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Chaque instant de notre précieuse vie humaine

Tout un chacun attache une grande valeur à sa vie. Il suffit de voir ce que l’être humain est capable de faire lorsqu’il est en danger pour sa vie. On parle volontiers alors d’instinct de survie. Pourquoi? Parce ce que nous sommes fortement attachés à cette vie et à tout ce qui la concerne. Nous sommes prêts à sacrifier tous nos biens pour la conserver. Nous sommes capables de fuir un environnement hostile au prix de grands dangers pour en rencontrer d’autres peut-être plus grands encore. Une mère se sacrifiera pour sauver la vie de son enfant. Notre vie est précieuse par l’opportunité qu’elle nous donne de pouvoir jouir d’une existence matérielle confortable, à l’abri des tourments liés à notre civilisation contemporaine. Notre vie est précieuse par le fait que nous avons travaillé dur pour enfin profiter d’un peu de bonheur. Mais comme le dit Bouddha, toutes ces situations et ces choses ne sont que des rêves, des illusions temporaires projetées par notre esprit sous l’emprise de l’ignorance.

Mais alors, est-ce qu’il y a quelque chose de plus précieux que la vie décrite ci-dessus? Évidemment oui. C’est notre vie spirituelle qui est née de cette précieuse vie humaine. Notre vie humaine est si précieuse parce qu’elle nous donne la possibilité d’entrer dans la voie spirituelle et d’y progresser, et pour finalement compléter tout notre entraînement spirituel. Par cet entraînement nous donnons naissance à notre vrai Soi par opposition à notre soi ordinaire et une nouvelle vie commence, notre vie spirituelle. C’est pourquoi, comme une mère protège son enfant nouveau-né d’un environnement hostile, nous devons faire de même avec notre vie spirituelle. Si nous ne le faisons pas, celle-ci dépérira inévitablement. C’est seulement lorsque nous pensons à quel point dans le passé nous avons permis à notre vie spirituelle de dégénérer que nous réalisons d’avoir gaspiller cette précieuse vie humaine.

Precieuse_vie-01Qu’est ce qui peut mettre en danger notre vie spirituelle? Le samsara qui est cet environnement hostile comprenant d’innombrables ennemis qui veulent nous détruire. Quels sont ces ennemis qui voudraient tuer notre vie spirituelle? Ce sont nos perturbations mentales. Celles-ci semblent comprendre que notre vie spirituelle constitue un opposant particulièrement préjudiciable pour leur existence. Autrement dit, nos perturbations mentales sont menacées par l’existence de notre vie spirituelle et tenteront de tout faire pour l’affaiblir et finalement la détruire. En comprenant que notre précieuse vie humaine est le fondement même sur lequel se construit notre vie spirituelle, nous générerons sûrement le désir d’en prendre soin, de la nourrir et de la protéger comme le ferait une mère pour son plus cher enfant.

C’est pourquoi nous devons envisager chaque instant de notre précieuse vie humaine comme une précieuse opportunité de pratiquer la voie spirituelle dans notre vie. Comment? En considérant notre vie comme un intervalle dans lequel nous accueillons le guide spirituel dans notre cœur et dans notre esprit, lui permettant de nous aider à progresser vers l’illumination, vers la bouddéité. Même si la présence de notre guide spirituel n’est pas encore clairement établie dans notre esprit, nul n’est besoin de se forcer à le comprendre, il suffit juste de se détendre et d’ouvrir son cœur. La meilleure consigne qui soit dans ce cas est de juste débrancher notre soi ordinaire pour accueillir ce que nous devons comprendre avec notre vrai Soi. Nous avons juste besoin d’ouvrir notre cœur afin de recevoir les bénédictions de notre guide spirituel dans notre esprit.

Precieuse_vie-02Lorsque nous avons cette opportunité et nous ne savons pas si elle durera encore longtemps, nous allons l’utiliser au maximum. Avec notre précieuse vie humaine, nous devons être comme celui qui a un temps très limité pour accomplir une tâche importante, voire vitale et où chaque seconde compte. De la même manière, nous devons tirer profit de chaque opportunité pour nourrir notre vie spirituelle et d’accumuler du mérite grâce à la vraie valeur de cette précieuse vie humaine. Que veut dire l’expression « gaspiller notre précieuse vie humaine »? C’est d’une part de s’engager dans des actions qui n’ont aucun sens, chaque moment passé dans de telles actions ne nous est d’aucune utilité pour notre vie spirituelle et d’autre part en fuyant nos perturbations mentales au lieu de les combattre. Nous avons beaucoup de familiarité avec cette stratégie de fuite face à nos perturbations mentales. Pour certains c’est la pratique principale. C’est une sorte de capitulation face à elles prétextant qu’elles sont plus fortes que nous. Le moment est venu de nous lever et de nous battre!

En fait il n’y a pas d’activité insensée de manière intrinsèque, c’est notre perception de cette même activité qui lui donne ou pas un sens. Il n’existe pas un travail dénué de sens, mais une manière de le faire qui ne lui donne aucun sens. Tout dépend de notre état d’esprit au moment de nous engager dans une activité. Si nous nous engageons continuellement dans nos activités avec un esprit samsarique, nous gaspillons toute notre vie. Nous devons prendre chaque moment et nous engager dans notre vie avec l’esprit du dharma. Nous devons envisager notre vie comme un champ de Precieuse_vie-03bataille contre nos perturbations mentales. Si nous avons la capacité de combattre un ennemi, il peut être sage de ne pas le provoquer, mais ce dernier sera toujours là. Par contre, si nous avons la chance de posséder grâce au guide spirituel les armes pour le combattre et c’est le cas avec notre précieuse vie humaine, nous devons nous engager dans le combat.

Inspiré d’un enseignement et du commentaire de « La Voie Joyeuse » de Kelsang Gyatso, donné par Kadam Ryan au Centre Atisha de Genève en 2004

Crédits Illustrations http://fr.123rf.com

 

Tous les phénomènes sont comme des rêves.

Dans ses enseignements Bouddha aborde un thème subtil et difficile, celui de la vacuité. C’est un sujet profond et important que tout un chacun aborde à un moment dans son cheminement spirituel vers l’illumination. Il y a deux semaines, l’enseignante bouddhiste Hélène Oester du Centre Dromtönpa de Bern s’adressait à un auditoire de néophytes. Je voudrais partager avec vous, lectrices et lecteurs, quelques points essentiels de son enseignement.
Pourquoi est-ce difficile et profond? Parce que c’est quelque chose qui nous prend à rebrousse-poil, qui va à l’encontre de notre façon habituelle de penser et qui ébranle nos certitudes. Parce que c’est en contradiction avec la manière dont nous pensons que les choses sont, que nous affirmons : « Ce n’est pas possible! », « Pourtant je suis sûr que c’est comme cela! ». Le thème de la vacuité est absolument essentiel. Nous devons par conséquent être patient et prendre le temps pour le comprendre et le mettre en pratique. Mais si nous gardons un esprit ouvert, il y aura tôt ou tard, toujours quelque chose qui va nous toucher et nous permettre de mieux comprendre. Alors, comme un jardinier, nous prenons soin des graines semées dans notre esprit et attendons qu’elles mûrissent.

Nous tous, dans notre vie quotidienne rencontrons des problèmes et des difficultés que nous voulons surmonter et résoudre. Pour cela, nous faisons beaucoup d’efforts qui nous apportent, temporairement du moins, un soulagement, un peu de répit. D’où vient notre incapacité à trouver une solution définitive à nos problèmes? C’est parce que nous ne travaillons pas vraiment la cause de notre souffrance, mais essayons par toutes sortes de moyens d’en supprimer les effets. Nous ne sommes pas vraiment en train de nous attaquer à la cause de notre colère, de débusquer les raisons de notre attachement et ainsi de suite. En fait, nous restons trop superficiels pour enrayer ces mécanismes. Couper les mauvaises herbes de notre jardin, même très près du sol, n’empêchera pas celles-ci de repousser. Livre-BM-01Il nous faut absolument les éradiquer complètement pour en être définitivement débarrassés. La couverture du livre de Guéshé Kelsang Gyatso, « Le Bouddhisme Moderne » représente un oiseau. Nous possédons généralement les qualités telles que l’amour, la compassion, la patience. Ces vertus sont représentées par une aile de l’oiseau. L’autre aile qui représente la sagesse dans notre vie nous manque le plus souvent. Dans ces conditions l’oiseau ne peut voler, de même nous ne pouvons prendre notre envol pour nous libérer des problèmes et de la souffrance.

Toutes les pratiques et les méditations qui découlent de l’amour, de la compassion, de la patience, de la prise et le don constituent ce qui s’appelle la méthode et est représentée par une des deux ailes. L’autre aile est justement la sagesse dont nous manquons si nous voulons progresser dans la voie spirituelle. Bouddha Shakyamouni a enseigné que chaque être vivant possède en lui la graine d’un bouddha. Ce qui veut dire que chacun d’entre-nous peut parvenir à la libération complète et ultime de la souffrance et de ses causes. Nous avons dans notre esprit racine une capacité, une force, un potentiel capable de nous libérer et de nous débarrasser définitivement de la source de toute souffrance provenant de notre manque de sagesse, de notre ignorance de saisie d’un soi. La sagesse est en quelque sorte le remède nous permettant de réaliser cet objectif. C’est pour cette raison que nous devons de manière sincère nous poser la question suivante : « Est-ce que je veux vraiment me débarrasser de mon ignorance et de toute la souffrance qui en découle? ». Parce ce que si nous n’arrivons pas à imaginer que cela soit possible, nous ne pouvons profiter du remède proposé par Bouddha. Tout se passe comme si nous apprécions les caractéristiques d’un délicieux chocolat sans véritablement le goûter et de penser qu’il est probablement excellent.

Nous avons la possibilité de développer cette sagesse qui réside en nous. Il s’agit de la sagesse qui comprend et réalise la vacuité. Nous pouvons nous familiariser avec cette notion de vacuité par la méditation avant d’utiliser cette sagesse qui comprend la vacuité dans notre vie de tous les jours. Rappelons que la vacuité, contrairement à l’idée reçue dans la vie courante, n’est pas « le rien », « le néant ». La vacuité telle que nous l’enseigne Bouddha est quelque chose de plus subtil et très différent. Nous devons absolument garder cette différence présente à notre esprit. Il faut éviter de tomber dans le piège de la simplicité ordinaire. La ligne de compréhension est très arc-en-cielfine et il est facile de s’en écarter. Guéshé Kelsang Gyatso défini la vacuité de la manière suivante, je cite : « La vacuité est la manière dont les choses existent réellement. C’est la manière dont les choses existent par opposition à la manière dont elles apparaissent ».

Nous croyons naturellement que les choses que nous voyons autour de nous, comme par exemple les objets existent vraiment parce que nous croyons qu’ils existent exactement de la même manière qu’ils nous apparaissent. Pour nous tous, toutes les choses apparaissent indépendamment de notre esprit. Tout se passe comme si les objets étaient toujours là pour qu’ils puissent apparaître à notre esprit. Comme si les choses étaient posées devant nous pour que nous puissions les rencontrer. Cette façon de percevoir les choses est en contradiction avec ce que Bouddha nous dit : « Les choses n’existent pas vraiment comme elles nous apparaissent ». Lorsque nous aurons réalisé et compris la vacuité, les choses continueront de nous apparaître de cette façon, mais nous ne tomberons plus dans le piège de l’ignorance de saisie d’un soi. Nous saurons alors que les choses sont semblables à une illusion, semblables à un rêve. Si nous arrivons à nous rappeler que les choses apparaissent d’une certaine manière qui ne correspond pas à la manière dont elles existent, nous amène à moins vouloir s’attacher aux choses. Ce faisant nous obtenons un instant de liberté intérieure nous permettant de dissiper notre attachement désirant et notre ignorance. Avec ces petits instants de liberté intérieure nous renforçons notre compréhension de comment les choses sont vraiment.

Extraits compilés d’après l’enseignement de Kadam Hélène Oester, du Centre bouddhiste Dromtönpa de Bern donné à Fribourg.

Le rêve est-il une réalité ou la réalité est-elle un rêve?

Réalité-01Si toutes les causes et conditions météorologiques sont réunies pour que des nuages apparaissent dans le ciel, ce dernier se couvrira et il pourra même pleuvoir. La formation des nuages dépend de ces conditions atmosphériques. Sans ces conditions, les nuages ne peuvent se former. Et pour que ce phénomène puisse être observé par notre esprit, faut il encore que nous nous trouvions au bon endroit. Si un ami vous appelle de son téléphone portable pour vous dire qu’il observe un magnifique arc-en-ciel, il est peu probable que vous le voyez aussi, n’étant pas au même endroit.

Cette constatation nous permet d’énoncer la définition suivante : « Tout objet ou phénomène n’existe qu’en relation dépendante de ses parties, de causes et conditions et d’un esprit qui l’observe ».
En considérant la loi de causalité du karma, toute expérience que nous sommes sur le point de vivre est assujettie au mûrissement de graines karmiques présentes dans notre esprit. En d’autres termes, les objets et les phénomènes qui nous entourent sont dus à notre propre état d’esprit d’actuel. Contrairement à ce que nous pensons par ignorance,  ceux-ci n’existent pas de manière intrinsèque en dehors de notre esprit.

Puisque le karma prend sa source dans l’esprit, et plus précisément dans nos intentions mentales traduites en actions, nous avons accumulé dans le passé d’innombrables empreintes karmiques. Et lorsque les causes et conditions  de leur mûrissement seront remplies les effets de ces actions se feront sentir.
Or, notre esprit fonctionne aussi bien à l’état de veille que lorsque nous dormons. On parle d’un esprit grossier lorsque nous sommes réveillés et dans nos activités quotidiennes, et d’esprit subtil lorsque nous dormons dans l’état du rêve. Dans les deux cas, l’activité de notre esprit dépend de ce même mûrissement de graines karmiques.

Réalité-02Contemplons ce qui se passe lorsque, endormi, nous faisons un rêve. Le contenu du rêve résulte de notre état d’esprit. Les objets et les personnes qui apparaissent dans le rêve nous semblent exister réellement, au point que nous pouvons toucher ces objets et dialoguer avec ces personnes. Dans ce rêve, nous pouvons vivre toutes sortes d’émotions agréables et désagréables , voyager à l’autre bout du monde. Si vous doutez de l’existence d’un objet particulier dans votre rêve, vous pouvez avoir la confirmation de son existence en questionnant une autre personne de votre rêve. Mais viendra le moment où nous nous réveillerons et toute ce monde onirique disparaîtra alors que l’esprit subtil du rêve aura cessé.
Contemplons maintenant ce qui se passe lorsque nous sommes réveillés. Toujours en dépendance du mûrissement de graines karmiques sur notre esprit, nous allons faire diverses expériences quotidiennes. Nous allons manipuler divers objets, nous allons interagir avec les personnes de notre entourage. En aucun moment nous doutons de la pertinence de ce que nous percevons comme bien réels, existants de manière intrinsèque.

Réalité-03Que se passe-t-il dans notre esprit pour que les deux situations se ressemblent étrangement? Selon les enseignements de Bouddha, rien n’existe de manière intrinsèque et n’existe de son propre côté de manière indépendante à l’extérieur de notre esprit. Tout est création de notre esprit, aussi bien lorsque nous dormons que lorsque nous sommes réveillés. La principale cause dans les deux cas est notre grande ignorance de saisie du soi. C’est une perturbation mentale  qui nous fait croire que les objets et les phénomènes existent vraiment en dehors de notre esprit et indépendamment de nous, tant à l’état du rêve que dans l’état éveillé. Donc du point de vue de l’esprit il n’y a aucune différence entre une situation vécue dans notre rêve et une même situation vécue les yeux grands ouverts. Les deux situations n’existent que d’une manière conventionnelle, car nous sommes capables de les désigner, de les nommer, de mettre une étiquette sur les objets et les personnes, mais n’existent pas de la manière dont elles nous apparaissent. Nous savons que si nous examinons derrière le simple nom, nous ne pouvons pas trouver l’objet auquel il fait référence.

Cette réflexion sur le rêve de la réalité et la réalité du rêve ne doit pas nous décontenancer et nous faire peur en croyant que rien n’existe. En fait, tout existe d’une manière conventionnelle. Nous sommes ici dans une phase initiale de compréhension et de familiarité d’un concept très profond qui est celui de la vacuité. En contemplant et en méditant encore et encore ce qui vient d’être lu, nous créons sur notre esprit les causes de réaliser cette vérité. C’est en cela que Bouddha nous dit : « Réveillez-vous! ».

Inspiré d’un enseignement reçu samedi dernier et de la lecture de « Huit Etapes vers le Bonheur » de Ghéshé Kelsang Gyatso aux Ed. Tharpa.