisons qu’une fois encore c’est un objet de notre esprit perturbé et non l’esprit lui-même. Ce n’est qu’une pensée dans notre esprit.
Clarté-Esprit-02En focalisant toute notre attention sur l’esprit lui-même, nous laissons également cette perturbation se dissoudre dans notre esprit comme un nuage se dissipe dans un ciel clair.
Et comme toujours dans ces cas, nous nous concentrons sur la sensation de calme immuable de notre esprit.
Cette sensation est notre objet de méditation placée sur lequel nous restons le plus longtemps possible, durant quelques minutes encore.
[pause 3 minutes]
Puis progressivement, nous revenons dans notre perception ordinaire des choses et sortons de notre méditation.

Méditation compilée à partir d’un enseignement donné par Kadam Ryan au Centre Atisha de Genève.

Multitâches ou mono tâche?

Multi-tache-01Avez-vous déjà fait cette simple expérience ? Prenez place devant une grande feuille de papier, un crayon dans chaque main. Puis, dessinez simultanément un cercle avec la main gauche et un carré avec la main droite ! Vous vous rendez compte immédiatement de l’impossibilité de le faire spontanément. Que se passe-t-il dans votre esprit? Votre esprit doit se concentrer à la fois sur deux actions, celle de tracer un rond de la main gauche et un carré de la main droite. Or, comme déjà mentionné à plusieurs reprises dans des articles précédents, du point de vue de l’esprit : « Le monde que nous percevons est celui auquel nous prêtons notre attention ».  Par conséquent, vous ne pouvez focaliser votre attention en même temps sur le tracé du cercle et le tracé du carré. Bien sûr, lorsque nous observons ce qui se produit devant nous, nous avons une impression globale de ce qui s’y trouve. Mais nous procédons à la manière d’un scanner, comme par exemple lorsque nous entrons dans une demeure pour la première fois. Aussi, lorsque nous sommes dans un cinéma à regarder un film sous titré, soit nous lisons le texte soit nous regardons la scène du film, mais difficilement les deux en même temps.

En fait, nous rencontrons une problématique similaire lorsque nous faisons notre pratique. Habitués à faire ou à penser à plusieurs choses en même temps nous avons de la peine à nous focaliser uniquement sur notre pratique. Tant de choses et de pensées distrayantes sabotent notre concentration et nous sommes en alternance dans notre pratique et dans toutes sortes d’autres pensées. Dans son livre « La Voie Joyeuse », Vénérable Kelsang Gyatso explique que : « Un certain degré de concentration est nécessaire pour accomplir toute action vertueuse, car la concentration élimine les obstacles à notre pratique« . Actuellement, nous voulons garder notre esprit concentré, mais ne pouvons le faire à cause de nos perturbations mentales. Nous devons par conséquent les éliminer le plus possible. D’autres explications détaillées se trouvent dans le chapitre « L’entraînement de l’esprit au calme stable » du même livre.

Multi-tache-02Donc, je poursuis ma réflexion telle que je l’ai vécue dernièrement durant ma retraite. Pour assimiler des connaissances, nous utilisons principalement deux types de mémoire : une mémoire à court terme et une mémoire à long terme. D’après Wikipédia, la mémoire à court terme (MCT) permet de retenir et de réutiliser une quantité limitée d’informations pendant un temps relativement court et la mémoire à long terme (MLT) la mémoire au sens courant. L’entreposage de la connaissance dans celle-ci se fait par le « transfert » du contenu de la mémoire MCT, d’où l’importance de son contenu. Notre entraînement à la concentration consiste diminuer progressivement jusqu’à leur complète disparition le taux de perturbations et de distractions contenues dans la mémoire MCT de notre esprit. Avec ce préalable, nous pouvons atteindre le premier placement, le placement simple de l’esprit, c’est-à-dire de garder notre attention en un seul point sur l’objet de notre méditation. Puis avec persévérance notre entraînement nous permettra d’envisager les autres niveaux de placement de l’esprit. Également sur le sujet, vous pouvez consulter l’article « Notre manque de concentration » sur ce même blog.

Dans le « Nouveau Manuel de Méditation » Vénérable Kelsang Gyatso précise qu’au début de notre pratique méditative, notre concentration reste faible, car nous sommes facilement distraits et nous perdons souvent notre objet de méditation. C’est pourquoi, avec patience, persévérance et une forte motivation, nous allons alterner contemplation et méditation placée jusqu’à pouvoir garder notre objet de méditation. Parfois, nous pouvons demander au Bouddha Mandjoushri sa grande sagesse pour comprendre les objets que nous devons abandonner pour améliorer notre concentration.

Nourrir notre nature de félicité

Nous mettons tant d’énergie à trouver cette sensation de félicité en nous sans la trouver, alors qu’elle est déjà là. Nous mettons tant d’énergie à développer quelque chose qui est déjà là en nous, alors il suffit d’enlever tout ce qui empêche de le découvrir. Cela est pareil Felicite-01lorsque nous cherchons désespérément nos lunettes alors que celles-ci sont sur notre nez. Nous pensons devoir chercher nos lunettes parce que nous ne voyons pas très clair, alors que celles-ci sont sur notre nez mais couvertes de saleté. Le monde que nous percevons est conforme à ce à quoi nous prêtons attention. Bien souvent nous sommes obnubilés par les effets pervers de nos perturbations mentales et oublions notre vraie nature. Au lieu de nous identifier à nos perturbations mentales nous serions bien inspirés de reconnaître notre potentiel de pure félicité et de nous connecter à lui.

Felicite-02Notre état d’esprit est semblable à ce que nous pensons. Si nos pensées sont tristes et pessimistes notre esprit l’est également. Tandis que si nos pensées sont joyeuses et empreintes de félicité nous nous sentons légers et pleins de joie. Le fait par exemple de se réveiller de mauvaise humeur est capable de nous empoisonner toute la journée si nous ne voyons pas une meilleure alternative. Nos perturbations mentales nous attirent comme un aimant et plus elles sont présentes plus elles nous conditionnent. Si nous arrivons à mettre une distance de sécurité entre elles et nous, nous pouvons momentanément nous libérer de leur influence. En ne donnant pas notre assentiment à ce qui nous met de mauvaise humeur, naturellement nous faisons la place à ce sentiment de félicité.

Il arrive parfois qu’un souvenir négatif se manifeste de manière récurrente dans notre esprit. Celui-ci conditionne fortement notre manière de penser. À chaque fois il active une potentialité similaire, une graine négative qui, s’ajoutant aux autres graines, finit par prendre en otage notre esprit. Ces souvenirs projetés dans l’avenir sont telles des prophéties qui finissent par se réaliser. Voici un exemple pour illustrer cela. Une personne de mon entourage se plaint continuellement d’être seule parce que toutes ses tentatives de trouver l’âme sœur échouent. Elle pense : « Je n’arrive à rien dans mes relations, je suis nulle et me sent abandonnée de tous ceux que je rencontre ». Elle répète cette phrase comme un mantra. Ce faisant elle entretient cette potentialité « d’être abandonnable ». Alors je lui ai posé la question : « Y a-t-il dans ta vie une fois où tu t’es sentie acceptée et accueillie et que tu étais heureuse ? ».

Il suffit souvent de changer notre façon de voir et les choses et les événements que nous regardons changeront. Je me souviens encore quand à un certain moment de mon burnout au printemps 2012, alors que je m’enfonçais dans la dépression, avoir ainsi changé ma façon de percevoir. Il m’a suffi de me connecter le plus souvent possible à ma nature profonde, ce sentiment de félicité, pour que progressivement je retrouve ma sérénité. Lorsque nous sommes accablés ou confus, il nous vient instinctivement le besoin de soupirer profondément. Felicite-03S’il procure un soulagement physique immédiat, ce soupir libérateur est le seuil de la porte qui donne accès à ce sentiment de félicité. Il nous suffit juste prendre conscience de cela pour sortir de la confusion. Celui-ci peut prendre mille aspects différents à chaque moment de notre vie, comme par exemple une saveur particulièrement agréable, l’enchantement d’un beau coucher de soleil, le souvenir d’une musique ou toute autre chose. Ce sentiment de félicité est notre nature divine, notre nature de bouddha. Alors si petit soit ce sentiment, en enlevant tous ce qui nous empêche de le manifester, nous pouvons progressivement nourrir notre nature de félicité.

Apprendre à gérer le stress

Le stress est un mal de société moderne qui concerne beaucoup de gens. Souvent abordé dans les medias sous ses aspects psychologiques et neurologiques, il est rarement abordé sous l’aspect spirituel. Samedi dernier, j’ai eu l’occasion de recevoir un enseignement sur le stress d’une perspective bouddhiste, par Kadam Hélène Oester  du Centre Dromtönpa de Bern. Ce précieux enseignement présente le stress et comment y faire face d’une manière différente et intéressante dont je voudrais partager ma compréhension avec vous mes lecteurs.

Stress-01Si d’un certain point de vue le stress possède un aspect positif, parce qu’il nous stimule dans l’aboutissement de nos objectifs, il reste surtout négatif, parce que source de beaucoup de problèmes et de souffrances. Il suffit pour en rendre compte d’écouter les réflexions du commun des mortels que nous sommes : « Il me stresse! », « Mon patron me stresse ! », « Le travail me stresse en ce moment! », « Je me sens stressé par ma situation », etc. Si l’aspect positif du stress peut temporairement nous aider, parce qu’il peut augmenter notre capacité d’obtenir le résultat escompté, nous ne devons pas en abuser. À trop vouloir bien faire avec cette adrénaline nous finirons par l’épuisement de notre énergie. Arrivés à ce stade nous sommes dépourvus de force et de vigueur et nous disons : « Je n’en peux plus! », « Je ne sais plus quoi faire », « Je ne sais plus où j’en suis! ». En faisant trop et trop longtemps cela peut même se terminer par un burnout.

Il n’y a pas de recette miracle pour enrayer le stress. Faire une liste de toutes les situations qui génèrent du stress est impossible. Néanmoins les quelques indications ci-dessous peuvent nous donner des pistes pour identifier les sentiments et les perceptions révélatrices du stress en nous.

  • Avoir un sentiment d’être sous pression, d’être contraint à faire quelque chose, d’être pressé ou accablé par des conditions difficiles.
  • Avoir un sentiment d’agitation intérieure et de perdre son calme.
  • Avoir le sentiment de perdre le contrôle et d’être une machine qui ne peut plus s’arrêter-
  • Avoir un sentiment d’être submergé parce que tout nous semble trop difficile et que les tâches les plus simples prennent une dimension disproportionnée.
  • Tout en déclinant une aide, nous pensons continuellement à tout ce que nous devons faire et que nous n’avons pas encore fait.
  • Avoir le sentiment d’être épuisé, de manquer de concentration
  • Les situations stressantes perturbent notre sommeil et même dans nos rêves
  • Etc.

Remarquons dans les exemples ci-dessus qu’il s’agit systématiquement d’une perception de notre esprit. Pourtant nous sommes le plus souvent persuadés de l’existence de quelque chose ou quelqu’un à l’extérieur de nous qui nous stresse. Plutôt que de nous limiter à une compréhension intellectuelle nous devons vraiment voir ce qui nous affecte sentimentalement.  Nous devons investiguer sur ce que nous ressentons pour savoir où nous en sommes dans notre vie. Alors d’où vient ce sentiment de stress? Provient-il de notre travail, de notre chef ou de notre partenaire? Est-ce la situation familiale ou encore la société moderne qui nous stresse? En réponse à cela les enseignements de Bouddha sont on peut plus clairs. Si toutes les situations mentionnées sont des causes circonstancielles qui peuvent induire un état de stress, la vraie cause substantielle de notre stress se situe dans notre esprit. La raison de notre bonheur, de notre souffrance tout comme la raison de notre stress se trouve dans notre esprit. Nous devons donc changer notre vision des choses : La racine du stress se situe à l’intérieur de notre esprit et non dans les conditions extérieures. Contrairement aux idées reçues, ne perdons pas de vue que les possibilités de faire quelque chose existent vraiment. Nous avons la possibilité de nous libérer de ces circonstances, même difficiles, par un travail visant à changer notre état d’esprit, c’est le but à atteindre. Cessons de croire que ce sont le travail, le ou la partenaire, le chef, etc. qui nous stressent. Ce ne sont que des circonstances externes projetées par notre esprit qui entretiennent notre état de stress.

Stress-02D’une manière générale nos actions prennent naissance par une intention dans notre esprit. Une action ne peut se concrétiser sans qu’il y ait une intention préalable. Toutes nos actions mentales, verbales ou physiques sont le résultat d’une intention. Ainsi notre mode de pensée et nos habitudes peuvent dans certaines cas être à l’origine de notre stress lorsque notre esprit est préoccupé par :

  • Se contraindre à faire quelque-chose
  • Avoir de très hautes exigences envers soi-même et les autres, que ce soit dans le travail ou la vie
  • La perfection devient un trouble obsessionnel compulsif
  • Croire que le succès s’obtient en travaillant durement
  • Croire que la fuite dans le travail est la seule issue à nos problèmes.
  • Etc.

Malgré notre quête incessante de la perfection à l’extérieur nous ne pourrons jamais être parfaits tant que nous ne changeons pas quelque chose à l’intérieur de notre esprit. Et nous ne changerons pas les conditions extérieures aussi longtemps que nous ne changerons pas notre état d’esprit. Du point de vue bouddhiste, seul Bouddha est parfait parce que complètement libéré de toutes les obstructions qui empêchent d’atteindre la perfection. C’est pourquoi, nous devons nous aussi cultiver des qualités d’amour, de sagesse, de force, de joie avec patience pour espérer un jour lui ressembler. Si nous possédons ces qualités intérieures, toutes nos tâches extérieures se feront d’autant plus facilement.

Stress-04Comment pourrions-nous changer la situation intérieure de notre esprit? Bien que parfois une situation extérieure soit également nécessaire, celle-ci est rendue possible dès l’instant où nous entreprenons un changement intérieur. Ce changement passe par la pratique de la méditation. En pratiquant par exemple une méditation sur la respiration chaque jour 5 à 10 minutes ou une méditation sur notre précieuse vie humaine, nous nous couperons de cette pression et de ce sentiment et nous prendrons l’ascendant sur notre stress. (Pour ceux que cela intéresse, vous trouverez une explication détaillée de ces deux méditations dans le livre de Ghéshé Kelsang Gyatso, « Le nouveau manuel de méditation » aux Editions Tharpa). Immergés dans le travail et les difficultés nous oublions cette chance, cette possibilité de travailler notre esprit, de nous aider nous-mêmes à être heureux. Dans ce sens notre vie humaine est pleine de sens. Habituellement, nos préoccupations sont dirigées vers nos activités ordinaires, notre travail, nos amis, nos problèmes et ainsi de suite. Et l’idée de reconnaître la chance que nous avons d’être un homme, une femme n’est de fait pas dans nos habitudes mentales. Si vraiment nous réalisons la valeur de notre vie humaine, alors nous pouvons entrevoir la possibilité de changer notre point de vue sur notre travail, nos problèmes et ainsi de suite. Les enseignements de Bouddha nous ouvrent  à de nouvelles structures, de nouveaux modes de pensée qui, progressivement nous donnent le moyen de supprimer le stress de notre esprit.

Enseignement donné le samedi 12 octobre 2013, dans le cadre du programme du Centre Atisha de Fribourg par Kadam Hélène Oester, enseignante du Centre Dromtönpa de Berne