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Réflexions sur la motivation

Dans deux semaines, nous allons prendre de bonnes résolutions pour toute l’année à venir. Mais au fait que reste-t-il celles que nous avons prises au début de cette année? Nombreuses sont celles que nous n’avons pas accomplies ou que nous avons oublié d’appliquer dans notre vie. Pourquoi? Parce que peut-être nous avons surestimé notre capacité à les tenir et nous nous sommes découragés. Ou bien peut-être parce que nous en avons-nous pris beaucoup trop et forcément nous ne sommes pas arrivés à toutes les accomplir. Ou bien encore parce que au fil du temps nous avons pensé que cela en valait pas la peine. Tous ces arguments ont pour origine notre esprit, et plus précisément notre état d’esprit au moment de la décision. D’après le dictionnaire, la motivation est un processus qui détermine Motivation-02notre engagement dans une action. Par manque de motivation, ceci explique en partie pourquoi nous avons réussi à faire telle chose et pas telle autre et d’autres de façon incomplète.

Du point de vue spirituel, l’orientation de notre motivation détermine l’orientation du karma que nous allons créer. De même que les expériences actuelles de notre vie découlent du karma que nous avons créé par le passé, conditionnées par notre motivation d’alors. Ainsi, si nous manquons de motivation aujourd’hui c’est parce que nous faisons l’expérience de tendances similaires que nous avons eu auparavant. L’esprit est le créateur, le metteur en scène de tous les actes de notre vie. C’est pour cette raison que lorsque nous regardons le monde, nous examinons le reflet, le miroir de notre propre esprit. De la même manière tous nous regardons le monde, mais celui-ci apparaît à chacun différemment selon la réflexion qui dépend du karma propre à chacun. Dans ce sens, nous regardons tous la même chose, mais juste à partir de points de vue différents. Si nous voulons changer, nous devons revoir la pertinence de notre motivation.

Le miroir de chacun est le  reflet de son propre samsara. Lorsque nous examinons le miroir de notre esprit, celui-ci reflète un monde donné. À un autre moment, le même miroir reflète une autre situation, un autre monde. L’orientation de ce miroir dépendra essentiellement de notre esprit et de la motivation avec laquelle nous sommes capables d’engendrer à ce moment précis. En d’autres termes le positionnement de notre miroir dépendra de notre motivation. Lorsque Bouddha nous dit que la nature du samsara est la souffrance, nous ne devons pas être surpris que tant de problèmes et de souffrances fassent partie intégrante de notre vie ordinaire. Dans son livre « La Voie joyeuse » Ghéshé Kelsang écrit, je cite :  » Pour les êtres samsariques, chaque expérience de bonheur ou de jouissance qui provient des plaisirs du samsara est souffrance changeante. Ces expériences sont contaminées et sont dans la nature de la souffrance ».

Regardons plus précisément l’analogie du miroir. Ce qui remplit la fonction de miroir est la couche métallique déposée sur une face d’une plaque de verre. Quelle que soit son orientation nous pouvons observer dans celui-ci une image. Celle-ci est la projection du monde créé par notre esprit, notre samsara. Tout comme la couche métallique permet l’observation du monde qui nous entoure, les perturbations mentales de notre esprit permettent l’observation de notre samsara. De cette manière, en aucun moment le monde pur dissimulé derrière le miroir nous est accessible. Si maintenant nous supprimons la couche métallique, le miroir perd sa fonction et redevient une simple plaque de verre à travers laquelle une vision est possible. Par analogie, si nous purifions notre esprit de toutes nos perturbations mentales notre esprit devient pur et nous observons un pays pur. Et je reprends une citation de Vénérable Ghéshé-la : « Lorsque l’esprit est pur, tout est pur ».

Motivation-01Pour revenir à la motivation, nous comprenons que si nous pratiquons par exemple une discipline morale avec motivation mondaine, les résultats que nous obtiendrons seront de nature mondaine, car le karma qui mûrit lui aussi sera de cette nature. Et si nous obtiendrons à l’avenir une richesse, celle-ci sera dans un contexte mondain et limité. Au mieux, les effets de cette discipline se manifesteront dans notre seule vie actuelle. Mais si le facteur mental qui « booste » notre motivation nous laisse entrevoir la possibilité d’avoir un effet sur nos vies futures alors nous pouvons voir toutes nos actions, si petites et insignifiantes soient-elles, comme un investissement pour l’accomplissement de notre libération du samsara, puis de notre illumination.

Autrement dit, nous somme confinés dans un espace clos, notre samsara, dans lequel les fenêtres sont des miroirs tournés vers l’intérieur. Ces derniers nous empêchent d’être visuellement en contact avec les pays purs qui sont à l’extérieur de notre prison. En purifiant notre esprit de ses perturbations mentales, causes de notre souffrance, nous verrons à  travers les fenêtres dépourvues de miroirs et le samsara disparaîtra pour nous à tout jamais.

Rédigé d’après mes notes personnelles du Cours fondamental donné à Genève en 2005et à partir d’une révision de celles-ci.

Développer l’esprit de compassion

L’esprit de compassion est un esprit complètement pur qui ressent naturellement une sensibilité particulière à l’égard de tous les êtres vivants qui souffrent dans le samsara. Cet esprit est la base même de notre développement spirituel. C’est une précieuse qualité que partagent tous les êtres sensibles et qui rend notre vie humaine pleine de sens. L’esprit de compassion est une véritable source de vie. Chacun de nous possède au fond de lui cet esprit. Nos pensées, nos paroles et nos actions si elles sont inspirées par la compassion donnent une intense et bienfaisante dimension à tout ce que nous entreprenons. Elle est bien plus que de la sympathie pour autrui car elle repose sur une sagesse qui vient de notre cœur. Il ne s’agit pas d’avoir simplement une pensée bienveillante, c’est venir en aide aux autres avec discernement . À notre époque beaucoup de personnes se méprennent sur le sens de l’esprit de compassion et le réduise à la permissivité et à l’indulgence envers les autres. Elle est souvent un simple réflexe intellectuel qui nous évite de nous sentir responsable des situations que nous pouvons rencontrer.

Compassion-02En développant cet esprit de compassion, nous avons un souci désintéressé du bonheur des autres et nous voulons tout faire pour les libérer de leur souffrance. C’est en fait un altruisme qui fait partie de notre chemin spirituel. Par analogie nous sommes avec les autres pris par la tempête dans un océan avec ses vagues menaçantes, semblable au samsara avec toutes ses souffrances, sans un moment de répit. Rencontrer le dharma est semblable à croiser un bateau sur lequel nous pouvons monter et qui nous amène vers la terre ferme. Irons-nous seul sur ce bateau, en laissant tous les autres se noyer? Jusqu’à quel point pourrons-nous être heureux en faisant cela, en atteignant la terre ferme tout en sachant que les autres sont en train de se noyer? L’esprit de compassion consiste justement à aider les autres à monter également sur ce bateau et se libérer enfin.

Compassion-04Développer un esprit de compassion ne requiert pas un contexte particulier. Sans méditer forcément sur les souffrances terribles des êtres des règnes inférieurs, nous sommes plus à même de le développer pour les êtres qui nous sont proches dans notre vie quotidienne. Toute situation de notre vie courante peut convenir à cet entraînement. Voici une situation anodine qui me sert à pratiquer celui-ci. Me souvenant d’une séquence vidéo de l’inauguration du KMC-France, j’avais remarqué l’attitude de Vénérable Guéshé-la qui récitait le mantra OM MANI PAME HOUM à l’intention des poules et des oies de la basse-cour du château et me souvenant d’un enseignement reçu qui dit que : « Où nous pensons qu’un bouddha va, un bouddha va réellement. Et que fait un bouddha à l’endroit où il se trouve, il accorde ses bénédictions ». Puisque les animaux possèdent également un esprit, cet esprit est susceptible de recevoir les bénédictions d’un bouddha, quand bien même cet esprit est emprisonné dans les agrégats d’un animal. Et de cette réflexion j’en ai fait une pratique. Ainsi, lorsque je fais un nordic-walking dans la campagne près de chez moi, si je passe à proximité d’un troupeau de vaches par exemple, en posant mon regard sur chacune d’entre-elles, j’imagine qu’un bouddha va dans chaque esprit. Et en récitant le mantra à leur intention je ressens une grande compassion pour ces animaux.

Compassion-03 Certains personnages ont démontré qu’ils étaient capables de relever d’importants défis. Cela nous prouve à quel point, dotés d’une forte motivation, nous sommes capables d’aller bien au-delà de ce que nous pensions être capables de faire. Comme l’illustre si bien la citation de M. Twain, je cite « C’est parce qu’ils ne savaient pas que c’était impossible, ils l’ont fait ». La compassion va nous amener à développer cette formidable énergie qui nous amène à atteindre le but final afin d’aider les autres. De manière objective le bonheur de tous les êtres vivants est en comparaison avec le bonheur d’une seule personne bien plus important. Pour illustrer cette situation, prenons une balance à fléau imaginons un être vivant sur un plateau et tous les autres sur l’autre, quel est le côté le plus lourd? Ainsi, lorsque nous appartenons à « Tous les autres », il est aisé de dire que bien sûr le bonheur de tous les autres est le plus important, mais lorsque nous sommes dans la catégorie « un être vivant », il nous est plus pénible d’admettre que le bonheur de tous les autres est le plus important. Bien qu’intellectuellement nous admettions cela, il est plus difficile de le mettre dans notre cœur. C’est pourquoi, nous devons méditer encore et encore  pour faire grandir notre compréhension. Alors, la voie du bodhisattva, la voie de la compassion, la voie qui nous conduit à la pleine illumination s’ouvre dans notre esprit.

 Inspiré des enseignements du Programme fondamental « La voie Joyeuse » et du Programme d’Étude « Un Bouddhisme moderne » reçus au Centre Atisha à Genève

De bonnes raisons de chercher refuge

Rappelons-nous que notre mort est une certitude et le moment de notre mort totalement imprévisible. Sachant que notre état d’esprit à ce moment-là déterminera notre prochaine renaissance, notre pratique du dharma pourra nous aider au moment de la mort et après la mort. Nous avons tous une compréhension de ce problème pour lequel nous pouvons rechercher une solution. Mais tant que nous Refuge-Pr-01n’avons pas intériorisé celui-ci, étudier une solution restera sans résultat. Pas plus que d’accepter le problème sans savoir canaliser notre compréhension dans la bonne direction restera sans effet. Et cette bonne direction est celle que notre guide spirituel nous invite à prendre. Un passage de « L’offrande au guide spirituel » pose bien le décor de notre condition samsarique, je cite :

« Ballotté violemment par les vagues des perturbations mentales et du karma,
Et tourmenté par les monstres marins des trois souffrances,
Je cherche tes bénédictions afin de développer un puissant désir de libération
Du grand océan du samsara, effrayant et sans limites ».

Généralement nous rencontrons deux sortes de gens, ceux qui sont dans le déni total de leur situation samsarique et ceux qui acceptent leurs problèmes tout en étant complètement paniqués. Dans ce contexte, la mort et les dangers d’une renaissance dans les règnes inférieurs nous placent devant cette évidence. Dans les propos de mon enseignant, il nous a donné sa conclusion très intéressante : « Je vais cesser de me plaindre à mon guide spirituel de la taille et de la nature de mes problèmes mais je vais dorénavant démontrer à mes problèmes la taille et la force de mon guide spirituel« . Nous sommes continuellement en train de nous apitoyer sur notre sort dans le samsara. Nous serions bien inspirés de rechercher une solution fiable pour y remédier. La solution sera de prendre refuge en notre guide spirituel, la synthèse de tous les bouddhas, pour recevoir sa protection. Tout comme nous recherchons la protection et les bons conseils du médecin lorsque nous sommes malades ou que nous faisons appel à la police lorsque nous sommes en grand danger, nous pouvons faire appel aux bouddhas en cherchant refuge.

A l’échelle de notre continuum mental, alors que cette vie-ci nous paraît parfois interminable, elle ne dure qu’un instant. Dans cette perspective, cela nous donne une idée de la longueur de notre précieuse vie actuelle. Puisqu’elle nous permet de nous libérer du samsara, sachons aussi que cette opportunité est extrêmement courte. C’est la raison pour laquelle il serait ridicule et regrettable de la gaspiller dans des activités dénuées de sens. En fait, nous avons tellement « travaillé » dans nos vies passées pour obtenir cette précieuse vie que nous avons maintenant une opportunité fantastique de réaliser que nos vies futures sont bien plus importantes que cette vie-ci. Grâce à notre pratique de la discipline morale dans le passé nous jouissons d’une précieuse vie humaine. Dans ce sens, rompre notre discipline morale est bien plus dangereux que la mort, parce que si nous perdons notre discipline morale nous créerons les causes d’une renaissance dans les règnes inférieurs. Et une fois dans les règnes inférieurs, nous nous engagerons uniquement dans des actions négatives dont les effets seront des tendances à tomber encore et encore.

Refuge-Pr-02Ainsi, nous avons deux feuilles de route possible. Celle qui nous dirige vers un bonheur durable et sans souffrance en cherchant l’aide et les bénédictions du guide spirituel ou celle que suggèrent nos perturbations mentales. Or les conseils et suggestions de nos perturbations mentales sont trompeuses et nous serions bien inspirés de les abandonner. A cause d’elles nous sommes piégés dans l’océan du samsara, effrayant et sans limites pris en otage par les trois monstres que sont l’attachement, la colère et l’ignorance. En choisissant la feuille de route conseillée par notre guide spirituel, nous rechercherons ses bénédictions et son aide en cherchant refuge en lui. A ce stade, nous devons avoir l’humilité de reconnaître que nous n’avons pas la capacité de nous tirer d’affaire tout seul, raison pour laquelle nous cherchons refuge. Si nous sommes pris sous un violent orage, il ne suffit peut-être pas de simplement ouvrir son parapluie, nous devons en plus nous mettre à l’abri. C’est pourquoi nous cherchons refuge en Bouddha, le dharma et la sangha.

Spirituellement, nous sommes confrontés à quatre types de problèmes qui doivent nous inciter à chercher refuge.

  • Les problèmes mondains. Les objets et les phénomènes externes à notre esprit dans notre vie sont un véritable problème pour nous.
  • Le risque de tomber dans les règnes inférieurs. Notre capital de karma négatif est si important que le risque que celui-ci mûrisse au moment de notre mort fait que nous renaîtrons probablement dans les règnes des animaux, des esprits affamés ou des êtres de l’enfer.
  • Le risque de prendre des renaissances incontrôlées. Comme nous avons un esprit incontrôlé, veut dire que nous n’aurons pas non plus le contrôle durant le processus de la mort. A cause de cela, nous allons prendre des renaissances incontrôlées dans des agrégats samsariques.
  • Les autres prendront des renaissances incontrôlées. Les autres êtres prennent ou prendront des renaissances incontrôlées dans des agrégats contaminés sans que nous puissions faire quoi que ce soit pour eux à cause de nos limitations actuelles. C’est par analogie comme une mère qui voit ses enfants se noyer mais qui ne peut les sauver car elle-même ne sait pas nager.

Refuge-Pr-03Si nous n’intégrons pas le fait que nous avons tous personnellement les problèmes spirituels ci-dessus, nous ne serons pas forcément motivés de chercher refuge et notre pratique restera intellectuelle. En prenant conscience que ces problèmes sont en nous, alors nous trouverons la motivation réelle de chercher refuge. Nous devons connecter le dharma à nos problèmes dans notre esprit. Notre tâche principale et incessante est d’accepter et d’identifier ceux-ci. « Oui j’ai ce problème spirituel! » et à partir de ce moment-là nous sommes prêts à chercher refuge en Bouddha, le dharma et la sangha.

 Compilé d’après ma transcription et mes notes du programme fondamental « La Voie joyeuse » donné par Kadam Ryan au Centre Atisha de Genève en 2004.

Que peut nous apprendre une faute.

Souvent dans nos relations avec les autres, nous passons une grande partie de notre temps à identifier et contempler leurs fautes. D’après les écrits bouddhistes les êtres samsariques tels que les humains vivent actuellement dans le règne du désir, (Nous vivons dans le règne du désir). Cet état nous conduit à développer un « esprit de compétition » les uns avec les autres. Nous sommes inconsciemment sans cesse à contrôler les états et les agissements des autres afin de savoir s’ils sont mieux ou moins bien que nous. Nous pouvons vérifier facilement cela en considérant les personnes qui nous sont proches dans notre vie. Nous constatons alors que la plupart de nos pensées les concernant focalisent notre attention sur leurs erreurs et leurs perturbations mentales. Comme si le fait de reconnaître les fautes chez les autres nous permettait de confirmer que nous ne les avons pas. Dans certaines situations nous le faisons jusqu’au point de ne voir que leurs fautes. À cause de notre attention inappropriée sur celles-ci, nous générons beaucoup de perturbations mentales et d’agitation dans nos relations avec les autres. En résultat cela détruit l’harmonie dans nos relations ainsi que notre propre bonheur. Notre attention inappropriée sur les fautes des autres détruit la paix intérieure dans notre propre esprit et casse l’harmonie avec nos proches.

Appr-Faute-01Dans les conseils qui viennent du cœur d’Atisha, il est dit : « Ne cherchez pas à voir les défauts des autres, mais recherchez les vôtres et purgez-vous comme si c’était du sang mauvais. Ne contemplez pas vos propres qualités, mais contemplez celles des autres et respectez chacun comme le ferait un serviteur ».  Alors, nous avons le choix suivant : soit nous conservons notre propre point de vue ordinaire et continuons à voir les fautes des autres, soit nous adoptons le point de vue d’un Bouddha qui voit le potentiel pur dissimulé derrière celles-ci. Ce choix nous appartient. Mais si nous voulons jouir d’une paix et d’un bonheur réel, il serait sage d’adopter le second choix. En contemplant les désavantages de notre vue ordinaire et le conseil ci-dessus, nous allons générer en notre esprit l’intention de choisir personnellement d’abandonner nos propres défauts et de nous réjouir dans les qualités des autres.

Appr-Faute-02Comme nous avons une propension à débusquer les fautes chez les autres, nous pouvons facilement comprendre que les autres font de même avec nous. Tout comme nous cherchons à voir les fautes chez les autres, ceux-ci cherchent à voir nos propres fautes. De ce fait, nous sentant à découvert, nous allons chercher à nier nos propres fautes tout en exaltant celles des autres, en pensant : « Moi je ne suis pas comme telle ou telle personne, je n’ai pas ceci ou cela ». Par la même occasion, puisque nous portons essentiellement notre attention sur les fautes, que ce soit celles des autres ou nos propres fautes, nous oublions complètement que les autres et nous- mêmes avons également des qualités. Mais attention, il est très facile d’aller d’un extrême à l’autre en pensant que les autres n’ont que des défauts ou que nous n’avons que des qualités. Et si nous avons la patience d’approfondir notre compréhension des enseignements de Bouddha, le dharma, celle-ci nous amènera naturellement à mettre en place une stratégie vertueuse en toute circonstance. Cette stratégie se résume à faire la distinction entre les apparences ordinaires d’une faute et les conceptions ordinaires de cette même faute. Lorsqu’une faute nous apparaît, que ce soit celle des autres ou notre propre faute, notre esprit impur la perçoit comme une apparence fausse, parce que les objets ne nous apparaissent pas comme ils sont véritablement. Et sur la base de cette apparence ordinaire, notre esprit ordinaire, à cause de nos perturbations mentales, conçoit cette faute comme existante de manière intrinsèque. Aussi longtemps que nous sommes dans le samsara, nous voyons de cette façon les apparences d’une faute également chez les autres et chez nous-mêmes.

Appr-Faute-03Si nous observons les qualités de nous-mêmes et des autres de la même manière que nous observons les fautes, nous considérons ces qualités comme des apparences ordinaires que notre esprit conçoit de manière fausse également. En réalité, toutes les qualités, les nôtres et celles des autres sont dans la claire lumière de l’esprit. Toutes les qualités sont dans le Vrai Soi, le potentiel pur de l’esprit, la claire lumière du dharmakaya. Tandis que le Soi ordinaire, l’apparence ordinaire de nous- mêmes ou des autres est semblable à une prison qui obscurcit et empêche l’esprit du Vrai Soi de se manifester. Dans une certaine mesure nos qualités sont confondues avec notre potentiel pur, lui-même enfermé dans une sorte de pellicule plus ou moins opaque constituée des perturbations mentales. Selon l’épaisseur de cette pellicule notre potentiel pur et nos qualités sont peu ou pas perceptibles.

Si nous ne pouvons changer les apparences ordinaires de se manifester, nous pouvons changer les conceptions ordinaires que nous générons en tant que réponse à la manifestation de l’apparence d’une faute. Nous devons développer une relation bénéfique, saine et constructive avec les apparences des fautes. Notre interaction avec celles-ci doit nous procurer un bienfait et nous permettre d’avancer sur notre voie spirituelle. Par exemple, si nous observons une faute chez une personne, cette situation nous enseigne ce que nous ne devrions pas faire. Dans ce cas, il y a une apparence  d’une faute mais également une réaction positive, bénéfique et saine, en conséquence de quoi il n’y a aucun problème à fonctionner de cette manière. Par contre si nous observons une faute chez l’autre et que notre réaction est le jugement, la jalousie ou toute autre perturbation mentale notre esprit est dysfonctionnel. Ainsi l’objet à abandonner n’est pas l’apparence d’une faute, mais la perturbation mentale à l’origine de notre conception ordinaire de la faute observée. Ceci vaut également pour nos propres fautes.

 Rédigé d’après mes notes et une transcription d’une enseignement sur « Huit Etapes vers le Bonheur » du programme fondamental donné par Kadam Ryan en 2009 au Centre Atisha de Genève.

Echange de soi avec les autres

Echange-01Lorsque je vois les personnes autour de moi, je peux décrire chacune d’elles de manière précise. Lorsque je me regarde dans le même environnement, je peux me décrire également et voir mon corps se déplacer parmi les autres autour de moi. Dans les deux cas ce ne sont que des projections de mon esprit, une partie de mon esprit qui impute le nom « Autres » aux personnes autour de moi et une autre partie de mon esprit qui impute le nom « Moi » à moi-même parmi les autres. En comprenant la vacuité des phénomènes, nous sommes capables de différentier l’imputation elle-même de sa base d’imputation. Nous réalisons que ni l’imputation « Moi » ni l’imputation « Autres » n’ont d’existence intrinsèque, ce sont de simples désignations attribuées à des bases d’imputation. Du moment où celles-ci sont valides, nous pouvons utiliser différentes désignations pour différentes bases.

Il peut nous sembler que c’est impossible pour nous-mêmes de changer de base d’imputation. Pourtant, en quelque sorte, nous changeons constamment de base d’imputation. Notre corps et notre esprit ordinaires changent depuis le jour de notre naissance jusqu’à maintenant et continuera de changer dans le futur. Nous avons tour à tour imputé notre « Je » sur la base d’un nourrisson, d’un enfant, d’un adulte et ainsi de suite. Il est évident que la base d’imputation sous l’aspect d’un enfant est très différente de celle d’un adulte ou Echange-06d’un vieillard. Ce que nous avons fait tout le temps inconsciemment nous pouvons aussi le faire consciemment du moment que nous avons l’intention de le faire.

Ce qui est déterminant, c’est le facteur mental intention. C’est lui qui détermine le karma que nous allons créer. Ainsi, nous pouvons très bien utiliser l’imputation « Je » à la place de « Moi » et par exemple « mes collègues » à la place de « Autres ». Donc je prends cette étiquette « Je », du moment que c’est juste un nom, je peux l’apposer sur n’importe quoi, je peux ainsi l’imputer sur autre chose. De la même manière, dans l’échange de soi avec les autres, nous pouvons très bien changer de base d’imputation en ce qui concerne nous-mêmes et les autres.

Par habitude et tout naturellement nous sommes focalisés sur que nous pensons être. Naturellement, nous allons prendre soin de nous-mêmes, nous chérir, etc. Si nous souffrons d’une quelconque affection, nous veillerons à notre guérison et ainsi de suite. Par un simple changement d’imputation, nous pouvons alors avoir la même attention pour les autres au lieu de nous-mêmes.

Echange--04Shantideva explique dans « Le guide du mode de vie du bodhisattva » (*), de la façon suivante. Imaginons que nous nous échangeons avec une autre personne en prenant sa place. Puis, en changeant de point de vue, la base d’imputation, nous tentons de nous mettre à la place de l’autre. Habituellement, nous pensons « Moi » en nous référant à notre propre corps et notre propre esprit, mais dans ce cas cherchons à observer ce « Moi » imputé sur le corps et l’esprit de l' »Autre ». La relativité de « Moi » et « Autre » renforce la compréhension de nous voir nous-mêmes, « Moi », comme étant « l’Autre ». Du point de vue de l’esprit, nous avons Echange-05simplement permuté les deux étiquettes en les changeant de bases d’imputation. Si nous devenons plus familiers avec ce raisonnement, nous serons plus justes envers nous-mêmes et nous serons bien plus équitables et tolérants envers les autres. Nous regarderons les autres avec plus d’égards et de respect.

Parce que nous comprenons les inconvénients de nous préoccuper de nous-mêmes par attachement et par égoïsme nous allons changer l’objet dont nous nous préoccupons et que nous chérissons tant, pour passer de nous-mêmes à tous les êtres vivants. Ainsi, chaque fois que nous faisons une action qui consiste par exemple à prendre soin de soi, nous créons le même karma que si nous faisions cette action pour les autres, parce que c’est le facteur mental intention qui détermine le karma que nous allons créer.

(*) « Le Guide du mode de vie du bodhisattva » de Ghéshé Kelsang Gyatso, aux Ed. Tharpa
D’après ma transcription d’un enseignement de Kadam Ryan, reçu au Centre Atisha de Genève.

Donner c’est aussi recevoir

Donner est l’une des six perfections enseignées par Bouddha. Elle est appelée perfection lorsque cette action est motivée par notre bodhitchitta, notre intention d’atteindre la libération du samsara et l’illumination pour venir en aide à tous les êtres vivants. Par cette pratique nous pouvons accumuler une grande quantité de mérite qui nous permettra de réaliser cette intention. Comme l’explique de manière détaillée Vénérable Kelsang Gyatso dans son livre « La Voie Joyeuse » il existe trois types de don. Le don de choses matérielles, le don du dharma et le don de la non-peur. Le propos de cet article est de partager une vision du premier type, la perfection du don matériel, inspirée d’un événement personnel récent dans ma vie.

Donner-01Lorsque nous pensons à l’action de donner, il s’agit en premier lieu de donner des biens à une ou plusieurs personnes mais pas seulement. Ainsi, nous pouvons donner quelque chose à quelqu’un afin de lui apporter un peu de bonheur ou de réconfort ou encore pour l’aider à traverser une situation difficile. Mais nous pouvons également donner spontanément une partie de notre temps. Donner ne serait-ce qu’un instant de notre temps peut avoir une valeur inestimable pour celui qui se confie à nous dans un moment difficile. Je me souviens d’avoir lu un slogan très inspirant à ce propos : « Soyez à l’aise, j’ai tout votre temps! ». Parfois, une simple présence sans rien dire, auprès de quelqu’un qui souffre peut être d’un grand réconfort. Qui n’a pas une fois posé sa main sur l’épaule d’un ami en situation pénible pour l’encourager à rebondir ? Une écoute centrée sur la personne permet également à celle-ci de déposer sa détresse, son souci, sa souffrance. Le simple fait d’être entendue peut lui être d’un grand réconfort. Et si nous faisons de telles actions avec un esprit de bodhitchitta, cela devient une puissante pratique spirituelle. En fait l’action de donner peut prendre une multitude de formes.

Donner-02Donner ne peut se produire que si quelqu’un à qui donner existe sur notre chemin de vie. Et pour que donner soit possible il faut que ce quelqu’un accepte de recevoir. Plus précisément, nous donnons avec cette intention vertueuse et non pas pour se défaire d’un objet ou pour avoir de l’influence sur le receveur. Apprendre à recevoir est souvent plus difficile qu’apprendre à donner. Étrangement, accepter de recevoir demande un état d’esprit particulier, pourquoi? Voici quelques situations qui illustrent cette difficulté.

  • Nous pensons que nous sommes suffisamment nantis et que nous pouvons décliner la proposition.
  • Nous pensons qu’accepter de recevoir dévoile notre fragilité.
  • Nous pensons que nous ne sommes pas dignes de recevoir quoi que ce soit venant de qui que ce soit ou que nous n’en valons pas la peine.
  • Nous pensons que recevoir implique d’être par la suite redevable à celle ou celui qui donne.
  • Nous pensons que notre statut ne nous permet pas de recevoir, parce que nous sommes assez fort et autonome.
  • Nous surestimons notre capacité à surmonter les obstacles et refusons alors toute aide, en pensant : « Je me débrouille très bien tout seul! ».
  • Nous refusons de revenir sur une décision alors qu’une aide extérieure le permettrait.
  • Etc.

Donner-05Dans tous les cas cette attitude ne tient pas compte de l’intention de celui qui donne. Elle a un effet pervers comme nous l’explique la loi du karma. Rappelons que toute action produit un effet. Ici l’action de rejeter le don d’autrui crée un effet qui sera une tendance similaire à la cause de réitérer cette action plus souvent encore et finalement de se couper de toute aide quelle qu’elle soit. Elle peut aussi bien créer une expérience similaire à la cause, c’est-à-dire que notre générosité sera également refusée. Et finalement les effets collatéraux d’une telle action priveront le donateur de sa possibilité de pratiquer le don et nous privera de bienfaits de recevoir que nous n’imaginons même pas. Recevoir, c’est donner l’occasion à l’autre de pratiquer le don.

 Donner-04Grâce au mérite que j’ai accumulé en écrivant cet article, puissent celles et ceux qui m’ont appris à recevoir, en pratiquant la perfection du don, être libérés des souffrances du samsara et atteindre les terres pures des bouddhas.

Apprendre à gérer le stress

Le stress est un mal de société moderne qui concerne beaucoup de gens. Souvent abordé dans les medias sous ses aspects psychologiques et neurologiques, il est rarement abordé sous l’aspect spirituel. Samedi dernier, j’ai eu l’occasion de recevoir un enseignement sur le stress d’une perspective bouddhiste, par Kadam Hélène Oester  du Centre Dromtönpa de Bern. Ce précieux enseignement présente le stress et comment y faire face d’une manière différente et intéressante dont je voudrais partager ma compréhension avec vous mes lecteurs.

Stress-01Si d’un certain point de vue le stress possède un aspect positif, parce qu’il nous stimule dans l’aboutissement de nos objectifs, il reste surtout négatif, parce que source de beaucoup de problèmes et de souffrances. Il suffit pour en rendre compte d’écouter les réflexions du commun des mortels que nous sommes : « Il me stresse! », « Mon patron me stresse ! », « Le travail me stresse en ce moment! », « Je me sens stressé par ma situation », etc. Si l’aspect positif du stress peut temporairement nous aider, parce qu’il peut augmenter notre capacité d’obtenir le résultat escompté, nous ne devons pas en abuser. À trop vouloir bien faire avec cette adrénaline nous finirons par l’épuisement de notre énergie. Arrivés à ce stade nous sommes dépourvus de force et de vigueur et nous disons : « Je n’en peux plus! », « Je ne sais plus quoi faire », « Je ne sais plus où j’en suis! ». En faisant trop et trop longtemps cela peut même se terminer par un burnout.

Il n’y a pas de recette miracle pour enrayer le stress. Faire une liste de toutes les situations qui génèrent du stress est impossible. Néanmoins les quelques indications ci-dessous peuvent nous donner des pistes pour identifier les sentiments et les perceptions révélatrices du stress en nous.

  • Avoir un sentiment d’être sous pression, d’être contraint à faire quelque chose, d’être pressé ou accablé par des conditions difficiles.
  • Avoir un sentiment d’agitation intérieure et de perdre son calme.
  • Avoir le sentiment de perdre le contrôle et d’être une machine qui ne peut plus s’arrêter-
  • Avoir un sentiment d’être submergé parce que tout nous semble trop difficile et que les tâches les plus simples prennent une dimension disproportionnée.
  • Tout en déclinant une aide, nous pensons continuellement à tout ce que nous devons faire et que nous n’avons pas encore fait.
  • Avoir le sentiment d’être épuisé, de manquer de concentration
  • Les situations stressantes perturbent notre sommeil et même dans nos rêves
  • Etc.

Remarquons dans les exemples ci-dessus qu’il s’agit systématiquement d’une perception de notre esprit. Pourtant nous sommes le plus souvent persuadés de l’existence de quelque chose ou quelqu’un à l’extérieur de nous qui nous stresse. Plutôt que de nous limiter à une compréhension intellectuelle nous devons vraiment voir ce qui nous affecte sentimentalement.  Nous devons investiguer sur ce que nous ressentons pour savoir où nous en sommes dans notre vie. Alors d’où vient ce sentiment de stress? Provient-il de notre travail, de notre chef ou de notre partenaire? Est-ce la situation familiale ou encore la société moderne qui nous stresse? En réponse à cela les enseignements de Bouddha sont on peut plus clairs. Si toutes les situations mentionnées sont des causes circonstancielles qui peuvent induire un état de stress, la vraie cause substantielle de notre stress se situe dans notre esprit. La raison de notre bonheur, de notre souffrance tout comme la raison de notre stress se trouve dans notre esprit. Nous devons donc changer notre vision des choses : La racine du stress se situe à l’intérieur de notre esprit et non dans les conditions extérieures. Contrairement aux idées reçues, ne perdons pas de vue que les possibilités de faire quelque chose existent vraiment. Nous avons la possibilité de nous libérer de ces circonstances, même difficiles, par un travail visant à changer notre état d’esprit, c’est le but à atteindre. Cessons de croire que ce sont le travail, le ou la partenaire, le chef, etc. qui nous stressent. Ce ne sont que des circonstances externes projetées par notre esprit qui entretiennent notre état de stress.

Stress-02D’une manière générale nos actions prennent naissance par une intention dans notre esprit. Une action ne peut se concrétiser sans qu’il y ait une intention préalable. Toutes nos actions mentales, verbales ou physiques sont le résultat d’une intention. Ainsi notre mode de pensée et nos habitudes peuvent dans certaines cas être à l’origine de notre stress lorsque notre esprit est préoccupé par :

  • Se contraindre à faire quelque-chose
  • Avoir de très hautes exigences envers soi-même et les autres, que ce soit dans le travail ou la vie
  • La perfection devient un trouble obsessionnel compulsif
  • Croire que le succès s’obtient en travaillant durement
  • Croire que la fuite dans le travail est la seule issue à nos problèmes.
  • Etc.

Malgré notre quête incessante de la perfection à l’extérieur nous ne pourrons jamais être parfaits tant que nous ne changeons pas quelque chose à l’intérieur de notre esprit. Et nous ne changerons pas les conditions extérieures aussi longtemps que nous ne changerons pas notre état d’esprit. Du point de vue bouddhiste, seul Bouddha est parfait parce que complètement libéré de toutes les obstructions qui empêchent d’atteindre la perfection. C’est pourquoi, nous devons nous aussi cultiver des qualités d’amour, de sagesse, de force, de joie avec patience pour espérer un jour lui ressembler. Si nous possédons ces qualités intérieures, toutes nos tâches extérieures se feront d’autant plus facilement.

Stress-04Comment pourrions-nous changer la situation intérieure de notre esprit? Bien que parfois une situation extérieure soit également nécessaire, celle-ci est rendue possible dès l’instant où nous entreprenons un changement intérieur. Ce changement passe par la pratique de la méditation. En pratiquant par exemple une méditation sur la respiration chaque jour 5 à 10 minutes ou une méditation sur notre précieuse vie humaine, nous nous couperons de cette pression et de ce sentiment et nous prendrons l’ascendant sur notre stress. (Pour ceux que cela intéresse, vous trouverez une explication détaillée de ces deux méditations dans le livre de Ghéshé Kelsang Gyatso, « Le nouveau manuel de méditation » aux Editions Tharpa). Immergés dans le travail et les difficultés nous oublions cette chance, cette possibilité de travailler notre esprit, de nous aider nous-mêmes à être heureux. Dans ce sens notre vie humaine est pleine de sens. Habituellement, nos préoccupations sont dirigées vers nos activités ordinaires, notre travail, nos amis, nos problèmes et ainsi de suite. Et l’idée de reconnaître la chance que nous avons d’être un homme, une femme n’est de fait pas dans nos habitudes mentales. Si vraiment nous réalisons la valeur de notre vie humaine, alors nous pouvons entrevoir la possibilité de changer notre point de vue sur notre travail, nos problèmes et ainsi de suite. Les enseignements de Bouddha nous ouvrent  à de nouvelles structures, de nouveaux modes de pensée qui, progressivement nous donnent le moyen de supprimer le stress de notre esprit.

Enseignement donné le samedi 12 octobre 2013, dans le cadre du programme du Centre Atisha de Fribourg par Kadam Hélène Oester, enseignante du Centre Dromtönpa de Berne

Comprendre ce que j’ai besoin de comprendre

Dans un cheminement spirituel, nous sommes amenés à lire des textes sur les enseignements, à écouter des enseignements. Ce faisant nous sommes en présence de beaucoup d’informations, de conseils et d’explications qui peuvent paraître à priori difficiles à assimiler dans leur intégralité. C’est pourquoi, ce que les maîtres conseillent est de prendre et de retenir que ce qui est confortable pour soi selon son avancement. Ne mettons pas nos attentes à un niveau d’exigences trop élevé. La transmission des enseignements spirituels se passent d’une manière particulière. Les informations sont reçues à deux niveaux : celui de notre compréhension immédiate et celui d’une compréhension différée sous forme latente. Celle-ci, telle une graine mettra un certain temps à mûrir, jusqu’à ce que les conditions de leur compréhension soient remplies.

Comprendre-01Je me souviens encore du conseil de mon enseignant qui me disait : « Ce que tu peux comprendre en ce moment c’est ce que tu as besoin de comprendre. Ça doit être dans tous les cas confortable, léger et joyeux ». Un signe révélateur de notre compréhension est notre degré de satisfaction. Si nous avons joué la carte de l’obstination, en forçant les choses, il est certain que nous serons fatigués, embrouillés et confus et nous aurons parfois l’impression de n’avoir rien compris. Au contraire si nous avons bien compris ce que nous avions besoin de comprendre, nous sommes ressourcés et contents.

Nous avons sûrement tous fait une fois ou l’autre l’expérience d’essayer de comprendre quelque chose de totalement nouveau. Notre approche est très subjective dans ce cas. Il suffit que nous pressentions un degré élevé de difficulté pour qu’une appréhension s’installe qui nous conditionne défavorablement. Souvent : « À vouloir trop bien faire, nous finissons par ne rien faire correctement ». À vouloir tout contrôler, c’est à ce moment-là que nous perdons le contrôle. La peur de ne pas comprendre, de ne pas réussir nous paralyse. Si nous nous laissons vaincre par le sentiment que c’est trop difficile, ce sera effectivement difficile. Comprendre-02Par contre, si nous nous permettons une certaine crédulité, une curiosité, nous aurons une meilleure compréhension immédiate. Nous sommes dans ces conditions plus confiant et plus détendu. Et parfois de mieux comprendre quelques jours plus tard en pensant : « Ça y est, maintenant je sais pourquoi ! ».

Dans ce cheminement spirituel, vous n’êtes pas seul. Votre guide spirituel intérieur est constamment à vos côtés et n’oubliez pas qu’il est là pour vous aider. Alors, dans votre for intérieur vous pouvez valablement lui adresser vos requêtes comme par exemple : « S’il te plaît, révèle- moi la meilleure façon de comprendre ce que traverse en ce moment »; « S’il te plaît donne-moi un indice me permettant de trouver la solution à mon problème ». Si vous faites cela avec une grande confiance en lui, les réponses ne tarderont pas à venir.

Le karma, mode d’emploi

Karma Emploi 02Le karma peut être vu comme une base de données personnelles qui est indissociable du continuum mental de notre esprit. Le fonctionnement de celui-ci est subordonné aux graines karmiques qui viennent à maturité chaque fois que des causes et des conditions adéquates sont remplies. Ces graines karmiques ne sont pas sur notre continuum mental par hasard. Personne ne nous les a transplantées. Elles sont le fruit de toutes nos propres actions passées. Le fonctionnement du karma suit la loi de causalité qui dit que : chaque action produit un effet et il ne peut avoir un effet sans cause. Quand bien même, le plus souvent nous n’avons pas d’explication de leur présence, le fait est que nous les avons bel et bien créées autrefois.

D’un autre point de vue le karma peut être considéré comme le réservoir contenant le carburant nécessaire au moteur qui anime notre vie. L’ensemble de ces effets potentiels stockés dans notre esprit est assimilable au carburant contenu dans le réservoir. Ainsi, si nous utilisons un mauvais carburant, il est probable que notre véhicule, notre corps, aura divers problèmes de fonctionnement du plus bénin au plus sérieux. Au contraire, si nous utilisons un bon carburant de source sûre, tout ira bien dans notre vie.

Karma Emploi 00Notre approvisionnement en carburant spirituel lui ne provient pas d’une quelconque station-service, mais de toutes nos propres expériences de vie, celle- ci et toutes nos vies passées. Nos bonheurs et nos malheurs vont dépendre essentiellement du contenu de notre réservoir dans notre esprit. Ce qui s’y trouve provient de toutes nos actions passées bonnes ou mauvaises. Nous sommes le seul fournisseur de notre propre karma. De plus, étant donné que nous avons beaucoup de vies à parcourir, mieux vaut avoir suffisamment de carburant de qualité pour cela.

Ceci explique de manière simple la nécessité de disposer d’un carburant spirituel de qualité si nous voulons bénéficier d’une vie heureuse. Et si tel n’est pas le cas, nous devrions entreprendre certains changements dans notre vie actuelle pour qu’à l’avenir se produise une amélioration. Alors comment garantir que nous avons toujours assez du meilleur carburant? Pour cela nous pouvons suivre les quelques pistes ci-après.

  • Karma Emploi 01Dans la mesure du possible tirer un enseignement de toute expérience vécue. Nous sommes l’observateur privilégié du mûrissement de notre karma. Selon ce qui se manifeste, nous sommes renseignés sur la nature des causes de cette expérience et nous pouvons piloter nos actions futures. Ainsi informés, nous allons naturellement abandonner les actions génératrices de souffrance et privilégier celles qui sont source de bonheur.
  • Un formateur canadien Fletcher Peackok intitule un de ses séminaires par le titre « Arrosez les fleurs, pas les mauvaises herbes ». Autrement dit si ça marche et que cela tend à créer du bonheur, le faire et le répéter et si ça marche pas ou que cela nous rend malheureux, ne plus le faire.
  • Bouddha dans ses enseignements recommande de pratiquer la discipline morale. Autrement dit, de comprendre les dangers de commettre des actions non vertueuses, puis de s’abstenir délibérément de les commettre. En réalisant les effets de nos actions négatives, nous pouvons nous retenir de les faire encore. Comme par exemple, si nous sommes flashé pour un excès de vitesse, nous nous retiendrons d’aller trop vite.
  • Pour profiter plus tard de bonnes conditions de bonheur, nous créons maintenant de bonnes causes. C’est-à-dire des actions qui engendrent de bonnes graines karmiques qui mûriront sous forme d’expériences heureuses. Nous pouvons alors voir nos actions vertueuses comme un investissement qui, avec le temps produira des effets bénéfiques.

Ainsi, nul n’est besoin de chambouler totalement notre vie avec des objectifs démesurés qui seront probablement difficiles à tenir. C’est dans des petites choses, des actions quotidiennes que nous pouvons sans grande difficulté mettre à profit ce mode d’emploi. Ne dit-on pas que ce sont les petits ruisseaux qui font les grandes rivières?

L’intention ne suffit pas …

OLYMPUS DIGITAL CAMERADans « Le Soutra roi de la concentration », Bouddha dit ceci : « Nous ne pouvons étancher notre soif, ni en écoutant le bruit de l’eau qui coule, ni en la regardant couler. De même, nous ne pouvons pas surmonter notre souffrance simplement en écoutant des enseignements sur la vacuité et en les comprenant de façon intellectuelle, si nous ne méditons pas sur eux ». [Extrait tiré du livre « Comprendre l’esprit » du Vénérable Ghéshé Kelsang Gyatso, aux Ed. Tharpa]

Ce que nous devons retenir de cette citation est que, même si nous comprenons les enseignements du dharma, nous devons de plus familiariser notre esprit avec cette compréhension. Nous pouvons approfondir celle-ci par la méditation répétée sur un objet précis. Ainsi progressivement nous serons capable mettre notre intention en action nous permettant de pacifier nos souffrances et nos problèmes.

Intuition-03Ce qui arrive souvent est que notre intention est figée dans notre esprit, parce que nous trouvons toutes sortes d’arguments pour ne pas passer à l’action. C’est une forme de procrastination qui nous incite à remettre à plus tard notre action. Tant que nous ne réalisons pas les bienfaits de convertir une telle intension en une action, nous ne pouvons avancer dans notre développement spirituel. Seule la contemplation de ces bienfaits nous amènent progressivement à agir afin de résoudre tous nos problèmes quotidiens.

Parfois notre intention est lourde de conséquences et notre préoccupation du soi va développer des stratégies pour nous dissuader de passer à l’action. Dans ces cas là, nous devons être habiles pour « négocier » une solution et peut-être de le faire par étapes ou avec une exigence réduite. Par exemple, de s’abstenir de faire une certaine action non vertueuse  non pas d’une façon définitive, mais pour une courte durée en nous focalisant sur les bienfaits de l’abandonner, puis progressivement pour une durée de plus en plus longue.

Intuition-02Nos croyances sont également un obstacle à la mise en action de nos intentions. Mais elles aussi sont impermanentes et méritent périodiquement d’être réactualisées. Nous avons été capables de lâcher bon nombre de croyances de notre adolescence pour notre plus grand bien. Alors pourquoi ne serions-nous pas capable de lâcher également celles qui nous font la vie dure actuellement. Mais voilà, nous sommes certains que cela est impossible. Et de nous rappeler la fameuse citation de Mark Twain : « C’est parce qu’ils ne savaient pas que c’était impossible, … ils l’on fait! »