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Pourquoi pas, … ? Oui mais … !

Englués dans nos occupations ordinaires, nous ne cessons de remplir notre emploi du temps par une multitude de choses futiles laissant bien peu de place pour les choses importantes comme par exemple notre pratique spirituelle. Pourquoi cette obsession ? Parce que les préoccupations de ce monde ordinaire sont à nos yeux bien plus appréciables que les activités liées à notre pratique du dharma. Ces dernières se trouvent le plus souvent au bas notre liste des tâches à faire. Or cette attitude entretient l’insatisfaction dans notre quête du bonheur et n’engendre finalement que de la souffrance. Depuis des temps sans commencement, nos mauvaises habitudes, produites par nos perturbations mentales, induisent cet état d’esprit jour après jour. Pour remédier à cette situation, nous devons impérativement changer d’attitude, mais comment ?

Les perturbations mentales, telles que la colère, l’attachement, la préoccupation de soi, etc. sont le résultat du mûrissement de notre karma, dans ce cas négatif. Alors que de toutes les activités provenant de l’application du dharma engendrent un karma positif. Nous serions bien inspirés de pratiquer la patience, l’amour, la compassion et ainsi de suite pour créer un tel karma. Rappelons que karma en sanscrit signifie l’action. Celui-ci sera vertueux si nos actions sont positives et correctes et malheureux si nos actions sont négatives et incorrectes. Or, nos actions dépendent principalement de notre intention. Dans son livre « Comment comprendre l’Esprit », vénérable G. K. Gyatso précise la définition de l’intention, je cite : « L’intention est, par définition, un facteur mental dont la fonction est de centrer son esprit principal sur un objet ».

Ainsi, la nature de notre karma positif ou négatif dépend de notre intention à nous centrer sur les objets rencontrés dans nos activités quotidiennes. Selon l’orientation de notre intention, une action bénéfique ou malheureuse s’en suivra. Puisque notre intention est à la genèse de toutes nos actions, il est très important de mieux cibler nos intentions. Dans le flux incessant de nos pensées, celles qui nous sont bénéfiques sont « en compétition » avec celles, plus nombreuses, qui produisent notre malheur et notre souffrance. Le choix dépendra de notre état d’esprit basé soit sur notre sagesse intérieure, soit sur les suggestions trompeuses de notre préoccupation de soi. À ce propos, je lisais l’autre jour à l’entrée d’un restaurant, la célèbre citation d’Epicure « Hâtons-nous de succomber à la tentation, avant qu’elle ne s’éloigne », une manière de s’enfoncer encore plus dans le samsara.

Comme la tentation de céder aux objets samsariques nous est hélas très familière, nous devons opter pour une stratégie plus efficace pour ne pas la suivre. Alors comment faire ? Dans notre fonctionnement habituel, la question « Pourquoi pas … ? » nous sert de support pour développer l’intention. L’action subséquente est souvent subordonnée à un argument introduit par une phrase commençant par « Oui mais … « . Ainsi les tergiversations et les atermoiements de notre esprit peuvent nous conduire aussi bien dans des actions vertueuses que dans des actions non-vertueuses. « Pourquoi pas … » ouvre une possibilité d’action et pourra être annihilée par la considération subséquente « Oui mais … « . Ce canevas s’applique dans notre vie de tous les jours aussi bien pour des intentions vertueuses que pour celles qui ne le sont pas . Alors « Pourquoi pas redoubler de vigilance pour réduire notre karma négatif ? » ou bien encore « Pourquoi consacrer du temps à méditer ? à quoi vous répondrez peut-être « Oui mais … !

Compilé à partir de notes personnelles inspirées de mon parcours  et de mes expériences du dharma, ces années passées

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Réflexions sur le samsara

La raison pour laquelle les enseignements de Bouddha parlent de manière très détaillée de la souffrance est pour nous faire comprendre la nature du samsara. S’il n’y avait pas une alternative à cette souffrance, nous serions tous condamnés à y rester et il n’y aurait aucun besoin d’en parler. Si la seule possibilité offerte à nous serait un endroit où la souffrance serait omniprésente, non seulement nous devrions l’assumer, mais elle nous ôterait toute illusion de Ref-Samsara-01croire à un bonheur existant quelque part dans le samsara. Nous pouvons continuer de voir les choses ainsi en vivant notre fiction dans le samsara devenu pour nous un jardin de plaisirs.

Heureusement pour nous, il y a une alternative à ce monde de souffrance, un endroit qui est au-delà de toute souffrance. Raison pour laquelle nous devons contempler et étudier la nature du samsara. Nous comprenons qu’en réalité notre situation actuelle dans le samsara est peu enviable en comparaison à un monde sans souffrance. Réalisant cela, naturellement nous aurons envie de tout mettre en œuvre pour changer, en comprenant qu’il existe quelque chose de beaucoup mieux pour nous. Mais comment pouvons-nous avoir la certitude que la totalité du samsara est de nature souffrance ? N’existe-t-il pas une partie du samsara si petite soit elle qui n’est pas cause de souffrance ?

Plus notre conviction dans l’existence de cette partie augmente et plus grande sera notre déception. Notre ignorance de la saisie d’un soi entretient cette certitude oubliant que le samsara n’existe pas en dehors de notre esprit. Le créateur du samsara, de notre samsara est notre esprit. Lui seul projette le monde dans lequel nous vivons. Ce dernier aura donc les caractéristiques semblables à celles de notre esprit, à savoir un esprit contaminé par les Ref-Samsara-02innombrables perturbations mentales qui s’y manifestent. En d’autres termes, si nous avons un esprit impur, le monde que nous créons à chaque instant sera impur et si au contraire nous avons un esprit pur le monde créé par notre esprit sera également pur.

Ainsi, nous sommes le créateur de notre propre samsara. Plus précisément, c’est notre préoccupation de soi et notre ignorance de saisie d’un soi qui, en engendrant toutes sortes de perturbations mentales telles que l’attachement, l’aversion, l’ignorance, etc., posent le décor de notre vie samsarique. De ce point de vue, nous persistons de croire que tout cela existe de son propre côté à l’extérieur de nous alors ce ne sont que de simples illusions semblables à un rêve. En contemplant la nature profonde du samsara nous réalisons que tant que celui reste notre choix, ses effets sont inévitables, un monde par nature souffrance. Tant que nous nous référerons à des objets samsariques pour réaliser un bonheur durable et authentique, nous serons tristement déçus.

La libération du samsara passe par le changement radical de notre mode de fonctionnement au niveau de notre esprit. D’habitude, lorsque nous avons des problèmes avec notre travail nous avons envie d’en trouver un autre. Lorsque nous avons des problèmes relationnels avec certaines personnes, nous leur attribuons la responsabilité de notre malaise et désirons les éviter. Ou encore, si la vie de citadin nous étouffe nous aspirons vivre à la campagne et nous aurons alors l’ennui d’être seul et isolé de tout. Lorsque nous sommes dépressif et malheureux, nous recherchons le réconfort dans l’alcool, la fumée et des Ref-Samsara-03plaisirs mondains. Lorsque nous réalisons que nous pouvons chercher de cette manière le bonheur jusqu’à la fin des temps sans jamais le trouver, nous cessons immédiatement de nous focaliser sur de tels objets.

Pour en finir avec le samsara, nous devons générer des états d’esprit purs en abandonnant une après l’autre toutes nos perturbations mentales. Le monde que nous créerons ainsi sera complètement pur. Sachant qu’il n’y a pas un monde pur qui existe de son propre côté, de manière intrinsèque, ce monde pur n’existe qu’en relation dépendante de notre propre esprit. Pour illustrer ces propos, si nous avons choisi d’assister à la projection d’un film et que celui-ci ne nous plaît absolument pas, nous sommes libres de nous lever et de sortir de la salle, en nous promettant de mieux choisir une prochaine fois. En conclusion et pour notre grand bonheur, il y a une alternative au samsara qui est au-delà de toute cette souffrance et nous pouvons tout mettre en œuvre pour choisir définitivement celle-ci.

Compilé d’après un enseignement du Programme Fondamental sur le livre « La Voie Joyeuse » de G.K. Gyatso, reçu à Genève au Centre Atisha en 2004

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Querelles et conflits

Dans notre vie courante nous sommes parfois impliqués dans un conflit ou une querelle dont l’importance est changeante. Prétendre que tel n’est pas le cas serait peut-être un signe que nous refoulons ce genre de situations. Si nous sommes alors impliqués, il est important de savoir que faire dans ces moments délicats avec l’aide des enseignements de Bouddha, le dharma. Évidemment qu’il serait préférable de ne pas avoir de querelles et de conflits dans notre vie, mais quand ceux-ci sont inévitables comment devrions-nous nous comporter?

Nous devrions en tous les cas admettre la présence de perturbations mentales dans notre esprit. En nous prenant en otage, celles-ci influencent plus ou moins fortement notre attitude dans la situation et nous font perdre le contrôle de notre esprit et par là notre manière d’agir et de répondre de manière constructive. Sur l’injonction de notre préoccupation de soi, nous voulons prendre l’avantage de la situation au détriment des autres. Or nous devrions tenir compte que les perturbations mentales sont basées sur une manière fallacieuse de voir les choses.

Dispute-01Lorsque nous vivons une querelle ou une dispute et que nous examinons notre état d’esprit, nous sommes convaincus de la pertinence de notre point de vue. Évidemment, nous avons raison et le ou les autres sont dans leur tort. Les perturbations mentales manquent d’objectivité et ne voient que les fautes chez les autres. Alors nous pensons par exemple : « Mon interlocuteur est exécrable, je ne sais comment lui faire entendre raison! C’est sûr et certain qu’il a tort! ». « Comment peut-on être aussi borné dans ce cas? ».

Telle une étincelle qui met le feu aux broussailles, la colère s’active en nous. Pensant qu’en imposant suffisamment d’invectives alimentées par la colère grandissante l’autre changera sa position à notre avantage. À nos yeux il nous paraît nécessaire d’agir ainsi pensant que c’est pour le bien de l’autre. Nous croyons ainsi créer un meilleur comportement de l’autre personne au moyen de la colère. Mais en réalité, plus nous essayons de contrôler les autres avec notre colère, plus ceux-ci se sentant agressés de la sorte seront sur la défensive par esprit de contestation.

À n’importe quel moment de la querelle ou du conflit, nous devons rester honnête avec nous-même. Nous restons conscients de notre capacité à être constructif dans le différent qui nous oppose à l’autre. Si nous réalisons que nous n’en avons pas les moyens, mieux vaut alors opter pour un temps de réflexion de part et d’autre jusqu’à ce que nous soyons dans de meilleures dispositions. Rien ne sert de poursuivre une discussion trop animée aussi longtemps que les protagonistes sont agités ou perturbés.

Souvent dans une discussion, si nous laissons libre cours à nos émotions, nous pouvons en arriver même à oublier l’objet principal de celle-ci. Notre attention est d’avantage occupée par la manière dont les choses sont dites plutôt que de nous investir dans leur contenu. Nous sommes par exemple irrités par le ton de la voix d’une personne ou nous ne donnons pas une interprétation correcte à ses intentions. Il nous paraît impératif de dire quelque chose et nous interrompons l’autre ne lui laissant pas le temps de finir sa phrase. La discussion prend alors l’aspect d’une joute oratoire dans laquelle chacun critique l’autre sur sa manière de parler.

Si nous mettons en lumière la raison profonde qui mobilise la personne, le différent sera rapidement réglé. Mais tant que « nous tournons autour du sujet en question » le conflit s’installe dans la durée. Nous devons nous poser la question de savoir pourquoi la personne agit de cette manière. Si nous traitons le souci, la préoccupation de l’autre, le problème va disparaître. Ce faisant nous montrons notre respect envers le souci, la préoccupation de l’autre. En comprenant et respectant notre interlocuteur, celui retrouve sa confiance et le problème sera résolu rapidement. La difficulté réside dans le décryptage des propos de l’autre qui nous amènera à le comprendre.

La difficulté réside dans le décryptage des propos de l’autre qui nous amènera à le comprendre. Souvent, la priorité est donnée à l’émotion et non pas à la réflexion ou à l’analyse d’une situation. Et le risque que l’émotion pure l’emporte peut annihiler l’aboutissement de la discussion. L’attitude agressive de notre interlocuteur vient probablement de la sensation de ne pas être écouté et que c’est la seule façon d’attirer l’attention.

Dispute-02Dans la dispute ou la querelle, les deux parties ont leur part de responsabilité. Pour espérer désamorcer la crise, en aucun cas nous ne devons accepter la responsabilité de l’expérience de l’autre et ne blâmons jamais l’autre pour notre propre expérience. Souvent nous adoptons une attitude inappropriée pensant que nous sommes « responsables de tout ce qui se passe dans ce monde ». À tort, nous projetons sur l’autre nos propres intentions et si elles ne correspondent pas à notre vision nous sommes profondément déçus.

Alors que la loi du karma dit clairement que chacun est responsable de ses propres actes, nous prenons délibérément le pouvoir de dire à l’autre ce qui est bon ou mauvais pour lui. C’est faire preuve de manque de sagesse et à terme l’autre personne se déresponsabilisera de ses actes en mettant la faute sur nous. C’est pourquoi nous signifierons au protagoniste ses propres responsabilités dans ses choix d’expériences. Bouddha enseigne que tous les êtres vivants n’ont aucun défaut. Ce n’est pas suffisant de juste le savoir, faut-il encore trouver son application dans notre quotidien. La sagesse de cette affirmation doit influencer positivement notre mode de vie et les disputes et querelles se feront moins fréquentes.

Inspiré d’un enseignement basé sur le livre « Huit étapes. vers le bonheur » de G. K. Gyatso reçu au Centre Atisha de Genève.

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Comment s’épanouir dans notre pratique du dharma

Lorsque notre pratique du dharma nous semble insatisfaisante, nous nous posons alors la question : « Comment puis-je m’épanouir dans ma pratique du dharma? ». D’aucuns trouvent leur pratique difficile et astreignante, d’autres ont l’impression de ne pas progresser et se découragent ou bien n’arrivent pas à concilier leur pratique du dharma avec leurs activités quotidiennes et pour d’autres raisons encore. La pratique du dharma est sensée nous épanouir, nous libérer et nous rendre heureux et progressivement déployer ses bienfaits dans tous les registres de notre vie. Tant que nous ne comprenons pas qu’il n’y pas de dichotomie entre notre vie de tous Epa-Dharma-01les jours et notre pratique, nous avons effectivement deux tâches distinctes à effectuer. Est-ce bien le cas pour nous? Pourquoi?

Lorsque nous seront capables de nous épanouir dans notre pratique du dharma et de la faire fleurir, il en sera de même dans notre vie. Les acquis de la pratique du dharma induisent des apprentissages intérieurs qui vont peu à peu transformer nos expériences quotidiennes. La fonction du dharma est de nous conduire vers l’harmonie et la paix intérieure. La raison pour laquelle nous ne nous épanouissons pas dans notre pratique est en fait très simple. Chacun possède un potentiel de pureté, une nature de bouddha dans son esprit depuis des temps sans commencement. C’est notre nature la plus subtile ou notre claire lumière de félicité ou plus simplement notre vrai Soi. Malheureusement, nous sommes totalement absorbés par ce qui semble se passer à l’extérieur et oublions la présence de ce potentiel capable de nous aider.

Ne réalisant pas que tout ce que nous croyons exister à l’extérieur est en fait la création de notre esprit perturbé, nous attribuons à nos hallucinations le pouvoir de nous épanouir. Provenant d’un tel esprit nous ne pouvons qu’être déçus! Nous recherchons les causes d’épanouissement à la mauvaise place, au mauvais endroit. Tandis que si nous tournons notre attention vers l’intérieur, au niveau de notre cœur où se trouve notre graine de bouddha, nous mélangeons notre esprit avec ce potentiel de pureté. Nous mélangeons notre esprit avec notre nature de bouddha, notre vrai Soi, là d’où viennent toutes les réponses à nos problèmes. En faisant ce voyage intérieur, nous recevrons les nombreuses bénédictions nous permettant de nous épanouir davantage. Mais pour faire ce voyage intérieur, nous devons développer la bonne attitude qui consiste à développer Epa-Dharma-02notre sagesse, notre habileté, notre patience. Alors nous donnons plus d’ampleur et de pertinence à notre pratique du dharma nous aidant ainsi à résoudre nos problèmes quotidiens.

La principale difficulté que nous rencontrons au cours de ce voyage se résume à notre paresse. Dans son livre « Comment comprendre l’esprit », Ghéshé Kelsang Gyatso défini la paresse, je cite : « la paresse est un facteur mental perturbé qui, motivé par l’attachement aux plaisirs ou aux activités de ce monde, n’aime pas les activités vertueuses ». Ce manque d’intérêt pour la pratique du dharma est appelée paresse de l’attachement. Tant que nous entretenons cette paresse dans notre esprit, nous continuerons à éprouver malheurs et souffrances et nous rencontrerons sans cesse des problèmes. À chaque instant de notre vie, nous avons le choix en donnant la priorité à notre pratique du dharma plutôt que de nous complaire dans des activités futiles du samsara.

Pour vaincre cette paresse de l’attachement, nous devons identifier les perturbations mentales qui font obstacle à notre pratique et apprendre à nous en libérer. Principalement nous devons éliminer de notre continuum mental les perturbations que sont l’attachement désirant aux objets samsariques, la colère ou aversion et l’ignorance. Tant que ces poisons interfèrent avec notre pratique, celle-ci sera forcément moins profonde, moins stable et moins gratifiante. Cette paresse de l’attachement est une conséquence de notre préoccupation de soi sitôt que nous pensons à notre propre corps ou à notre propre esprit. Cette préoccupation de soi fait naître en nous l’attachement désirant chaque fois que nous pensons à un objet que nous estimons plus important que notre pratique du dharma.

Un autre obstacle rencontré dans notre pratique qui nous empêche de nous épanouir est la non-acceptation de là où nous sommes qui peut se traduire de deux manières différentes. Soit nous avons une vue exaltée de nous même en fixant la barre de nos exigences trop haut ou bien nous avons une attitude désenchantée pensant que nous sommes nuls ou que nous n’y arriverons jamais. Bien sûr nous voudrions déjà être capables de méditer longuement sur des sujets profonds comme le calme stable ou la vacuité et trouver une solution instinctive à tous nos problèmes. Nous devrions concevoir Epa-Dharma-03de tels objets comme des objectifs à long terme et non comme un impératif immédiat. Nous devrions tenir compte des causes karmiques qui entravent notre progression.

Nous pouvons alors adopter une attitude confortable qui consiste à se dire : « Bien que j’ai en moi cette nature de bouddha, je ne l’ai pas encore pleinement réalisée mais aujourd’hui je maintient l’intention de le faire en acceptant où je suis avec toutes mes imperfections ». Cette acceptation va nous libérer de tout jugement et d’un sentiment de culpabilité pour progresser vers un véritable épanouissement dans le dharma.

Inspiré et compilé d’après un atelier du même nom donné par Timothy Leighton au Centre Atisha de Genève en 2009

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Réflexion sur la pratique du dharma

Qu’est-ce que c’est véritablement la pratique du dharma? La pratique du dharma consiste à utiliser le dharma comme la solution de tous nos problèmes. Si nous ne connectons pas notre pratique du dharma avec nos problèmes quotidiens, nous ne pratiquons pas vraiment. Le dharma ne peut pas être pratiqué de manière abstraite ou ce serait insensé de le limiter à sa seule compréhension intellectuelle. Nous devons prendre conscience de ce que sont nos Pratique-01vrais problèmes, les perturbations mentales, et d’envisager la solution à la lecture du dharma. Les enseignements de Bouddha, regroupés sous ce nom ont un caractère pragmatique, une véritable technologie qui donnent réponse à tous nos problèmes. Nous pouvons ainsi régler ceux posés par nos perturbations mentales de manière personnalisée. Pour cela, nous pouvons nous poser chaque matin au réveil la question suivante : « Quel est aujourd’hui le plus grand problème qui me préoccupe? » La première réponse qui viendra naturellement à l’esprit sera une situation ou quelque chose d’externe, comme par exemple le travail, les collègues, la voiture etc.

Habituellement la première réponse sera par exemple : « Mon travail! Et dire que je vais devoir supporter encore ce chef qui décrédite tout ce que je fais! ». Une telle réponse est avant tout un constat et ne nous aide guère. Elle peut tout au plus être le motif de nos lamentations, de notre frustration ou de notre colère. De Pratique-02manière plus profonde, tout problème comporte deux aspects, un aspect qui nous semble à l’extérieur de notre esprit et un aspect intérieur de notre esprit. Nous devons clairement faire la distinction entre ces deux aspects du problème. Dans cet exemple, plus que la situation détestable au bureau, c’est la sensation désagréable que cette ambiance provoque dans l’esprit qui est le véritable problème. En d’autres termes, l’ambiance exécrable au travail est l’aspect extérieur du problème tandis que la sensation détestable perçue est l’aspect intérieur de celui-ci. Le feeling déplaisant qui occupe notre esprit est le véritable problème. Par familiarité, nous percevons généralement les problèmes sous un seul aspect, leur aspect extérieur et faisons abstraction de l’autre aspect, l’aspect intérieur. Pas étonnant que nous avons des difficultés à les résoudre.

Pour mieux comprendre ce processus, nous pouvons considérer le problème extérieur à notre esprit comme une cause circonstancielle et le sentiment haïssable de la situation comme la cause substantielle, responsable de notre mal-être. Généralement, nous n’avons pas directement le contrôle des circonstances de ce qui nous arrive dans la vie et nous devons les affronter. Par contre nous pouvons agir sur la cause substantielle du problème, la perturbation mentale activée par la circonstance. Si, face à une problématique, nous changeons notre réponse habituelle en considérant chaque problème sous ces deux aspects, progressivement nous ramenons notre focalisation sur l’aspect intérieur plutôt que sur le seul aspect extérieur qui est hors de notre contrôle. Ce faisant, nous découvrons que notre vrai problème est nos perturbations mentales qui sont la cause de notre état d’esprit négatif. Et lorsque nous avons bien identifié notre vrai problème tel que la frustration, la colère et ainsi de suite nous allons pouvoir utiliser le dharma comme la solution spécifique qui nous libérera de notre posture inconfortable. Le dharma n’est pas en mesure de régler le problème extérieur, comme par exemple l’ambiance détestable au travail. En changeant notre état d’esprit avec les conseils du dharma, nous pouvons percevoir celle-ci différemment et orienter notre esprit vers les effets collatéraux de la cause circonstancielle et non la cause elle-même. Dans notre exemple, nous orienterons notre esprit vers la frustration, la colère ou le dénigrement que la situation engendre dans notre esprit et nous utiliserons le dharma comme solution.

Ainsi, nous utiliserons le dharma pour régler la perturbation mentale colère présente dans notre esprit. Autrement dit, nous réalisons que si nous acceptons l’action de cette colère dans notre esprit nous créons une cause de prendre une renaissance dans les règnes inférieurs. Sincèrement est-ce que ça en vaut vraiment la peine? Manifestement non et c’est pourquoi nous ne donnons pas notre assentiment à la colère qui veut nous détruire et nous rendre plus misérable encore. Une fois le problème de la colère réglé, la critique de notre supérieur aura moins d’impact sur nous et finira par s’épuiser et cesser. En conséquence de ce travail, d’autres problèmes en affinité avec la colère tels que l’esprit incontrôlé, le karma négatif Pratique-03sur notre esprit et ainsi de suite apparaissent. Nous pouvons alors étendre notre application de la pratique du dharma à ceux-ci également. De cette manière nous allons progressivement éradiquer toutes les perturbations mentales responsables de notre souffrance.

Progressivement le ressenti de notre problème se développe en incluant d’autres choses. De cette manière au fil du temps un jour nous allons nous réveiller et nous poser la traditionnelle question à laquelle la réponse claire sera : « Oups! Je peux très bien prendre une renaissance inférieure ». Souvent, dans notre pratique nous aurons de petites crises. Mais après un certain temps, la pratique du dharma prendra une place prépondérante dans notre vie. Le dharma devient un mode de vie. Si en nous posant la question : « Pourquoi je pratique le dharma? » nous ne trouvons pas de raison valide, nous devons retourner  au fondement des enseignements de Bouddha. À savoir que nous voulons être contents, être heureux, que nous souffrons à cause de nos perturbations mentales et le dharma nous donne les outils avec lesquels nous pouvons les éliminer. En conclusion, nous pratiquons le dharma parce que cela fonctionne. Lorsque nous avons cette attitude pragmatique, « Je pratique parce que cela fonctionne pour moi et que c’est la manière même par laquelle je peux résoudre tous mes problèmes », avec cette motivation nous pouvons continuer de pratiquer sans crainte d’abandonner le dharma.

Inspiré d’après un enseignement du Programme fondamental sur le livre « La Voie Joyeuse » de Ghéshé Kelsang Gyatso donné par Kadam Ryan au Centre Atisha de Genève.

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Les vacances de l’esprit

L’été est pour beaucoup synonyme de détente, de loisirs, de vacances. Il est aussi pour certains une opportunité de prendre du temps pour soi, de mettre une distance entre l’agitation de tous les jours et l’esprit qui a besoin de tranquillité pour se ressourcer. Dans ce but, nous recherchons un endroit adéquat où nous pourrons profiter pleinement de ce temps si précieux, que ce soit par un voyage, par un séjour à la campagne ou à la montagne. Seul ou parmi les gens, nous avons à chaque instant l’opportunité de vivre en pleine conscience le moment présent. Il ne se passe pas un seul moment où ce que nous percevons ne soit pas une expérience spirituelle. Pourquoi? Parce que, comme l’enseigne Bouddha, tout Temps_Medit-02est création de notre esprit. Il n’y a pas quelque chose ou quelqu’un là à l’extérieur de notre esprit qui attend que nous le rencontrions, que nous le découvrions. Ce quelque chose ou ce quelqu’un est une simple émanation de notre esprit animé par le karma qui mûrit à ce moment-là.

Nous projetons ainsi beaucoup d’attentes sur ce temps de vacances. Et c’est là que cela devient intéressant, car au-delà de toutes les expectatives, les expériences que nous faisons parfois ne correspondent guère à nos envies. Et au lieu de vitupérer sur tout et n’importe quoi, nous serions bien inspirés de tout regarder avec les yeux du dharma. Parce que ce n’est pas par hasard que nous rencontrons telle ou telle difficulté, que nous sommes accostés par une personne en apparence très désagréable ou que le service de l’hôtel est exécrable. Ce ne sont que des échos karmiques de nos propres états d’esprit perturbés. Ce qu’il y a d’extraordinaire avec le dharma, c’est que nous pouvons apprendre de tout et de tout le monde, même si la réponse n’est pas immédiate. Nous pouvons faire en sorte que les bonnes conditions comme les mauvaises conditions nous servent à grandir intérieurement.

Temps_Medit-03Rappelons-nous, que nous ne pouvons changer les personnes que nous côtoyons, ni changer les conditions qui nous entourent. Si, comme ces jours passés de canicule il faisait 38°C à l’ombre, notre intention fusse-t-elle vertueuse n’avait aucune influence sur la température ambiante. La personne désagréable, visiblement agacée par la chaleur, n’allait pas se transformer par le simple pouvoir de notre souhait. Lorsque nous rencontrons des gens ou des situations « difficiles » naturellement nous mettons en œuvre ce qui pourrait nous faire aller mieux, mais souvent de manière inadéquate. Pourtant, ce sont justement de telles expériences qui, faisant voler en éclat notre complaisance et notre préoccupation de soi, nous incitent à rechercher une issue favorable et vertueuse. Si nous commençons à développer cette sagesse là, alors nous pourrons utiliser aussi bien les bonnes comme les mauvaises conditions pour nous faire grandir intérieurement.

Les difficultés, vues avec des yeux de sagesse, ne sont plus un problème pour nous. Pour cela nous devons apprendre à ne plus voir les difficultés comme des problèmes mais comme des opportunités de faire grandir notre expérience spirituelle. Dans chaque situation nouvelle, nous pouvons nous posez la question : « Qu’est-ce que je peux apprendre de cet événement? Comment changer ma perception de ce contexte pour me sentir à l’aise avec cela? » ou d’autres questions du même genre. C’est seulement parce que nous possédons actuellement une précieuse vie humaine avec ses libertés et ses dotations que nous pouvons tirer profit de chaque circonstance. Quand nous comprenons la grande valeur et la rareté de notre précieuse vie humaine, nous faisons grandir une forte détermination de ne pas gaspiller un seul instant et d’en faire le meilleur usage possible en mettant le dharma en pratique.

Temps_Medit-01j’ai eu le bonheur d’une escapade en montagne durant toute une semaine dans un petit chalet d’alpage et de vivre une retraite solitaire. j’ai pu ainsi approfondir ma compréhension de la pratique du Mandala de Herouka et de sa contemplation. Puisse le mérite que j’ai ainsi accumulé être adressé à chacune de mes lectrices et chacun de mes lecteurs assidus ou occasionnels.

 

 

 

De bonnes raisons de chercher refuge

Rappelons-nous que notre mort est une certitude et le moment de notre mort totalement imprévisible. Sachant que notre état d’esprit à ce moment-là déterminera notre prochaine renaissance, notre pratique du dharma pourra nous aider au moment de la mort et après la mort. Nous avons tous une compréhension de ce problème pour lequel nous pouvons rechercher une solution. Mais tant que nous Refuge-Pr-01n’avons pas intériorisé celui-ci, étudier une solution restera sans résultat. Pas plus que d’accepter le problème sans savoir canaliser notre compréhension dans la bonne direction restera sans effet. Et cette bonne direction est celle que notre guide spirituel nous invite à prendre. Un passage de « L’offrande au guide spirituel » pose bien le décor de notre condition samsarique, je cite :

« Ballotté violemment par les vagues des perturbations mentales et du karma,
Et tourmenté par les monstres marins des trois souffrances,
Je cherche tes bénédictions afin de développer un puissant désir de libération
Du grand océan du samsara, effrayant et sans limites ».

Généralement nous rencontrons deux sortes de gens, ceux qui sont dans le déni total de leur situation samsarique et ceux qui acceptent leurs problèmes tout en étant complètement paniqués. Dans ce contexte, la mort et les dangers d’une renaissance dans les règnes inférieurs nous placent devant cette évidence. Dans les propos de mon enseignant, il nous a donné sa conclusion très intéressante : « Je vais cesser de me plaindre à mon guide spirituel de la taille et de la nature de mes problèmes mais je vais dorénavant démontrer à mes problèmes la taille et la force de mon guide spirituel« . Nous sommes continuellement en train de nous apitoyer sur notre sort dans le samsara. Nous serions bien inspirés de rechercher une solution fiable pour y remédier. La solution sera de prendre refuge en notre guide spirituel, la synthèse de tous les bouddhas, pour recevoir sa protection. Tout comme nous recherchons la protection et les bons conseils du médecin lorsque nous sommes malades ou que nous faisons appel à la police lorsque nous sommes en grand danger, nous pouvons faire appel aux bouddhas en cherchant refuge.

A l’échelle de notre continuum mental, alors que cette vie-ci nous paraît parfois interminable, elle ne dure qu’un instant. Dans cette perspective, cela nous donne une idée de la longueur de notre précieuse vie actuelle. Puisqu’elle nous permet de nous libérer du samsara, sachons aussi que cette opportunité est extrêmement courte. C’est la raison pour laquelle il serait ridicule et regrettable de la gaspiller dans des activités dénuées de sens. En fait, nous avons tellement « travaillé » dans nos vies passées pour obtenir cette précieuse vie que nous avons maintenant une opportunité fantastique de réaliser que nos vies futures sont bien plus importantes que cette vie-ci. Grâce à notre pratique de la discipline morale dans le passé nous jouissons d’une précieuse vie humaine. Dans ce sens, rompre notre discipline morale est bien plus dangereux que la mort, parce que si nous perdons notre discipline morale nous créerons les causes d’une renaissance dans les règnes inférieurs. Et une fois dans les règnes inférieurs, nous nous engagerons uniquement dans des actions négatives dont les effets seront des tendances à tomber encore et encore.

Refuge-Pr-02Ainsi, nous avons deux feuilles de route possible. Celle qui nous dirige vers un bonheur durable et sans souffrance en cherchant l’aide et les bénédictions du guide spirituel ou celle que suggèrent nos perturbations mentales. Or les conseils et suggestions de nos perturbations mentales sont trompeuses et nous serions bien inspirés de les abandonner. A cause d’elles nous sommes piégés dans l’océan du samsara, effrayant et sans limites pris en otage par les trois monstres que sont l’attachement, la colère et l’ignorance. En choisissant la feuille de route conseillée par notre guide spirituel, nous rechercherons ses bénédictions et son aide en cherchant refuge en lui. A ce stade, nous devons avoir l’humilité de reconnaître que nous n’avons pas la capacité de nous tirer d’affaire tout seul, raison pour laquelle nous cherchons refuge. Si nous sommes pris sous un violent orage, il ne suffit peut-être pas de simplement ouvrir son parapluie, nous devons en plus nous mettre à l’abri. C’est pourquoi nous cherchons refuge en Bouddha, le dharma et la sangha.

Spirituellement, nous sommes confrontés à quatre types de problèmes qui doivent nous inciter à chercher refuge.

  • Les problèmes mondains. Les objets et les phénomènes externes à notre esprit dans notre vie sont un véritable problème pour nous.
  • Le risque de tomber dans les règnes inférieurs. Notre capital de karma négatif est si important que le risque que celui-ci mûrisse au moment de notre mort fait que nous renaîtrons probablement dans les règnes des animaux, des esprits affamés ou des êtres de l’enfer.
  • Le risque de prendre des renaissances incontrôlées. Comme nous avons un esprit incontrôlé, veut dire que nous n’aurons pas non plus le contrôle durant le processus de la mort. A cause de cela, nous allons prendre des renaissances incontrôlées dans des agrégats samsariques.
  • Les autres prendront des renaissances incontrôlées. Les autres êtres prennent ou prendront des renaissances incontrôlées dans des agrégats contaminés sans que nous puissions faire quoi que ce soit pour eux à cause de nos limitations actuelles. C’est par analogie comme une mère qui voit ses enfants se noyer mais qui ne peut les sauver car elle-même ne sait pas nager.

Refuge-Pr-03Si nous n’intégrons pas le fait que nous avons tous personnellement les problèmes spirituels ci-dessus, nous ne serons pas forcément motivés de chercher refuge et notre pratique restera intellectuelle. En prenant conscience que ces problèmes sont en nous, alors nous trouverons la motivation réelle de chercher refuge. Nous devons connecter le dharma à nos problèmes dans notre esprit. Notre tâche principale et incessante est d’accepter et d’identifier ceux-ci. « Oui j’ai ce problème spirituel! » et à partir de ce moment-là nous sommes prêts à chercher refuge en Bouddha, le dharma et la sangha.

 Compilé d’après ma transcription et mes notes du programme fondamental « La Voie joyeuse » donné par Kadam Ryan au Centre Atisha de Genève en 2004.

Combien de temps dure notre bonheur ?

Inspiré par l’enseignement reçu samedi dernier au Centre Dromtönpa de Fribourg, je partage avec mon lectorat quelques points importants entendus et résumés ci-après.

Temps_Bonheur-01Si nous nous posons la question de savoir combien de temps dure notre bonheur, notre réponse sera le plus souvent très subjective car sa durée dépendra de chacun. Pour illustrer la durée de notre bonheur, prenons des exemples connus de tous et que nous avons tous vécu une ou plusieurs fois. Par exemple, le temps des vacances, combien de temps dure le bonheur résultant d’être en vacances? Pour certains ce sera toute la durée de celles-ci et pour d’autres seulement quelques jours. Et une fois les vacances terminées, combien de temps ce bonheur se prolonge-t-il? Ce bonheur s’estompe très rapidement car confrontés à nouveau à la réalité de notre quotidien qui, forcément n’a pas changé depuis que nous sommes partis. Alors il ne reste qu’un vague souvenir mais le bonheur lui aura cessé. Ainsi, nous réalisons que ce type de bonheur reste limité dans sa durée. Nous pouvons facilement trouver d’autres exemples de situations vécues, telle qu’une rencontre avec de très bons amis, une fête de famille, parfois le travail. Pour toutes ces situations, malgré l’intensité des moments d’échange, la convivialité, le plaisir et la satisfaction qui nous procurent un sentiment de bonheur, celui-ci est temporaire et que de nombreuses circonstances sont susceptibles de le détruire.

Dans aucune de ces situations nous pouvons prétendre maintenir durablement cet état de bonheur au-delà du temps de l’expérience en question. Autrement dit, nous pouvons faire momentanément une expérience de bonheur mais celui-ci inéluctablement finit par nous échapper, comme du sable qui nous glisse entre les doigts. Il suffit parfois d’un rien pour que subitement notre sentiment de bonheur Temps_Bonheur-02soit brusquement anéanti par un événement imprévisible et désagréable. Bouddha nous enseigne qu’il existe une sorte de bonheur permanent, mais il ne se trouve pas dans nos expériences samsariques. Ce bonheur permanent résulte d’une clarté, d’une paix intérieure que seule la mise en pratique de ses enseignements explique. Nous sommes actuellement incapables de maintenir notre esprit dans cette paix intérieure malgré toute notre énergie. Le bonheur obtenu ne dure pas. Pourtant tous les êtres souhaitent posséder ce bonheur dont Bouddha nous parle. Pour cela, nous sommes prêts à tout changer dans notre existence, les objets, les personnes, notre environnement et nous sommes constamment en train de nous plaindre en pensant : « Si seulement je pouvais avoir cette situation, cet objet indispensable à mes yeux, je serais certainement heureux » ou bien encore « Ah si seulement telle ou telle personne pouvait changer sa façon d’être avec moi, je serais sûrement heureux ».

L’énergie que nous investissons à vouloir arranger les conditions extérieures dans notre vie se soldent tôt ou tard par une grande déception et nous devons nous rendre compte de ce mécanisme. Si le fait d’obtenir l’objet de nos rêves, la situation de nos rêves, le partenaire idéal suffisait à nous rendre heureux nous serions tous heureux. Nous avons tous cette certitude à quelque part dans notre esprit et nous nous obstinons dans la mauvaise direction. Pourtant nous réalisons que le bonheur que nous procurent toutes ces situations ne dure pas. Ceci est comme boire de l’eau salée en pensant que nous allons pouvoir étancher notre soif. C’est exactement la même chose lorsque nous cherchons ce genre de bonheur ordinaire et temporaire nous ne serons jamais rassasiés et satisfaits. Encore une fois, cela ne veut pas dire que nous devons renoncer à l’objet, la situation, le partenaire idéal, mais nous devons les considérer différemment. Alors finalement, pourquoi ne trouvons-nous pas ce bonheur qui dure? Ce bonheur qui se dérobe devant nous et qui systématiquement disparaît. Quelle est donc la cause pour laquelle nous ne ressentons pas ce bonheur permanent?

Temps_Bonheur-03Il y a deux principales causes à cela. La première cause est que notre esprit est sous le contrôle de nos perturbations mentales. C’est-à-dire que notre esprit est sous le contrôle de notre ignorance de la saisie du soi. Cette ignorance qui considère ce JE, ce MOI comme la chose la plus importante au monde et qui nous crée des problèmes tant qu’il n’est pas satisfait. La deuxième est que l’esprit alors réagit avec mécontentement, frustration, attachement et différentes autres perturbations mentales. Prenons un exemple pour illustrer ce mode de fonctionnement. Imaginons que nous déambulons dans une rue commerçante avec l’intention d’acquérir quelque chose d’original que personne ne possède encore à notre connaissance. À travers cette acquisition nous obtiendrons l’admiration de tous nos proches. Soudain à l’angle de la rue nous croisons « notre pire ennemi » qui possède exactement l’objet convoité et désiré. Cet événement génère instantanément en nous un sentiment de jalousie et de frustration qui va de fait anéantir notre projet et le bonheur que nous avions à l’idée de faire cet achat disparaît. Ce moment de bonheur a été chassé par cet événement soudain.

Cet exemple démontre que nous tombons systématiquement dans le piège de notre ignorance et que le bonheur nous échappe. Nous avons une telle familiarité avec ce mode de fonctionnement  que notre ignorance et notre préoccupation de soi nous mènent par le bout du nez tant que nous ne faisons pas quelque chose pour les supprimer. Pour cela, nous devons observer et contrôler le comportement de notre esprit en présence de telles situations et nous rendre compte des agissements perfides de nos perturbations mentales. Au lieu de tenter de changer ou de supprimer les conditions extérieures qui entravent le développement de notre bonheur nous devons nous mettre à l’ouvrage pour débusquer nos dysfonctionnements tout en reconnaissant ce qui se passe en nous. Les perturbations mentales sont trompeuses et nous devons cesser de nous fier à elles. Nous devons nous souvenir que ce ne sont pas les objets extérieurs qui nous procureront un vrai bonheur. Aussi longtemps que nous saisissons vivement et fortement ces différentes choses externes pour pouvoir être heureux, nous serons finalement toujours déçus.

Quel est le but ultime de notre vie?

Fondamentalement, nous voulons tous jouir d’un bonheur immuable et être libérés définitivement de la souffrance, du moins dans cette vie … et après? Alors, nous devons nous poser l’importante question :  But-ultime-04« Qu’est-ce je veux vraiment? ». « Est-ce que je veux me complaire dans le samsara tout en sachant qu’aucun vrai bonheur ne s’y trouve? ».  « Est-ce que je veux encore et encore m’épuiser à changer les conditions adverses de ce monde pour ne plus souffrir? ». En fait, tout ce que nous faisons se base sur une simple hypothèse : « Nous croyons que telle ou telle chose nous apportera le bonheur et nous libérera de la souffrance ». Malheureusement, dans le samsara cette hypothèse nous trompe systématiquement. Si ce que nous voulons n’est pas plein de sens et n’est pas bénéfique, tout ce que nous faisons nous maintiendra dans le samsara. Mais si tout ce que nous faisons est bénéfique et plein de sens, alors tout ce que nous entreprenons sera pour l’accomplissement de ce but ultime. Dans son livre « Huit Étapes vers le Bonheur » Ghéshé Kelsang Gyatso nous explique que le but ultime de notre vie est la pleine illumination. Nous devons tout mettre en oeuvre pour atteindre ce but.

Quand bien même les réalisations et les expériences de notre vie ordinaire sont normalement profitables, car elles contribuent indirectement à notre objectif, elles ne sont pas pour autant notre but ultime. Tout ce que nous expérimentons dans cette vie est la But-ultime-02conséquence de nos actions passées et tout ce que nous faisons, à travers nos actions bonnes ou mauvaises, aura des conséquences à l’avenir. En cela, elles ne sont pas une finalité. Ainsi, pour orienter notre choix, la question cruciale à se poser est : « Au moment de la mort, qu’est-ce que je vais prendre avec moi dans ma prochaine vie? », « Y a-t-il quelque chose de plus important que toutes ces choses ordinaires? ». La mort détruit sans complaisance les accomplissements mondains, les réalisations terrestres. Toutes les « bonnes choses » de cette vie sont sur le point de s’épuiser. Alors, la question la plus pertinente que nous pouvons nous poser est : « Qu’est-ce que je vais prendre de cette vie avec moi? ».

But-ultime-01Lorsque nous mourrons, tout et y compris notre corps et notre esprit ordinaire cessent d’exister. Seul notre esprit très subtil subsiste et se dirige vers notre prochaine vie. Or, notre esprit très subtil est le dépositaire de notre karma, la seule chose qui compte pour nous et qui nous accompagne vie après vie. Ce karma peut être bon ou mauvais selon les actions commises dans le passé et dans cette vie. Tout ce que nous faisons peut être plein de sens si nous le faisons avec un esprit plein de sens. Chacun de nous est le créateur responsable de son contenu. Et puisque la nature de notre karma détermine la nature de notre prochaine renaissance, nous devons utiliser notre précieuse vie pour accumuler du bon karma, parce que ce sera la seule chose que nous sera utile dans nos vies futures et finalement pour notre illumination. Évidemment, ce n’est pas lorsque nous serons au chapitre de la mort qu’il faudra songer à aménager du bon karma. C’est un souci de tous les instants, dès maintenant. Nous devons utiliser cette vie-ci pour créer le maximum de karma positif.

Il arrive parfois que nous sommes confrontés à une situation et nous ne savons pas quoi faire. Nous sommes peut-être enclins à transgresser notre discipline morale en minimisant l’effet de commettre une action non-vertueuse. Nous devrions nous souvenir de la loi de causalité du karma et de ses effets. Toute action aura tôt ou tard des conséquences sur notre destin. Avant de passer à l’acte But-ultime-03demandez-vous : « Au moment de ma mort, est-ce que je serai fier d’avoir commis l’action que je suis sur le point de faire? ». L’envie néfaste disparaîtra instantanément et nous n’aurons pas à le regretter plus tard. Les buts que nous poursuivons dans notre vie ordinaires ne sont que des illusions semblables à un arc-en-ciel, qui disparaît sitôt les causes et les conditions de son existence ne sont plus satisfaites. Au moment de la mort, la bonne réputation, les biens matériels, les amis, les proches seront à laisser derrière nous, car les causes karmiques de leur présence ne sont plus remplies. Mon enseignant citait Vénérable Tarchin qui disait : « Nous devrions vivre notre vie de la perspective de notre lit de mort ». Mais alors quels sont ces objets de valeur que nous pourrons emporter?

Si nous consacrons toute notre vie à l’accomplissement d’objectifs ordinaires et à la réalisation de nos désirs matériels, au moment de la mort nous ne pourrons prendre tout cela dans notre prochaine vie. La grave erreur consisterait à les considérer comme le but ultime. Par contre, si nous faisons croître notre bodhitchitta qui consiste à se préoccuper des autres et à les porter dans notre cœur nous contribuons à la cause principale de notre illumination, le but ultime de notre vie.

Compilé d’après ma transcription et mes notes d’un enseignement de Kadam Ryan « Huit Etapes vers le Bonheur » au Centre Atisha Genève.

Réflexions sur l’effort

L’effort dans le contexte spirituel diffère complètement de ce que nous entendons dans la vie quotidienne ordinaire. L’effort dans ce cas est associé à quelque chose de désagréable et pénible. Il suffit pour illustrer cette perception de citer des expressions courantes telles Effort-04que : « Je dois travailler dur », « Je dois faire quelque chose que je n’aime pas », « Je dois faire un effort pour y arriver » et ainsi de suite. La définition de l’effort selon le dharma est totalement autre. Ici l’effort est le fait d’entreprendre quelque chose de manière ludique, avec un esprit serein. En nous engageant avec un esprit vertueux, l’effort que nous faisons n’est plus pénible du moment que nous créons de bonnes causes pour le bien de celui-ci. Notre effort correspond dans ce cas au degré de plaisir obtenu en nous engageant dans des actions vertueuses. Franchement, est-ce qu’il y a quelque chose d’autre que nous préférerions faire que d’entraîner notre esprit? Honnêtement, nous connaissons la réponse, car toutes sortes de suggestions nous viennent à l’esprit.

Lorsque nous disposons de temps libre, nous trouvons sans difficulté une activité de loisir qui nous ferait plaisir, mais ce n’est pas toujours le cas pour notre pratique spirituelle. Or, nous devons savoir utiliser notre temps à bon escient et nous allons naturellement faire un effort s’il s’agit de créer des bonnes causes pour notre esprit. Dans ce cas, souvent nous avons tendance à minimiser l’importance de notre effort que nous jugeons bien faible. Cela n’a pas d’importance car celui-ci correspond à nos capacités au point où nous en sommes actuellement. Nous ne devons pas pour autant mésestimer nos efforts, si petits soient-ils mais plutôt accepter leurs résultats sans Effort-05jugement. En fait, nous avons tous en nous un certain désir de faire ce genre d’efforts, mais pour cela nous devons bannir la culpabilité et le sentiment d’obligation de notre esprit. Comme mon enseignant nous l’expliquait : « Mieux faire moins avec joie que davantage avec culpabilité ». En prenant cette attitude sur le long terme, notre motivation ne sera pas perturbée par la culpabilité et le sentiment d’obligation.

La voie de l’illumination est longue et demande de la persévérance et de la patience. Pour cette raison, il est stratégiquement plus avantageux pour nous de rester dans la joie quoi qu’il advienne. Notre principale difficulté est de croire que les choses plaisantes et agréables nous procurent joie et bonheur de manière intrinsèque. Par ignorance, nous sommes persuadés que le pouvoir de susciter le plaisir ou de l’aversion vient de l’objet. C’est pour cette raison par exemple qu’une activité, qui au début était agréable, devient ennuyeuse si nous la faisons telle une routine sans joie. Elle nous lassera au point de finalement l’abandonner. Pire encore est de faire cette même activité tout en pensant à autre chose qui nous paraît bien plus agréable. Ainsi nous sommes sous l’emprise de la culpabilité et intérieurement nous sommes en conflit parce que nous n’avons simplement pas envie de la faire. Une activité ne peut jamais être super-agréable tant que nous ne nous engageons pas totalement Loisirs-01dans celle-ci. En mettant le 100% de nous-mêmes dans tout ce que nous faisons, nous évitons de nous disperser avec un gaspillage d’énergie mentale et spirituelle.

Quelle que soit la situation que nous expérimentons, nous avons l’intérêt de la vivre intégralement et en conscience. Ainsi, lorsque nous sommes au travail, faisons le totalement; lorsque nous sommes dans une activité de loisir, vivons celle-ci pleinement sans retenue et avec joie. De même, lorsque nous faisons notre pratique spirituelle quotidienne nous nous laissons complètement absorber par elle sans distraction. C’est de cette façon que nous pouvons véritablement trouver la joie de le faire. La joie ne vient pas de ce que l’activité nous donne, mais de faire cette activité pleinement. Ainsi nous découvrirons les limites de notre capacité à le faire que nous pourrons repousser progressivement en faisant de mieux en mieux. Notre joie et notre satisfaction seront d’autant plus grandes qu’elles proviennent d’un sentiment d’avoir bien fait les choses. Tant qu’en faisant une activité, peu importe laquelle, nous pensons : « Bah, je devrais être en train de faire quelque chose d’autre en ce moment », nous ne trouverons pas le sentiment de cet effort joyeux.

Pourquoi pratiquons-nous le dharma? Est-ce que nous pratiquons le dharma parce que nous « devons »? pour éviter « d’être punis »? Non. Il n’y a qu’une seule raison de pratiquer le dharma, c’est parce que cela fonctionne pour nous et de progresser spirituellement. Dans tous les cas, cela fonctionne mieux de faire les choses d’après les enseignements du dharma que de faire les choses en suivant nos perturbations mentales. Lorsque nous arrivons à la frontière de nos capacités, et que nous essayons de faire mieux, de faire mieux ce que nous sommes en train de faire, nous allons réaliser que nous pouvons faire mieux ce que nous sommes en train de faire en le faisant avec moins de perturbations mentales. Notre objectif est de faire les choses bien, sans attachement au résultat et en mettant toute notre attention dans ce que nous sommes en train de faire. Nous pouvons faire mieux tout ce que nous entreprenons du moment que nous avons un esprit en paix, libre de toute perturbation mentale. Nous pouvons être très performants si nous savons rester décontractés, sans se crisper sur le résultat attendu. Nous pouvons extraire plus de plaisir d’une activité, du moment que nous le faisons dans l’esprit du dharma pour être heureux.

Compilé à partir d’une transcription de l’enseignement du PF « La voie Joyeuse » donné au Centre Atisha à Genève par Kadam Ryan