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Rêve… Réveillé … Quelle différence ?

Si dans notre rêve nous observons les parties de notre propre corps, nous distinguons clairement par exemple notre jambe, notre bras, nos mains elles nous semblent bien réelles. C’est ce que nous pouvons appeler notre corps dans le rêve, dans notre monde du rêve. Ce corps est créé par notre esprit subtil. Si maintenant à l’état de veille nous faisons la même observation, ce corps est créé par notre Rêve-Eveil-01esprit grossier. Si ensuite, dans notre rêve nous faisons la rencontre de notre meilleur ami Jean, à la Place de la Gare, et que nous allons à sa rencontre en écartant les bras pour lui faire un grand hug, nous vivons cette rencontre avec toute son intensité. Nos bras se referment mutuellement dans une étreinte amicale chaleureuse. Le sentiment de retrouver un ami perdu de vue depuis longtemps nous habite complètement, nous entendons sa voix, nous scrutons son visage pour mieux le reconnaître. Si c’est à l’état de veille que nous rencontrons Jean au même endroit. Et que nous nous dirigeons vers lui pour le serrer dans nos bras, lui parler et écouter son propos, nous éprouvons exactement les mêmes sensations et éprouvons la même joie dans cette rencontre inattendue. Dans notre rêve, nous faisons cette rencontre dans un scénario créé par notre esprit du rêve, tandis qu’à l’état de veille notre rencontre est le produit de notre esprit grossier.

Nous sommes capables de vivre les deux aspects de l’expérience. Que ce soit celui de percevoir notre corps ou celui de rencontrer un ami sans trop nous poser trop de questions du moment que nous nous contentons de la manière conventionnelle dont les objets et les personnages apparaissent à notre esprit. Imaginons maintenant que, suite à l’enseignement reçu sur la vacuité, qui stipule que  » La vacuité est la manière dont les choses existent réellement. C’est la manière dont les choses existent par opposition à la manière dont elles apparaissent ». Nous entreprenons une recherche sur l’existence réelle de notre corps dans les deux cas. Nos investigations invariablement dans les deux cas aboutissent à la non-existence de celui-ci. À cet effet, nous appliquons exactement la même démarche qui aboutit à la conclusion : « Il n’y a pas de corps qui existe de son propre côté » aussi bien dans le monde du rêve que dans le monde réveillé. Nous observons la même chose mais de deux points de vue différents, celui de l’esprit du rêve et celui de l’état de veille. Dans les deux situations c’est la vacuité du corps qui se manifeste à notre esprit.

Rêve-Eveil-02En fait, nous nous faisons « un véritable cinéma »! En effet, au cinéma, nous sommes confortablement installés dans notre fauteuil et suivons avec attention ce qui se passe sur l’écran. Selon les scènes et les situations, nous éprouvons diverses sensations, diverses émotions et nous sommes par moment totalement immergés dans l’action qui se déroule devant nous sur l’écran. Ainsi, nous pouvons tout aussi bien imaginer que nous sommes actuellement « assis dans notre fauteuil » et contemplons les événements et les phénomènes que se produisent sur « l’écran de notre esprit », dans notre vie de tous les jours. Dans les deux cas, nous sommes « l’observateur », le spectateur de notre esprit. De plus, notre rôle n’est pas simplement passif dans le sens de spectateur, nous sommes à la fois le spectateur et le réalisateur de ce qui est projeté sur l’écran de notre esprit. Ce qui veut dire que nous sommes aussi  le créateur de tout ce qui se projette dans notre esprit aussi bien durant le rêve que durant l’état de veille. Tout se passe dans notre esprit et il n’y a rien à l’extérieur de ce dernier. Bouddha nous dit que le monde que nous percevons n’est qu’une illusion, une simple hallucination.

Tout cela n’est pas si simple qu’il n’y paraît. Notre principal obstacle est notre ignorance de saisie d’un soi. Cette perturbation mentale nous convainc que les objets et les phénomènes existent réellement de leur propre côté. En croyant que ceux-ci sont à l’extérieur de notre esprit, nous saisissons les objets qui nous sont agréables avec un fort attachement et évitons les objets qui nous sont désagréables avec une aversion. Aussi bien dans notre rêve que dans la vie ordinaire, nous ne mettons pas en doute le fonctionnement de cette perception. Au besoin, nous pouvons dans les deux cas demander confirmation à quelqu’un d’autre. Notre interlocuteur, celui du rêve ou celui de la vie ordinaire attestera le bien fondé de nos sensations. La difficulté majeure que nous avons,  consiste à lâcher cette croyance de l’existence intrinsèque de tout ce que nous percevons. Même si nous n’y arrivons pas immédiatement, par l’entraînement de notre esprit, progressivement nous pouvons aller dans cette direction. Le jour où nous nous réveillerons de notre ignorance, nous constaterons qu’il n’y a jamais eu de différence.

 Rédigé d’après mes notes personnelles tirées des enseignements reçus sur la vacuité.

 

Réflexions sur la vacuité

D’après le dictionnaire, la vacuité est définie comme l’état de ce qui est vide. L’aphorisme d’Aristote « la nature a horreur du vide » a traversé les siècles sans rien perdre de sa vigueur. Alors, si nous sommes sur la voie spirituelle, ce n’est pas étonnant que le simple mot vacuité nous plonge d’abord dans une perplexité. Le mot vacuité nous Vacuit-01fait penser à l’absence de quoi que ce soit, à faire le vide dans son esprit. Certains diront que c’est ne penser à rien. Toutes ces descriptions sont loin de ce que vacuité veut dire spirituellement parlant. Dans le livre « Bouddhisme moderne » Guéshé Kelsang Gyatso définit la vacuité de la manière suivante : La vacuité est la manière dont les choses existent réellement. C’est la manière dont les choses existent par opposition à la manière dont elles apparaissent. Nous croyons naturellement que les choses que nous voyons autour de nous, comme par exemple les tables, les chaises et les maisons existent vraiment parce que nous croyons qu’elles existent exactement de la manière dont elles apparaissent. Toutefois, la manière dont les choses apparaissent à nos sens est trompeuse et en contradiction totale avec la manière dont elles existent effectivement.

Bien que la notion de vacuité soit un sujet profond nous pouvons l’aborder en essayant de rompre l’image préconçue de ce monde qui nous apparaît et que nous croyons exister de cette manière. Une manière simple de le faire est de nous servir de l’analogie du rêve. Pour cela, nous devons laisser de côté nos convictions actuelles en contemplant en détail comment un objet devrait exister s’il existe de son propre côté indépendamment de tout autre chose. Nous allons ensuite approfondir notre compréhension à la manière d’un enfant qui a envie d’apprendre à lire et pour qui tout est nouveau. D’après la citation ci-dessus, chaque fois que nous avons la conviction qu’un objet existe en dehors de notre esprit nous nous méprenons. Chaque fois que l’existence d’un objet nous paraît évidente nous nous trompons. Pourquoi? Parce qu’à chaque fois qu’un objet apparaît à notre esprit, si nous nous posons la question : « Est-ce que cet objet existe de son propre côté, de manière intrinsèque? », la réponse est « Non! ».

Vacuit-02Pour étayer cette réponse, prenons par exemple le rêve suivant et essayons de comprendre comment apparaît le monde du rêve. Imaginons que dans notre rêve nous avons soif. Nous nous dirigeons vers le robinet de l’évier de la cuisine, nous prenons un verre dans le buffet au-dessus de l’évier, nous faisons couler de l’eau et remplissons notre verre. Après quoi, nous portons notre verre à notre bouche et nous buvons à petites gorgées cette eau pour apaiser notre soif. Tout au long de cette opération, nous ressentons diverses sensations telles que le bruit de l’eau qui coule, la fraîcheur de l’eau, le poids de celle-ci alors que le verre se remplit, pour finalement avoir la sensation de se désaltérer en buvant cette eau. Durant ce rêve, en aucun moment nous nous posons la question d’où vient le verre? Est-ce qu’il y a vraiment un évier qui existe? D’où vient cette eau qui remplit notre verre? Pas plus que de savoir d’où nous venons, si nous nous asseyons, si nous marchons pour nous diriger vers l’évier. Nous remplissons le verre dans notre main avec de l’eau que nous buvons et c’est tout. Ceci résout le problème de notre soif dans notre rêve.

Au moment de notre réveil, tous les objets de notre rêve cessent d’exister. Nous avons vécu toutes les événements de notre rêve sans bouger de notre lit! Ceci tend à démontrer qu’aussi bien les objets que les sensations de notre rêve n’étaient qu’une projection de notre esprit et que ceux-ci n’ont eu qu’une existence en relation dépendante de notre esprit. Lorsque l’esprit du rêve cesse, le monde de celui-ci cesse également. Transposons maintenant le même scénario dans la vie quotidienne. Si à un moment donné nous avons soif, que faisons-nous? Nous nous déplaçons jusqu’à un évier de notre appartement, nous prenons un verre puis tournons le robinet pour faire couler de l’eau qui remplira notre verre, nous voyons couler l’eau, nous entendons le bruit qu’elle fait. Une fois rempli, nous portons le verre à notre bouche et apprécierons le sentiment d’apaisement de la soif que nous procure cette eau. Alors, du point de vue de l’esprit quelle différence entre les deux situations? Force est de constater qu’il n’y a aucune différence! La manière dont les choses nous apparaissent ne correspond pas à la manière dont elles existent réellement. Ceci nous incite à aller voir comment les choses existent par une investigation basée sur la sagesse.

Pourtant, il doit bien y avoir une explication. Celle-ci, nous dit Guéshé Kelsang Gyatso dans son livre « Un Bouddhisme moderne » est à rechercher du côté de l’objet puisque dans les deux cas c’est apparemment le même esprit qui en fait l’expérience. Deux manières s’offrent à nous : la manière conventionnelle et la manière ultime. Nous désignons les choses par un simple nom que nous imputons à l’objet qui nous apparaît. Dans la situation évoquée, un verre, un évier, un robinet et ainsi de suite et nous n’allons pas plus loin que ce simple nom qui fonctionne très bien d’ailleurs. Pour comprendre la manière ultime de l’existence des choses, nous devons procéder Vacuit-03d’une manière plus scientifique. Ainsi, par exemple pour le robinet. Il s’agit d’un assemblage de pièces, les unes en plastique, d’autres en laiton chromé ou en acier inoxydable qui, assemblée d’une certaine manière produisent un robinet. Le nom générique robinet désigne l’ensemble de ses parties et s’adresse à tous les robinets existants sur cette planète.

Mais si nous insistons dans notre recherche afin de trouver le robinet qui existe de manière intrinsèque, de son propre côté, nous démontons celui-ci pièce par pièce jusqu’à avoir un certain nombre de pièces qui, prises séparément ne sont pas le robinet. À chacune de ces pièces, nous pouvons donner un nom spécifique différent du nom robinet. Si le robinet existait de son propre côté, nous devrions le percevoir en dehors de ses parties puisque celles-ci ne sont pas le robinet. Or, il n’y a rien qui ressemble à un robinet en dehors de ses parties. En dehors de toutes ces pièces que nous avons devant nous, il n’y a pas de robinet. En d’autres termes, le robinet n’existe pas de son propre côté, il n’existe qu’en relation dépendante de ses parties. Si maintenant, nous supposons que nous n’avons jamais démonté un robinet de notre vie et nous sommes en présence des mêmes pièces qu’auparavant nous serons bien empruntés de dire qu’il s’agit des pièces qui, une fois assemblées constitueront un robinet. En d’autres termes, le robinet existe qu’en dépendance de l’esprit qui observe les pièces détachées de ce dernier. Ainsi, en faisant une recherche de manière ultime nous arrivons à la conclusion que le robinet n’existe pas de son propre côté, mais que ce qui nous apparaît est la vacuité du robinet.

Rédigé et compilé d’après mes notes prises lors d’un enseignement sur « S’entraîner à la bodhitchitta ultime » reçu au Centre Atisha de Genève en 2014.

Tous les phénomènes sont comme des rêves.

Dans ses enseignements Bouddha aborde un thème subtil et difficile, celui de la vacuité. C’est un sujet profond et important que tout un chacun aborde à un moment dans son cheminement spirituel vers l’illumination. Il y a deux semaines, l’enseignante bouddhiste Hélène Oester du Centre Dromtönpa de Bern s’adressait à un auditoire de néophytes. Je voudrais partager avec vous, lectrices et lecteurs, quelques points essentiels de son enseignement.
Pourquoi est-ce difficile et profond? Parce que c’est quelque chose qui nous prend à rebrousse-poil, qui va à l’encontre de notre façon habituelle de penser et qui ébranle nos certitudes. Parce que c’est en contradiction avec la manière dont nous pensons que les choses sont, que nous affirmons : « Ce n’est pas possible! », « Pourtant je suis sûr que c’est comme cela! ». Le thème de la vacuité est absolument essentiel. Nous devons par conséquent être patient et prendre le temps pour le comprendre et le mettre en pratique. Mais si nous gardons un esprit ouvert, il y aura tôt ou tard, toujours quelque chose qui va nous toucher et nous permettre de mieux comprendre. Alors, comme un jardinier, nous prenons soin des graines semées dans notre esprit et attendons qu’elles mûrissent.

Nous tous, dans notre vie quotidienne rencontrons des problèmes et des difficultés que nous voulons surmonter et résoudre. Pour cela, nous faisons beaucoup d’efforts qui nous apportent, temporairement du moins, un soulagement, un peu de répit. D’où vient notre incapacité à trouver une solution définitive à nos problèmes? C’est parce que nous ne travaillons pas vraiment la cause de notre souffrance, mais essayons par toutes sortes de moyens d’en supprimer les effets. Nous ne sommes pas vraiment en train de nous attaquer à la cause de notre colère, de débusquer les raisons de notre attachement et ainsi de suite. En fait, nous restons trop superficiels pour enrayer ces mécanismes. Couper les mauvaises herbes de notre jardin, même très près du sol, n’empêchera pas celles-ci de repousser. Livre-BM-01Il nous faut absolument les éradiquer complètement pour en être définitivement débarrassés. La couverture du livre de Guéshé Kelsang Gyatso, « Le Bouddhisme Moderne » représente un oiseau. Nous possédons généralement les qualités telles que l’amour, la compassion, la patience. Ces vertus sont représentées par une aile de l’oiseau. L’autre aile qui représente la sagesse dans notre vie nous manque le plus souvent. Dans ces conditions l’oiseau ne peut voler, de même nous ne pouvons prendre notre envol pour nous libérer des problèmes et de la souffrance.

Toutes les pratiques et les méditations qui découlent de l’amour, de la compassion, de la patience, de la prise et le don constituent ce qui s’appelle la méthode et est représentée par une des deux ailes. L’autre aile est justement la sagesse dont nous manquons si nous voulons progresser dans la voie spirituelle. Bouddha Shakyamouni a enseigné que chaque être vivant possède en lui la graine d’un bouddha. Ce qui veut dire que chacun d’entre-nous peut parvenir à la libération complète et ultime de la souffrance et de ses causes. Nous avons dans notre esprit racine une capacité, une force, un potentiel capable de nous libérer et de nous débarrasser définitivement de la source de toute souffrance provenant de notre manque de sagesse, de notre ignorance de saisie d’un soi. La sagesse est en quelque sorte le remède nous permettant de réaliser cet objectif. C’est pour cette raison que nous devons de manière sincère nous poser la question suivante : « Est-ce que je veux vraiment me débarrasser de mon ignorance et de toute la souffrance qui en découle? ». Parce ce que si nous n’arrivons pas à imaginer que cela soit possible, nous ne pouvons profiter du remède proposé par Bouddha. Tout se passe comme si nous apprécions les caractéristiques d’un délicieux chocolat sans véritablement le goûter et de penser qu’il est probablement excellent.

Nous avons la possibilité de développer cette sagesse qui réside en nous. Il s’agit de la sagesse qui comprend et réalise la vacuité. Nous pouvons nous familiariser avec cette notion de vacuité par la méditation avant d’utiliser cette sagesse qui comprend la vacuité dans notre vie de tous les jours. Rappelons que la vacuité, contrairement à l’idée reçue dans la vie courante, n’est pas « le rien », « le néant ». La vacuité telle que nous l’enseigne Bouddha est quelque chose de plus subtil et très différent. Nous devons absolument garder cette différence présente à notre esprit. Il faut éviter de tomber dans le piège de la simplicité ordinaire. La ligne de compréhension est très arc-en-cielfine et il est facile de s’en écarter. Guéshé Kelsang Gyatso défini la vacuité de la manière suivante, je cite : « La vacuité est la manière dont les choses existent réellement. C’est la manière dont les choses existent par opposition à la manière dont elles apparaissent ».

Nous croyons naturellement que les choses que nous voyons autour de nous, comme par exemple les objets existent vraiment parce que nous croyons qu’ils existent exactement de la même manière qu’ils nous apparaissent. Pour nous tous, toutes les choses apparaissent indépendamment de notre esprit. Tout se passe comme si les objets étaient toujours là pour qu’ils puissent apparaître à notre esprit. Comme si les choses étaient posées devant nous pour que nous puissions les rencontrer. Cette façon de percevoir les choses est en contradiction avec ce que Bouddha nous dit : « Les choses n’existent pas vraiment comme elles nous apparaissent ». Lorsque nous aurons réalisé et compris la vacuité, les choses continueront de nous apparaître de cette façon, mais nous ne tomberons plus dans le piège de l’ignorance de saisie d’un soi. Nous saurons alors que les choses sont semblables à une illusion, semblables à un rêve. Si nous arrivons à nous rappeler que les choses apparaissent d’une certaine manière qui ne correspond pas à la manière dont elles existent, nous amène à moins vouloir s’attacher aux choses. Ce faisant nous obtenons un instant de liberté intérieure nous permettant de dissiper notre attachement désirant et notre ignorance. Avec ces petits instants de liberté intérieure nous renforçons notre compréhension de comment les choses sont vraiment.

Extraits compilés d’après l’enseignement de Kadam Hélène Oester, du Centre bouddhiste Dromtönpa de Bern donné à Fribourg.

Jeux de rôles, le chemin de l’illumination

Mieux comprendre les notions d’imputation et de base d’imputation.

Rôle-01Ces deux notions souvent plongent le néophyte dans une grande perplexité quand bien même nous les expérimentons constamment inconsciemment dans notre vie. Chaque expérience que nous faisons est subordonnée à la situation mise en scène par notre esprit ou si vous préférez due à l’activité faite dans une situation donnée. Par exemple, si nous sommes un parent : lorsque nous sommes avec nos enfants nous assumons totalement notre fonction avec les attributs et les qualifications d’un père ou d’une mère ; mais lorsque nous sommes au bureau, à notre place de travail nous utilisons nos compétences professionnelles. Dans un cas comme dans l’autre, il s’agit d’une activité exclusive. Lorsque que nous sommes un parent nous ne sommes pas simultanément celui ou celle qui travaille. Soit nous sommes à la maison soit au bureau, pas aux deux endroits simultanément. Tout se passe comme si nous jouerions différents personnages au fil du temps.

Rôle-02Étymologiquement, le mot « personne » provient probablement de l’étrusque qui désigne le masque que portaient les comédiens au théâtre. Ainsi, tout au long de notre vie nous changeons continuellement de masque donc de personnage. Nous pouvons dire que les propriétés et les caractéristiques de chaque personnage constituent la base d’imputation pour imputer le nom spécifique qui lui correspond. Et à chaque nom, chaque personnage, correspond une base d’imputation différente. Partant de l’idée que le JE de nous-mêmes a pour base d’imputation ce corps actuel, nous avons eu par le passé différents corps, celui d’un nouveau-né, d’un enfant, d’un adolescent et maintenant un corps d’adulte. Il est évident que tous ces corps ont eu un aspect temporaire différent les uns des autres. En conclusion nous avons continuellement changé de base d’imputation. Ces changements se sont fait naturellement de façon continue.

Du point de vue spirituel, une clé importante est de faire la distinction entre la base d’imputation et l’imputation elle-même. Nous venons de comprendre qu’il s’agit bien de deux choses distinctes. De la même manière, notre JE n’est rien de plus qu’un nom, une simple étiquette que nous imputons sur la collection de notre corps ordinaire et de notre esprit ordinaire. La seule raison pour laquelle nous sommes un être humain est que de par notre karma nous imputons notre JE sur un corps humain. Rôle-03Rien ne nous empêche d’apposer cette étiquette sur une autre base. Et de toutes les bases d’imputation possibles, la meilleure est celle d’un bouddha. Si nous ne le faisons pas, c’est parce que d’une part nous croyons que ce corps humain existe vraiment de son propre côté et d’autre part que nous y sommes très attachés.

Or les enseignements sur la vacuité nous expliquent que tous les objets sont vides d’existence intrinsèque et n’existent qu’en relation dépendante de leurs parties, de causes et de conditions et de l’esprit qui les perçoit. C’est pour cette raison que si nous considérons que ce JE est plus qu’une simple désignation et existe de son propre côté attaché à ce corps existant de manière intrinsèque, nous ne pouvons imputer ce JE sur autre chose. C’est parce que ce JE est vide d’existence intrinsèque et que c’est juste un nom que nous pouvons imaginer d’échanger sa base d’imputation actuelle avec le corps et l’esprit d’un bouddha. C’est la voie à suivre pour atteindre l’illumination d’un bouddha.