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Comment se libérer de la colère et du ressentiment

Comment se libérer du poison intérieur de la colère et du ressentiment ? La colère ou le ressentiment qui sont des perturbations mentales ne peut apparaître sans la présence de causes et de conditions. La colère et le ressentiment n’existent pas de manière intrinsèque, de leur propre côté. Pour que la colère ou le ressentiment se manifeste en nous, il faut qu’un ennemi existe et que nous le percevions. Nous devons être en présence de quelqu’un qui nous fait réagir en nous faisant mal. Si par contre en face de nous se trouve quelqu’un qui nous veut du bien et qui nous aime, nous n’avons ni colère, ni ressentiment envers lui. La colère et le ressentiment se manifestent en nous qu’à la condition que nous percevions un danger venant d’un ennemi, une personne à qui nous imputons l’étiquette : « Il ou elle m’a fait mal ». Dès cet instant, à cause Colere-Ressent-01de cette personne, la colère et le ressentiment apparaissent et prennent les commandes de notre esprit. Mais si nous sommes en présence de quelqu’un de bienveillant qui nous vient en aide, la colère et le ressentiment n’ont aucune chance de se développer.

Même si la manière utilisée par celle-ci peut être désagréable et nous fait souffrir, elle nous a finalement aidés. Il n’est pas facile d’adopter le point de vue qui perçoit que les autres nous aiment malgré le fait qu’ils nous mènent la vie dure. Cette constatation est surprenante et demande un peu de réflexion. Si de notre point de vue nous n’avons plus de colère et de ressentiment envers personne, nous n’avons plus d’ennemis. Pour quelqu’un qui s’est libéré de la colère tel un bouddha, tous les êtres vivants sont des amis quelle que soit la manière dont ils nous traitent. Parce que chaque être vivant nous enseigne quelque chose. Il fonctionne à la manière d’un écho karmique d’un aspect de notre esprit actuellement dysfonctionnel. De ce point de vue chaque être vivant nous aide. Sachant que notre esprit est le créateur de tout ce que nous vivons, le changement de notre point de vue en passant de la confusion à la sagesse nous amène à cette compréhension. Qu’en face de nous se trouve quelqu’un qui nous « casse les pieds » ou quelqu’un qui nous entraîne à la patience dépend essentiellement de notre point de vue.

À quoi ressemblerions-nous si tout le monde comblerait tous nos désirs ? Que personne ne nous aurait jamais contredits en nous mettant des bâtons dans les roues ? Nous serions comme un enfant gâté qui ne supporte pas qu’on lui dise non et qui croît que le monde tourne autour de lui. Heureusement qu’il existe des personnes qui ne satisfont pas systématiquement nos désirs et ne nourrissent pas notre orgueil nous incitant à la colère ou au ressentiment. Une personne orgueilleuse ne peut apprendre de personne, parce qu’elle a Colere-Ressent-02la conviction de mieux savoir que quiconque. Si nous sommes orgueilleux, nous avons le sentiment que personne n’est assez bien pour nous aider et de ce point de vue nous regardons les autres avec condescendance. L’orgueil est un état d’esprit, une perturbation mentale, qui nous amènent à avoir une vue déformée de nous-mêmes et nous fait souffrir. Il n’y a aucun mal à avoir des qualités, le problème se manifeste lorsque l’importance de celles-ci dépasse les limites de la convenance en nous incitant à l’arrogance, à la colère et au ressentiment, nous avons alors un sentiment de supériorité.

C’est pourquoi nous devons être vigilants, car lorsque tout va bien dans notre vie, que tous nos désirs sont satisfaits, nous développerons facilement de l’orgueil. Ce dernier nous entraîne alors dans une spirale lorsque nos richesses et notre savoir grandissent, que les autres nous vouent une admiration excessive renforçant l’opinion que nous avons de nous-mêmes au point que nous finissons par y croire. Cette attitude nous pose alors un problème majeur parce qu’elle nous coupe de toute possibilité d’apprendre quelque chose de quelqu’un d’autre. Satisfaits de ce que nous avons, nous pensons en savoir plus que tous les autres. Pourtant si d’autres personnes nous montrent par leur comportement, leurs paroles ce que nous pourrions changer en nous, en fait de par leur bienveillance, elles nous aident. Nous souffrons de la colère et du ressentiment parce que cela nous fait mal du moment que d’autres sont le reflet de nous-mêmes, nous révélant ainsi consciemment ou inconsciemment les choses que nous devrions changer dans notre esprit.

Nous développons de la colère ou du ressentiment lorsque la personne a « mis le doigt » sur ce qui est sensible actuellement. Elle a appuyé sur le déclencheur qui nous fait réagir. Et notre réaction habituelle est de lui en vouloir parce qu’elle semble être la cause de notre souffrance. Tout se passe comme si elle avait activé la colère et le ressentiment prêts à se manifester. Le problème ne réside pas dans le fait que quelqu’un active le déclencheur mais plutôt dans le fait d’avoir ce déclencheur. S’il n’y a aucun déclencheur en nous, rien ne peut être déclenché. Pour illustrer cela, prenons la mesure du taux d’acidité de notre miction. Pour bien fonctionner l’acidité de notre organisme doit être dans une plage de valeurs précises. Une valeur en dehors cette plage révèle un dysfonctionnement. Or nous pouvons connaître ce taux d’acidité en utilisant un papier spécialement conçu Colere-Ressent-03pour ce genre de mesure. En trempant ce dernier dans un récipient de notre urine, nous pouvons évaluer cette acidité. S’il y a une acidité anormale le papier vire vers le rouge (acide) et au contraire vers le bleu (Alcalin).

De la même manière pour nous, si nous développons de la colère ou du ressentiment dépend de la présence de ce qui nous fait réagir. La personne agit à la manière d’un papier-révélateur de nos perturbations mentales de colère et de ressentiment dont nous avons besoin de nous en libérer, de ce point de vue-là nous aide. Sans révélateur, nous ne pouvons pas savoir si notre esprit est sous l’emprise de la colère ou du ressentiment. Ce sont en fait les autres qui agissent comme révélateur et en leur absence nous allons continuer à nourrir celles-ci. Ainsi, nous avons une multitude d’états d’esprit perturbés qui nous font mal et que nous ne reconnaissons pas parce que nous ne les voyons pas. Nous sommes conscients des dégâts qu’ils occasionnent sans pour autant reconnaître leur provenance. Pour nous débarrasser de ces maux, nous avons besoin de les nommer et de les identifier clairement. Dans ce sens, même à leur insu les autres nous sont bénéfiques dans chaque situation. Leur attitude fonctionne comme révélateur de nos perturbations de colère et de ressentiment et nous aide à les éradiquer définitivement.

Inspiré d’un enseignement reçu au IRC-Kailash Törbel donné par Kelsang Gikgyob au mois de novembre 2014

Combien de temps dure notre bonheur ?

Inspiré par l’enseignement reçu samedi dernier au Centre Dromtönpa de Fribourg, je partage avec mon lectorat quelques points importants entendus et résumés ci-après.

Temps_Bonheur-01Si nous nous posons la question de savoir combien de temps dure notre bonheur, notre réponse sera le plus souvent très subjective car sa durée dépendra de chacun. Pour illustrer la durée de notre bonheur, prenons des exemples connus de tous et que nous avons tous vécu une ou plusieurs fois. Par exemple, le temps des vacances, combien de temps dure le bonheur résultant d’être en vacances? Pour certains ce sera toute la durée de celles-ci et pour d’autres seulement quelques jours. Et une fois les vacances terminées, combien de temps ce bonheur se prolonge-t-il? Ce bonheur s’estompe très rapidement car confrontés à nouveau à la réalité de notre quotidien qui, forcément n’a pas changé depuis que nous sommes partis. Alors il ne reste qu’un vague souvenir mais le bonheur lui aura cessé. Ainsi, nous réalisons que ce type de bonheur reste limité dans sa durée. Nous pouvons facilement trouver d’autres exemples de situations vécues, telle qu’une rencontre avec de très bons amis, une fête de famille, parfois le travail. Pour toutes ces situations, malgré l’intensité des moments d’échange, la convivialité, le plaisir et la satisfaction qui nous procurent un sentiment de bonheur, celui-ci est temporaire et que de nombreuses circonstances sont susceptibles de le détruire.

Dans aucune de ces situations nous pouvons prétendre maintenir durablement cet état de bonheur au-delà du temps de l’expérience en question. Autrement dit, nous pouvons faire momentanément une expérience de bonheur mais celui-ci inéluctablement finit par nous échapper, comme du sable qui nous glisse entre les doigts. Il suffit parfois d’un rien pour que subitement notre sentiment de bonheur Temps_Bonheur-02soit brusquement anéanti par un événement imprévisible et désagréable. Bouddha nous enseigne qu’il existe une sorte de bonheur permanent, mais il ne se trouve pas dans nos expériences samsariques. Ce bonheur permanent résulte d’une clarté, d’une paix intérieure que seule la mise en pratique de ses enseignements explique. Nous sommes actuellement incapables de maintenir notre esprit dans cette paix intérieure malgré toute notre énergie. Le bonheur obtenu ne dure pas. Pourtant tous les êtres souhaitent posséder ce bonheur dont Bouddha nous parle. Pour cela, nous sommes prêts à tout changer dans notre existence, les objets, les personnes, notre environnement et nous sommes constamment en train de nous plaindre en pensant : « Si seulement je pouvais avoir cette situation, cet objet indispensable à mes yeux, je serais certainement heureux » ou bien encore « Ah si seulement telle ou telle personne pouvait changer sa façon d’être avec moi, je serais sûrement heureux ».

L’énergie que nous investissons à vouloir arranger les conditions extérieures dans notre vie se soldent tôt ou tard par une grande déception et nous devons nous rendre compte de ce mécanisme. Si le fait d’obtenir l’objet de nos rêves, la situation de nos rêves, le partenaire idéal suffisait à nous rendre heureux nous serions tous heureux. Nous avons tous cette certitude à quelque part dans notre esprit et nous nous obstinons dans la mauvaise direction. Pourtant nous réalisons que le bonheur que nous procurent toutes ces situations ne dure pas. Ceci est comme boire de l’eau salée en pensant que nous allons pouvoir étancher notre soif. C’est exactement la même chose lorsque nous cherchons ce genre de bonheur ordinaire et temporaire nous ne serons jamais rassasiés et satisfaits. Encore une fois, cela ne veut pas dire que nous devons renoncer à l’objet, la situation, le partenaire idéal, mais nous devons les considérer différemment. Alors finalement, pourquoi ne trouvons-nous pas ce bonheur qui dure? Ce bonheur qui se dérobe devant nous et qui systématiquement disparaît. Quelle est donc la cause pour laquelle nous ne ressentons pas ce bonheur permanent?

Temps_Bonheur-03Il y a deux principales causes à cela. La première cause est que notre esprit est sous le contrôle de nos perturbations mentales. C’est-à-dire que notre esprit est sous le contrôle de notre ignorance de la saisie du soi. Cette ignorance qui considère ce JE, ce MOI comme la chose la plus importante au monde et qui nous crée des problèmes tant qu’il n’est pas satisfait. La deuxième est que l’esprit alors réagit avec mécontentement, frustration, attachement et différentes autres perturbations mentales. Prenons un exemple pour illustrer ce mode de fonctionnement. Imaginons que nous déambulons dans une rue commerçante avec l’intention d’acquérir quelque chose d’original que personne ne possède encore à notre connaissance. À travers cette acquisition nous obtiendrons l’admiration de tous nos proches. Soudain à l’angle de la rue nous croisons « notre pire ennemi » qui possède exactement l’objet convoité et désiré. Cet événement génère instantanément en nous un sentiment de jalousie et de frustration qui va de fait anéantir notre projet et le bonheur que nous avions à l’idée de faire cet achat disparaît. Ce moment de bonheur a été chassé par cet événement soudain.

Cet exemple démontre que nous tombons systématiquement dans le piège de notre ignorance et que le bonheur nous échappe. Nous avons une telle familiarité avec ce mode de fonctionnement  que notre ignorance et notre préoccupation de soi nous mènent par le bout du nez tant que nous ne faisons pas quelque chose pour les supprimer. Pour cela, nous devons observer et contrôler le comportement de notre esprit en présence de telles situations et nous rendre compte des agissements perfides de nos perturbations mentales. Au lieu de tenter de changer ou de supprimer les conditions extérieures qui entravent le développement de notre bonheur nous devons nous mettre à l’ouvrage pour débusquer nos dysfonctionnements tout en reconnaissant ce qui se passe en nous. Les perturbations mentales sont trompeuses et nous devons cesser de nous fier à elles. Nous devons nous souvenir que ce ne sont pas les objets extérieurs qui nous procureront un vrai bonheur. Aussi longtemps que nous saisissons vivement et fortement ces différentes choses externes pour pouvoir être heureux, nous serons finalement toujours déçus.

Entre sagesse et supercherie

Lorsque nous sommes en présence d’un objet ou d’un phénomène, comme par exemple un grand doute ou une grande colère qui se manifeste dans notre esprit, nous pouvons être surpris et porter un jugement de valeur sur nous-mêmes, nous pensons peut-être : « Je suis nul ! C’est pas possible ! ». Nous pouvons tomber dans la colère et la préoccupation de soi et proférer une litanie de mots qui ne Sage-Sup-01trouvent pas leur place ici. Mais du moment où nous réalisons que c’est le guide spirituel qui active une expérience qui doit nous aider à comprendre quelque chose, nous y travaillions. Lorsque que de telles choses se manifestent dans notre esprit, au lieu de nous laisser berner par nos perturbations mentales, nous pouvons comprendre qu’en fait il s’agit d’une leçon de notre guide spirituel nous indiquant une leçon à apprendre.

Du même coup le problème perd toute sa consistance, et devient sans importance, sachant que c’est pour notre bien. Nous devons juste comprendre qu’il s’agit d’une leçon spirituelle. S’il s’agit, par exemple d’un fort attachement désirant, pour nous c’est clair que nous devons nous investir à résoudre ce problème d’attachement, en réfléchissant à « Qu’est ce qui provoque un tel attachement dans mon esprit ? » S’il s’agit d’une vue erronée nous disséquons celle-ci pour mieux comprendre notre erreur. « Qu’est-ce qui me fait croire que je fais juste ? ». Tout est question de la manière dont nous répondons à une situation qui se présente. Est-ce que nous allons donner notre assentiment à la perturbation mentale, en consentant d’être sous son influence ou trouvons nous le courage de relever le défi ? Tout comme dans la vie ordinaire, des épreuves de la vie spirituelle nous attendent dans celle-ci, et nous devons les surmonter.

Sage-Sup-03Le fait de savoir que ces épreuves existent ne suffit pas, mais il faut savoir si nous relevons le défi ou si nous abandonnons. Combien de fois pensons-nous : « Oui, je sais… mais en … » Dans ces moments là nous devons être très vigilants, parce que si nous abandonnons ou si nous renonçons le danger est que cela devienne une mauvaise habitude. Par familiarité lorsque nous sommes confrontés à un nouveau défi nous renonçons sans tarder. C’est ce qui se nomme un effet qui est une tendance similaire à la cause. Plus nous abandonnons et plus nous aurons tendance à abandonner, comme dans un cercle vicieux et il sera très difficile d’inverser cette tendance. A ce stade, avons-nous vraiment la détermination de changer? Même si c’est difficile, nous allons persévérer avec joie. Cette joie se développe à partir de notre sagesse intérieure qui, telle une boussole nous oriente dans la direction de la vertu.

Donc, il est fondamental pour nous de savoir si nous sommes dans cette bonne direction. Alors comment le savoir? Il y a un test très simple pour cela et que chacun peut appliquer aisément. Si notre esprit est calme, paisible et clair, notre esprit est dominé par la sagesse qui comprend ce qui est vertueux. De ce fait, les décisions choisies, les actions et les conclusions seront fiables. Par contre, si notre esprit est agité, anxieux, triste et confus, c’est un signe que ce que nous faisons dans ces moments-là n’est pas fiable parce que provenant de l’action de nos perturbations mentales. Finalement, comme le disait à l’époque mon enseignant du Programme Sage-Sup-02fondamental que nous pouvons comparer notre attitude face à un choix au célèbre personnage de dessins animés « Bugs Bunny » qui a dans son esprit un petit ange et un petit diable qui le conseillent. C’est à nous de savoir lequel il est préférable d’écouter. Est-ce que nous écoutons et suivons la voie de nos perturbations mentales? Ou bien est-ce que nous écoutons la voie de notre sagesse?

La voie spirituelle commence  avec la compréhension claire de la nature de notre problème. Notre problème n’est pas du côté des objets et des événements qui apparaissent dans notre vie, notre problème est notre esprit. Notre esprit est malade de ses perturbations mentales. La cause de cette maladie est notre croyance en la validité de celles-ci dès l’instant où elles se manifestent dans notre esprit. C’est la voix du diable qui nous induit dans l’erreur et qui finalement nous fait souffrir. Cette voix malicieuse simule la sagesse en nous proposant des solutions trompeuses en nous promettant un meilleur avenir, une meilleure solution à nos problèmes. Alors, survient la question cruciale : « Pouvons-nous nous permettre de nous tromper? ». Dans l’affirmative, nous leurs donnons le pouvoir par notre assentiment à leurs suggestions fallacieuses. Pour anéantir cette stratégie, nous allons avoir à travers leurs mensonges et réaliser la supercherie.

 Rédigé à partir de ma transcription et mes notes d’un enseignement donné par Kadam Ryan, lors du Programme Fondamental d’après le livre « Huit Etapes vers le Bonheur » au Centre Atisha à Genève en 2009.

Comment les distractions perturbent notre esprit?

Notre esprit, confronté à un monde de plus en plus complexe de par la multitude d’informations omniprésentes dans notre vie, ne cesse de chercher à comprendre et percevoir tous les objets et tous les phénomènes qui nous entourent. Cette abondance de stimulations de toutes sortes perturbe parfois gravement notre esprit. Il arrive souvent que notre esprit, tout en étant focalisé sur l’objet de notre occupation, se laisse distraire par une pensée parasite qui interfère avec celui-ci. Qui ne s’est pas trouvé plongé dans une réflexion profonde sur un sujet et que soudainement le souci de quelque chose d’autre se manifeste? A ce moment précis la tentation de se laisser accaparer par ce nouveau centre d’intérêt prend de l’importance. Et nous pensons pouvoir fonctionner en « multitâches », ce qui n’est pas une spécificité de nos agrégats contaminés. Dans ce contexte nous nous efforçons d’être efficaces, aussi bien dans notre quotidien que dans notre pratique, nous nous laissons encore souvent distraire.

Alors, comment se soustraire à toutes ces distractions? Nous devons renforcer notre concentration. La concentration est un état d’esprit capable de rester focalisé sur un objet en un seul point et d’y rester. Distractions-01La concentration est l’opposant par excellence à la distraction. N’avez-vous jamais observé un enfant absorbé par le nouveau jouet qu’il vient de découvrir? Celui-ci est tellement concentré et absorbé par cette expérience que pour lui le monde autour de lui disparaît. Cette image devrait nous inspirer. Au lieu d’avoir notre énergie à l’extérieur qui passe d’un objet à un autre, d’une pensée à une autre, la concentration monopolise notre attention en un point à l’intérieur de notre esprit, point duquel nous créons notre relation au monde qui nous entoure. En aucun moment nous sommes coupés du monde extérieur et ignorons ce qui se passe, mais nous en gardons le contrôle. Plus simplement, nous observons ce qui se passe à l’extérieur tout en observant simultanément de l’intérieur comment nous nous sentons en présence de l’objet observé. La difficulté apparaît lorsque des distractions surgissent à l’improviste et que nous sommes tentés de changer l’objet de notre observation.

Bien sûr que nous devons gérer de nombreuses pensées importantes dans notre quotidien. Il s’agit de ne pas vouloir les traiter toutes en même temps. Car dès l’instant où nous nous occupons d’une d’entre elles les autres représentent une source de distractions. Pour cela nous devons les éloigner et les reléguer à une « distance de sécurité ». Cette « distance de sécurité » est une distance positive qui nous permet de maintenir notre attention sur la pensée en cours sans distractions et sans interférence avec les autres pensées. En d’autres termes, imaginez une salle d’attente d’un cabinet médical, les patients attendent leur tour aussi longtemps que le médecin est occupé avec Distractions-02la personne précédente. Il arrive parfois aussi que nous nous laissons consciemment distraire, le plus souvent par de choses futiles. Il s’agit là d’une stratégie de fuite que nous adoptons lorsque nous manquons de motivation pour faire quelque chose. A la manière d’un monologue intérieur, nous évaluons ce que nous sommes en train de faire comme une tâche fastidieuse. Nous sommes prêts d’abandonner celle-ci pour le moment et la remplaçons immédiatement par une tâche certes futile mais surtout très distrayante et attractive. En prenant conscience de ce subterfuge, nous pouvons naturellement nous poser la question : « Pourquoi je me laisse distraire ainsi? ». Le fait de se poser cette question nous amènera à changer notre attitude face à la distraction.

Si nous commençons à nous laisser envahir par des distractions, nous nous remplissons d’activités inutiles et futiles. Grâce à cette observation intérieure, il arrive un moment où nous arrivons à dire : « Non, ce n’est pas ce que je dois faire en ce moment ». Cette manière de répliquer vient de la sagesse qui nous ramène vers notre préoccupation Distractions-03principale. Lorsque nous sommes capables de nous recentrer en nous-mêmes tous les problèmes typiques de la vie moderne vont progressivement disparaître. Pour ne pas tomber dans le piège de la distraction, nous devons changer notre attitude. Comment ? Par l’entraînement de notre esprit à la concentration, l’opposant à la distraction. Pour cela nous pouvons utiliser pour commencer la méditation sur la respiration. Ainsi, lorsque nous serons capables de maintenir notre attention sans interruption sur notre respiration durant une période de plus en plus longue, nous pourrons appliquer cet entraînement à tout autre objet que notre esprit perçoit.

 Compilé d’après des notes personnelles et un enseignement reçu au Centre Atisha de Lausanne donné par Tania Medina en 2013

L’attachement désirant, comment ça marche.

L’attachement désirant est une des principales perturbations mentales qui infeste notre esprit. Celle-ci s’insinue dans de nombreuses situations de la vie de tous les jours. Bien que son fonctionnement soit décrit ci-après, celui-ci peut être transposé en principe pour expliquer le fonctionnement de toutes les autres perturbations mentales. Dans cet article notre attention sera focalisée sur l’attachement désirant, que vous n’aurez pas de peine à reconnaître comme familier.

Attachement-01Par définition, l’attachement désirant est un esprit qui pense qu’un phénomène, un objet extérieur est pour nous une cause de bonheur et que le manque ou l’absence de ce phénomène ou de cet objet nous rend malheureux. Quelques situations courantes où l’attachement désirant se manifeste sont par exemple notre attachement désirant dans les cas d’accoutumance à l’alcool ou au chocolat, dans une relation avec un ou une partenaire pour ne citer que ces deux. De manière générale, en présence d’un objet d’attachement, nous perdons le contrôle de notre esprit du moment que nous sommes persuadés que notre bonheur dépend de lui, souvent à n’importe quel prix. Privés de notre objet d’attachement, il nous semble impossible d’être heureux. Et en particulier, pour l’alcool ou le chocolat, bien que nous nous savons dépendre de l’un ou de l’autre, persuadés que cela contribue à faire notre bonheur nous ne saurions nous en passer. Et dans une relation, tant que le ou la partenaire remplit nos attentes et nos désirs, tout se passe bien nous sommes Attachement-02heureux et dans le cas contraire c’est le début de la discorde et du conflit qui nous rend finalement triste et malheureux.

Parce que le bonheur ne dépend pas de causes et conditions extérieures mais est un état d’esprit, par conséquent sa cause doit obligatoirement venir de l’esprit. Ainsi, la vraie cause de notre attachement désirant provient d’un état d’esprit perturbé. Alors comment fonctionne cette perturbation mentale nommé attachement désirant? Ce fonctionnement peut être décrit en plusieurs étapes, comme par exemple dans le cas de l’attachement désirant à la réputation.

  • La nature de notre problème est que nous désirons de manière excessive que les autres pensent du bien de nous, que l’avis de l’autre compte beaucoup dans la manière de gérer notre vie. Dans notre mentalité actuelle, si les autres pensent du bien de nous-mêmes, nous avons confiance. Mais au contraire, lorsque les autres pensent du mal de nous, nous perdons notre confiance. À la manière d’une marionnette conduite par l’avis des autres, nous perdons le contrôle de notre esprit. Si nous basons notre confiance sur l’avis des autres, c’est une certitude que nous serons tantôt Attachement-03bien, tantôt mal. Mais en fait, ce que les autres pensent de nous n’est pas notre problème mais le leur. Notre problème est plutôt le sentiment que nous éprouvons en fonction de ce que les autres pensent de nous.
  • Les causes de notre problème d’attachement désirant. Si pour nous les choses de ce monde sont de la plus haute importance et sont les seules choses qui comptent dans notre vie, notre attachement désirant persistera quelles que soient les circonstances. Par contre si nous sommes un être spirituel pour qui les réalisations spirituelles sont prioritaires, nous avons de bonnes dispositions pour vaincre notre attachement désirant. Mais comment devient-on un être spirituel? C’est par le développement de qualités telles que la compassion, l’amour, l’appréciation de notre précieuse vie humaine, les moyens habiles pour aider les autres, une croyance dans la loi du karma et ainsi de suite. Par conséquent, nous devons développer une motivation sincère pour posséder toutes ces qualités qui s’opposent directement ou indirectement à l’existence de l’attachement désirant présent dans notre esprit.
  • Évidemment, il nous sera difficile de les obtenir sans aide. C’est pourquoi nous devons chercher l’aide des bouddhas et plus précisément celle de Dorjé Shugden. Ce bouddha protecteur gère notre karma et organise dans notre vie les conditions optimales pour notre libération du samsara puis de notre illumination. en lui faisant des requêtes appropriées qui béniront notre esprit pour activer le karma des opposants à l’attachement désirant qui nous affecte. Nous devons le faire avec une foi sincère du plus profond de notre cœur sans attentes particulières. comme Dorjé Shugden est notre protecteur, il sait exactement ce qui opportun pour nous dans une situation donnée. Nul doute que ce que nous recevrons correspondra à ce que nous avons le plus besoin en ce moment.
Rédigé d’après mes notes personnelles et une transcription du cours sur la confiance, donné par mon enseignant Kadam Ryan au Centre Atisha en 2004

Le développement des perturbations mentales

Dans son livre « La Voie Joyeuse », Ghéshé Kelsang Gyatso, en expliquant le développement des perturbations mentales, nous montre le fonctionnement du samsara. Le samsara, tel un processus, est une tâche qui fonctionne continuellement dans notre esprit dominé par les perturbations mentales. Et si nous comprenons le mécanisme exact par lequel le samsara se développe, nous pourrons facilement le démanteler. Comment? Sur la base d’un commentaire reçu de mon enseignant Kadam Ryan en 2005, les étapes de ce processus sont expliquées ci-après.

Par notre ignorance de saisie d’un soi qui nous convainc de l’existence intrinsèque des objets et des phénomènes, nous croyons que notre corps et notre esprit, la base d’imputation de notre JE existe vraiment de la manière dont nous les percevons. En effet, nous observons ce corps et cet esprit, la base d’imputation de notre JE, qui nous semblent exister de leur propre côté et nous les saisissons en donnant notre assentiment à cette apparence. En aucun moment nous avons l’impression que notre esprit a créé ce corps. Nous avons plutôt le sentiment que : « Mon corps est là, et mon esprit l’observe! ». Nous pouvons décrire ce corps, observer chacune de ses parties comme des objets observés par notre esprit. Cette assertion nous fait penser que la base d’imputation de notre JE existe de son propre côté et nous en déduisons que notre JE existe également de son propre côté. Si nous croyons que notre corps et notre esprit existent de leur propre côté, il est évident que notre JE existe de son propre côté aussi.

Perturbations-02Si notre JE existe de son propre côté, de la même manière tous les phénomènes différents de nous-mêmes, toutes les objets qui ne sont pas nous-mêmes doivent forcément exister de leur propre côté. Pourquoi? Parce que si nous existons de façon indépendante de tout le reste, alors tout le reste existe de la même manière, indépendamment de nous-mêmes. Du moment que nous-mêmes sommes séparés de tout, inversement tout est séparé de nous également. En conséquence, les autres existent de leur propre côté et nous-mêmes existons de notre propre côté. Comme les deux objets, nous et les autres existons de manière intrinsèque, leur différence existe de manière intrinsèque. Donc les autres sont forcément indépendants et séparés de nous-mêmes.

En dépendance de la conception ci-dessus, nous développons la préoccupation de soi. Rappelons que la préoccupation de soi, une perturbation mentale qui affirme que notre bonheur est suprêmement important. Ce qui est logique dans le sens que si nous existons d’une manière indépendante des autres, les autres existent de manière indépendante aussi. Pourquoi devrions-nous nous préoccuper des autres? Ce qui se passe chez eux n’a absolument rien à voir avec nous-mêmes et ne nous intéresse pas du tout. Parce que nous existons de notre propre côté, la seule chose nous prenons en considération est notre propre bonheur que nous pensons être bien plus important que celui de tous les autres qui nous laisse totalement indifférent. Sur la base de cette préoccupation de soi, nous développons l’attachement et l’aversion.

De ce point de vue, si tous les objets existent de manière intrinsèque, lorsque nous voyons un objet attirant en pensant qu’il existe de son propre côté, nous développons naturellement de l’attachement. Rappelons que l’attachement est un esprit qui croît que l’objet qui existe de son propre côté est une cause de bonheur et nous mettons tout en œuvre pour l’obtenir. Il en va de même pour l’aversion. Si l’objet qui existe de son propre côté est une cause de souffrance pour nous, nous voudrions l’éloigner voir même le détruire. Bouddha dit que l’ignorance, l’aversion et l’attachement sont à la base de toutes les actions contaminées. Une action est dite contaminée si elle est motivée par une perturbation mentale.

Perturbations-01De la motivation contaminée résulte une action contaminée. La conséquence de nous engager dans des actions contaminées produira sur notre esprit des graines karmiques qui constituent un karma négatif. Les potentialités karmiques de celles-ci vont donner lieu à quatre types d’effets.

  • L’effet mûri qui intervient qui intervient au moment où nous nous approprions de nos agrégats contaminés que nous concevons comme existant de leur propre côté.
  • L’effet environnemental qui est le fait de percevoir un environnement comme existant de son propre côté, comme si les objets apparaissent comme existants de leur propre côté.
  • L’effet qui est une expérience similaire à la cause qui est le fait de revivre une expérience contaminée.
  • L’effet qui est une tendance similaire à la cause qui est le fait d’avoir une tendance compulsive de toujours voir les objets dans une manière contaminée, donc existants de leur propre côté.

Ceci démontre que la racine de toutes les souffrances est notre ignorance de saisie d’un soi. Naturellement sous serons motivés pour éliminer cette cause majeure de notre malheur. Actuellement, nous sommes convaincus que ce sont les autres qui sont la cause de notre souffrance et pour cette raison, nous faisons énormément d’efforts pour les éliminer! Mais si nous comprenons que la cause originelle de notre souffrance est la saisie d’un soi, si nous voulons être libres de toute souffrance nous devons éliminer cette erreur conceptuelle de notre esprit.

Perturbations-03Si nous comprenons la vacuité de tout phénomène, lorsque nous voyons notre base d’imputation de notre JE, nous allons réaliser qu’elle n’existe pas de son propre côté. Si nous réalisons que notre base d’imputation n’existe pas de son propre côté, nous ne pouvons pas croire que notre JE existe de son propre côté. Et si nous réalisons la vacuité de notre JE, il n’y a aucune base valide pour l’existence de notre préoccupation de soi, parce que la préoccupation de soi chérit le JE qui existe de son propre côté. Si nous réalisons qu’un tel JE n’existe pas du tout, nous n’aurons pas un esprit qui chérit le bonheur de quelque chose qui n’existe pas. Si nous n’avons pas la préoccupation de soi ni la saisie d’un soi, ce sera pratiquement impossible pour nous de développer l’attachement ou l’aversion. Tout cela parce que les objets n’apparaissent pas comme existant de leur propre côté, parce que nous ne sommes pas séparés des autres choses. Et sans préoccupation de soi nous ne considérerons plus notre bonheur comme  d’une grande valeur, en n’essayant pas d’obtenir des objets d’attachement et de nous détourner des objets d’aversion. Sans toutes ces perturbations mentales, toutes nos actions seront forcément des actions pures, parce que notre motivation est libre de toute contamination par des perturbations mentales. Et si toutes nos actions sont pures, toutes les potentialités karmiques que nous créerons sur notre esprit seront également pures. Et quand celles-ci mûriront elles mûriront dans des apparences pures. Si les apparences de notre esprit sont pures ce sera facile pour nous de ne plus percevoir les choses d’une manière contaminée, parce qu’elles apparaissent pures à notre esprit.

 Rédigé d’après la transcription de l’enseignement de « La Voie Joyeuse » du PF de Kadam Ryan au Centre Atisha de Genève en 2005

Notre démarche spirituelle

Comme cette démarche est un cheminement intérieur, celui-ci est balisé par des observations importantes décrites ci-dessous qui nous ont été transmises en introduction au programme fondamental « Huit Etapes vers le Bonheur » au Centre Atisha de Genève en 2008. J’ai revisité l’enregistrement de cet enseignement que je voudrais partager avec mes lectrices et mes lecteurs.

Dem-spirit-01Première observation. Chaque être sans exception, même le plus petit insecte, possède le désir fondamental, un objectif commun, celui d’être libre de toute souffrance et d’être heureux tout le temps. Toutes nos actions et tout ce que nous faisons contribuent à l’accomplissement de ce but. Au premier abord, ce n’est pas forcément évident de comprendre à quel point cela est vrai pour tous les êtres. Il nous semble plutôt que notre motivation principale est par exemple d’avoir un bon travail ou de fonder une famille ou tout autre objectif personnel dans la vie ordinaire. Et tout ce que nous faisons qui va dans cette direction nous paraît être la vraie raison. Mais si nous nous posons la question : « Pourquoi mon travail est-il si important, pourquoi tel objectif personnel est si important », nous ne tarderons pas à formuler la réponse : « C’est parce que cela contribue indirectement à notre bonheur ». À l’origine de tout objectif de notre vie se trouve la motivation d’être heureux et libre de souffrance, de faire uniquement l’expérience du bonheur.

Deuxième observation. Depuis des temps sans commencement nous avons eu ce désir essentiel pour nous de faire l’expérience d’un bonheur permanent, sans la moindre souffrance. Hélas. À ce jour nous n’avons pas réussi à accomplir ce que nous cherchions. Oui, bien sûr par moment nous rencontrons de courtes périodes de bonheur exemptes de souffrance. Mais souvent aussi nous sommes fatigués, stressés; nous nous sentons épuisés par les difficultés et les problèmes. Nous sommes parfois très impatients lorsque nos désirs ne se réalisent pas immédiatement dans notre vie. Il arrive que nous sommes déçus par la tournure de notre vie et pensons : « Ce n’est pas ainsi que j’avais imaginé ma vie! ». Nous avons l’impression que les problèmes et les contrariétés se succèdent comme les vagues d’un océan. Toutes ces expériences ont quelque chose en commun, c’est leur impermanence. Nous croyons avoir trouvé le bonheur que déjà il nous échappe, nous avons soulagé une souffrance que déjà une autre se manifeste.

Dem-spirit-02Troisième observation. La raison pour laquelle nous n’avons pas trouvé le bonheur est que nous n’avons pas adopté la bonne stratégie pour le trouver. Jusqu’à ce jour, nous recherchons principalement le bonheur dans les conditions extérieures, la possession de biens matériels, un bon travail, de l’argent en suffisance, un statut social, des amis, une famille et ainsi de suite. Dans notre société, nous pensons que le bonheur dépend de ces choses extérieures. Il suffit de regarder les innombrables publicités en tous genres qui nous font miroiter le bonheur comme un bien de consommation. Nous rencontrons dans notre entourage des gens qui ne sont pas reconnus pour la simple raison qu’ils ne possèdent pas ce qui est jugé comme la normalité dans notre société. Nous souffrons de vouloir trouver le bonheur par l’assouvissement de nos désirs samsariques. Nous n’avons pas le contrôle de notre réputation, de notre situation. Nous sommes comme un cerf-volant qui est poussé dans la direction du vent dans tous les sens, les vents de notre karma.

Quatrième observation. Le bonheur est un état d’esprit. Le bonheur est un phénomène intérieur. C’est une impression intérieure, une quantité d’émotions et de sensibilité manifestée dans notre esprit. Et s’il s’agit d’un phénomène intérieur sa cause doit forcément être intérieure. Notre bonheur dépend de notre esprit. Toutes les conditions extérieures de leur côté sont neutres, elles sont ni bonnes ni mauvaises, mais dépendent de notre esprit. Si nous sommes heureux avec un certain environnement et malheureux avec un autre, cela dépend uniquement de notre état d’esprit. Les conditions extérieures existent en relation dépendante de notre esprit. Si nous adoptons un point de vue positif et constructif, même si les conditions extérieures sont exécrables, nous sommes heureux.
Au contraire, si nous avons un point de vue négatif dans un environnement parfait, nous resterons malheureux. Et au lieu de se poser la question « Qu’est-ce qui se passe dans le monde extérieur? », posons-nous la question « Qu’est-ce qui se passe dans mon esprit? ».

Dem-spirit-04Cinquième observation. Si le bonheur est quelque chose d’intérieur, quel est l’ingrédient-clé qui permet de nous approprier cette sensation de bonheur? Que devons-nous ajouter à nos états d’esprit pour obtenir ce résultat? Bouddha nous enseigne que ce qui nous manque est la paix intérieure. Si notre esprit est en paix, nous sommes heureux. Si notre esprit n’est pas en paix, même si les choses extérieures sont parfaites, nous ne sommes pas heureux. Malgré toutes les améliorations que nous propose le monde actuel, les conditions extérieures seules ne nous rendront jamais heureux. Si nous voulons atteindre notre but qui consiste à être heureux tout le temps, nous devons apprendre à maintenir notre esprit en paix en toute circonstance. Aussi longtemps que notre esprit est privé de cette paix intérieure, de changer les conditions extérieures n’apportera aucune solution viable. Rien ne sert de vouloir transformer le monde pour qu’il soit conforme à nos désirs arbitraires il suffit juste de changer notre état d’esprit pour avoir cette paix intérieure.

Sixième observation. Quelles sont donc les causes de notre paix intérieure? Nous connaissons tous les états d’esprit qui détruisent notre paix intérieure. Ceux-ci sont le fruit de nos perturbations mentales. La colère, la jalousie, l’attachement, l’aversion, le doute, l’ignorance sont autant de causes de l’absence de paix intérieure dans notre esprit. Ce qui fait croître notre paix intérieure sont les états d’esprit vertueux tels que l’amour, la compassion, le contentement, l’appréciation de notre précieuse vie humaine. Plus nous cultiverons ces qualités plus notre esprit sera en paix. Sans perdre de vue le but de notre vie spirituelle qui est d’obtenir un vrai bonheur, libre de toute souffrance, nous devons progressivement abandonner toutes nos perturbations mentales et les remplacer par des états d’esprit vertueux. Nous n’avons plus besoin d’être malheureux dans les situations extérieures parce que chacune d’entre-elles nous offrent l’opportunité de générer le bonheur en contrôlant notre esprit.

Compilé d’après un enseignement de Kadam Ryan lors de l’introduction au Programme fondamental donné en septembre 2008 au Centre Atisha de Genève.

Réflexions sur l’effort

L’effort dans le contexte spirituel diffère complètement de ce que nous entendons dans la vie quotidienne ordinaire. L’effort dans ce cas est associé à quelque chose de désagréable et pénible. Il suffit pour illustrer cette perception de citer des expressions courantes telles Effort-04que : « Je dois travailler dur », « Je dois faire quelque chose que je n’aime pas », « Je dois faire un effort pour y arriver » et ainsi de suite. La définition de l’effort selon le dharma est totalement autre. Ici l’effort est le fait d’entreprendre quelque chose de manière ludique, avec un esprit serein. En nous engageant avec un esprit vertueux, l’effort que nous faisons n’est plus pénible du moment que nous créons de bonnes causes pour le bien de celui-ci. Notre effort correspond dans ce cas au degré de plaisir obtenu en nous engageant dans des actions vertueuses. Franchement, est-ce qu’il y a quelque chose d’autre que nous préférerions faire que d’entraîner notre esprit? Honnêtement, nous connaissons la réponse, car toutes sortes de suggestions nous viennent à l’esprit.

Lorsque nous disposons de temps libre, nous trouvons sans difficulté une activité de loisir qui nous ferait plaisir, mais ce n’est pas toujours le cas pour notre pratique spirituelle. Or, nous devons savoir utiliser notre temps à bon escient et nous allons naturellement faire un effort s’il s’agit de créer des bonnes causes pour notre esprit. Dans ce cas, souvent nous avons tendance à minimiser l’importance de notre effort que nous jugeons bien faible. Cela n’a pas d’importance car celui-ci correspond à nos capacités au point où nous en sommes actuellement. Nous ne devons pas pour autant mésestimer nos efforts, si petits soient-ils mais plutôt accepter leurs résultats sans Effort-05jugement. En fait, nous avons tous en nous un certain désir de faire ce genre d’efforts, mais pour cela nous devons bannir la culpabilité et le sentiment d’obligation de notre esprit. Comme mon enseignant nous l’expliquait : « Mieux faire moins avec joie que davantage avec culpabilité ». En prenant cette attitude sur le long terme, notre motivation ne sera pas perturbée par la culpabilité et le sentiment d’obligation.

La voie de l’illumination est longue et demande de la persévérance et de la patience. Pour cette raison, il est stratégiquement plus avantageux pour nous de rester dans la joie quoi qu’il advienne. Notre principale difficulté est de croire que les choses plaisantes et agréables nous procurent joie et bonheur de manière intrinsèque. Par ignorance, nous sommes persuadés que le pouvoir de susciter le plaisir ou de l’aversion vient de l’objet. C’est pour cette raison par exemple qu’une activité, qui au début était agréable, devient ennuyeuse si nous la faisons telle une routine sans joie. Elle nous lassera au point de finalement l’abandonner. Pire encore est de faire cette même activité tout en pensant à autre chose qui nous paraît bien plus agréable. Ainsi nous sommes sous l’emprise de la culpabilité et intérieurement nous sommes en conflit parce que nous n’avons simplement pas envie de la faire. Une activité ne peut jamais être super-agréable tant que nous ne nous engageons pas totalement Loisirs-01dans celle-ci. En mettant le 100% de nous-mêmes dans tout ce que nous faisons, nous évitons de nous disperser avec un gaspillage d’énergie mentale et spirituelle.

Quelle que soit la situation que nous expérimentons, nous avons l’intérêt de la vivre intégralement et en conscience. Ainsi, lorsque nous sommes au travail, faisons le totalement; lorsque nous sommes dans une activité de loisir, vivons celle-ci pleinement sans retenue et avec joie. De même, lorsque nous faisons notre pratique spirituelle quotidienne nous nous laissons complètement absorber par elle sans distraction. C’est de cette façon que nous pouvons véritablement trouver la joie de le faire. La joie ne vient pas de ce que l’activité nous donne, mais de faire cette activité pleinement. Ainsi nous découvrirons les limites de notre capacité à le faire que nous pourrons repousser progressivement en faisant de mieux en mieux. Notre joie et notre satisfaction seront d’autant plus grandes qu’elles proviennent d’un sentiment d’avoir bien fait les choses. Tant qu’en faisant une activité, peu importe laquelle, nous pensons : « Bah, je devrais être en train de faire quelque chose d’autre en ce moment », nous ne trouverons pas le sentiment de cet effort joyeux.

Pourquoi pratiquons-nous le dharma? Est-ce que nous pratiquons le dharma parce que nous « devons »? pour éviter « d’être punis »? Non. Il n’y a qu’une seule raison de pratiquer le dharma, c’est parce que cela fonctionne pour nous et de progresser spirituellement. Dans tous les cas, cela fonctionne mieux de faire les choses d’après les enseignements du dharma que de faire les choses en suivant nos perturbations mentales. Lorsque nous arrivons à la frontière de nos capacités, et que nous essayons de faire mieux, de faire mieux ce que nous sommes en train de faire, nous allons réaliser que nous pouvons faire mieux ce que nous sommes en train de faire en le faisant avec moins de perturbations mentales. Notre objectif est de faire les choses bien, sans attachement au résultat et en mettant toute notre attention dans ce que nous sommes en train de faire. Nous pouvons faire mieux tout ce que nous entreprenons du moment que nous avons un esprit en paix, libre de toute perturbation mentale. Nous pouvons être très performants si nous savons rester décontractés, sans se crisper sur le résultat attendu. Nous pouvons extraire plus de plaisir d’une activité, du moment que nous le faisons dans l’esprit du dharma pour être heureux.

Compilé à partir d’une transcription de l’enseignement du PF « La voie Joyeuse » donné au Centre Atisha à Genève par Kadam Ryan

Méditation : La prise et le don

Dans ce monde de plus en plus dégénéré, tous les jours nous sommes confrontés à la souffrance et parfois à la détresse de ceux qui nous entourent. À ce moment-là, nous voudrions tellement leur venir en aide, mais comment? Puisque nous n’avons les moyens habiles des bouddhas pour leur apporter concrètement une aide, nous pouvons le faire tout de même de manière plus subtile. Nous avons tous en nous une partie de notre esprit qui est déjà illuminée, notre graine de bouddha. Et puisque tout est création de l’esprit, nous pouvons bien imaginer utiliser cette partie-là de notre esprit pour agir. La difficulté majeure qui nous empêche de le faire est notre ignorance, notre préoccupation de soi et notre ignorance de saisie d’un soi. En effet, nous nous croyons tellement important et précieux que nous accordons que peu d’importance aux autres. Alors que les bouddhas accordent considèrent tous les êtres vivants comme importants, sans discrimination.

Nous pouvons venir en aide à quelqu’un en pratiquant « la Prise et le Don », une méditation très courante dans les milieux bouddhiste. En éprouvant une grande compassion pour la [personne lambda] à qui nous voulons apporter notre aide, nous laissons notre cœur s’ouvrir d’avantage pour accueillir avec empathie la souffrance et la détresse de celle-ci. Nous voulons lui offrir plus d’espace pour se libérer de ses problèmes. Pour ce faire, nous imaginons à la place de [personne lambda] la ou les personnes à qui nous voulons apporter un peu de réconfort et de soulagement, tout en suivant les suggestions décrites dans les lignes ci-dessous sous forme d’une méditation guidée.

 Guide pratique : À chaque fois que vous entendez un bip sonore aux endroits marqués par [personne lambda] en pensée vous remplacez ce signal par le prénom de la personne pour laquelle vous faites cette méditation.

  • Je génère un sentiment de compassion et de pur amour, libre de toute préoccupation de soi.
  • Ce sentiment grandit maintenant en moi au point d’ouvrir mon cœur et de laisser s’exprimer ma bodhitchitta.
  • J’aspire à demeurer ouvert à toute situation, à toute difficulté sans me refermer.
  • Puis je me concentre sur [personne lambda] que j’imagine dans l’espace devant moi.
  • Avec toute mon empathie, je perçois ce que ressent [personne lambda].
  • Comme dans mon esprit [personne lambda] n’est pas séparé de moi, par l’échange de soi-même avec l’autre,
  • Je peux me mettre à sa place pour mieux ressentir sa douleur, sa souffrance.
  • Et je m’ouvre autant qu’il est nécessaire pour accueillir tout ce qui se présente.
  • Je pourrais lire sur le visage de [personne lambda] sa détresse d’être ainsi victime de ses perturbations mentales.
  • Et je pense : « [personne lambda] éprouve en ce moment une souffrance indescriptible dans sa vie.
  • Celle-ci continuera à la faire souffrir aussi longtemps qu’il ou elle n’en sera pas libéré(e) ».
  • En développant cet amour désirant qui grandit en moi en ce moment, je pense :
  • « Comme ce serait merveilleux si [personne lambda] pouvait être définitivement libéré(e) dès maintenant ».
  • « Puisse-t-elle y parvenir ».
  • « Je vais moi-même contribuer à ce cela s’accomplisse. Je dois le faire maintenant ».
  • Ce qui a de l’importance en ce moment est la souffrance de [personne lambda], lui ou elle seul(e) compte pour moi. Rien n’est plus important.
  • Sans distraction, en me concentrant sur [personne lambda], je procède de la manière suivante :
  • J’imagine que toute sa souffrance, son inconfort, tout ce que vit [personne lambda] en ce moment se rassemble sous l’aspect d’une fumée noire.
  • Je prends cette fumée en moi au niveau de mon cœur et la laisse se dissoudre dans mon ignorance, ma préoccupation de soi et ma saisie d’un soi.
  • À chaque inspir, je visualise cette fumée noire entrer en moi et se dissoudre au niveau de mon cœur.
  • Au moment d’inspirer, je reçois la souffrance dont [personne lambda] fait l’expérience.
  • Et à chaque expir, je visualise une vague d’amour et de compassion remplir le cœur de [personne lambda].
  • Tout ce qui pourrait lui faire du bien en ce moment.
  • Je fais ceci durant de longues minutes en échangeant son mal-être par une paix intérieure venant de l’amour et de la compassion que je lui adresse.
  • [Pause 2 min avec gong]
  • Au fur et à mesure que j’inspire sa souffrance et que j’expire une force d’amour et de compassion, je peux lire un soulagement sur son visage.
  • [Pause 5 min avec gong]
  • Je développe ensuite la profonde conviction de [personne lambda] est définitivement libéré(e) de toute souffrance.
  • Au fond, ce que je souhaite c’est de lui offrir suffisamment d’espace dans son cœur pour se détendre
  • Pour qu’un soudain changement d’attitude puisse l’aider à laisser tomber son fardeau de souffrance et de douleur.
  • Avec une grande foi, j’assiste à la transformation progressive de [personne lambda].
  • En résultat, [personne lambda] est maintenant resplendissant(e) de lumière, le regard souriant en ayant retrouvé tout son bien-être.

Identifier, réduire et détruire

Pour progressivement venir à bout de nos perturbations mentales, nous devons adopter une stratégie efficace sans quoi nous n’aurons que de piètres résultats. En effet, qui n’a pas, malgré tant d’efforts, été confronté à la répétition de mêmes situations, de mêmes désagréments et de souffrances. Alors dans de tels cas, nous avons tendance à nous décourager, à baisser les bras. Et nous pensons : « Pourtant, ce n’est pas faute d’avoir essayé, mais je suis à nouveau dans les problèmes et les difficultés »; ou bien encore par exemple : « Décidément, c’est manque de chance, me voilà encore dans la même situation que la semaine passée! ». C’est notre ignorance qui nous fait réagir de cette façon, car elle tend à nous faire croire que ce sont les circonstances extérieures qui sont responsables de nos infortunes. Bouddha nous enseigne que tous ces phénomènes, toutes ces circonstances sont semblables à un rêve et n’ont pas d’existence intrinsèque. Ce ne sont que des illusions, une pure création de notre esprit. Ce qui nous arrive n’est pas dû au hasard ou à quelque chose venant d’ailleurs que de notre esprit. Cette stratégie consiste à entraîner notre esprit en appliquant successivement trois consignes qui sont : identifier, réduire et détruire.

Identifier-01Identifier. Depuis des temps sans commencement, nous répétons distraitement les mêmes fautes au point d’en être devenu familier. Et ce n’est qu’a posteriori, en éprouvant les conséquences, que nous émettons notre désapprobation aux résultats vécus. Le plus souvent, nous cherchons de préférence un coupable, une circonstance qui justifie notre inconfort et notre souffrance. Nous pensons vraiment que les gens sont méchants autour nous, que le système dans lequel nous vivons est dégénéré, que la société est incompréhensible et ainsi de suite. Et nous pensons peut-être : « C’est toujours sur moi que cela tombe et c’est de SA faute, j’en ai marre! » ou encore : « Ah! Si seulement IL pouvait changer, je me sentirais sûrement mieux! » Pour éviter ce scénario catastrophe, nous devons impérativement identifier nos propres perturbations mentales. Envahis par l’ennemi, nous devons le débusquer pour le vaincre. Pour trouver ce qui nous fait souffrir, nous devons savoir quoi chercher. C’est alors le début d’un possible changement.

Reduire-01Réduire. Nous pouvons commencer à changer notre manière habituelle de réagir. Et au lieu de nous décourager et de déprimer en voyant ce qui se trouve de problématique sur notre esprit, nous pouvons nous encourager à faire ce changement. Ainsi, au lieu d’attribuer la responsabilité de ce qui nous arrive à quelque chose externe à notre esprit, nous pouvons porter notre attention à ce que cette chose, cet événement nous dévoile. Nous pouvons alors par exemple nous poser la question : « Qu’est-ce que cette chose, cet événement essaie de me dire ou de me faire comprendre? » ou encore : « En quoi cette expérience m’est utile pour comprendre mon erreur? » ou bien : « Te voilà encore, chère préoccupation de soi! Cette fois-ci je te tiens et je ne te donne pas mon assentiment! ». La réduction de nos perturbations mentales est un travail de longue haleine qui n’est pas toujours facile. Parfois le danger est de rester trop superficiel et de se contenter de peu. Plus nous progressons sur la voie spirituelle, plus nous découvrons ce qui se trouve dans notre esprit et que nous devons éliminer.
Detruire-01
Détruire. Nos mauvaises habitudes sont semblables à de mauvaises herbes dans le jardin. Il ne suffit pas de les arracher en surface pour les éliminer. Il faut aller en profondeur chercher la racine de celles-ci pour les éliminer définitivement. Il ne suffit pas de gagner quelques batailles contre nos perturbations mentales, nous devons finalement gagner la guerre. Ainsi notre capacité à contrôler notre esprit devient de plus en plus grande et nous sommes capables d’affronter des choses difficiles et de faire face à de sérieuses perturbations mentales. Pour cela, nous avons besoins d’une certaine force intérieure pour regarder nos perturbations mentales en face et pouvoir les détruire et les éradiquer définitivement de notre esprit. Tant que nous ne travaillons pas en profondeur à Detruire-02cette tâche, les problèmes samsariques perdurent. Si nous voulons vraiment nous guérir complètement notre esprit, nous devons aller voir ce qui s’y trouve et ôter tout ce qui nous est néfaste. Heureusement pour nous, notre guide spirituel nous accompagne dans nos batailles et nous ne devons pas hésiter à lui demander son assistance. Pour cela, nous lui faisons des requêtes, comme par exemple : « S’il te plaît, révèle-le moi la signification de cette expérience afin de la surmonter »; ou encore « S’il te plaît, accorde-moi la sagesse de comprendre ce qui m’arrive en ce moment pour en détruire toutes les causes potentielles similaires sur mon esprit ».

En conclusion. Au lieu de nous enliser dans les injonctions de notre préoccupation de soi et de notre ignorance, nous serons bien inspirés de transformer les circonstances adverses de nos expériences. Comme le disait mon enseignante Kelsang Jikgyob, nous pouvons voir « la personne qui appuie sur le bouton » non pas comme une provocation mais comme quelqu’un qui nous aide « à voir le bouton ». Ce qui nous arrive de malheureux ne l’est pas de manière intrinsèque et donc nous pouvons le percevoir comme une leçon pour nous inciter à changer. Identifier, réduire et détruire telle est notre feuille de route pour nous libérer de la souffrance.