Archives pour le tag : attachement

Addenda à la pratique de la patience

Suite de mon précédent article : « La pratique de la patience »

En fait, nous sommes tellement habitués  à l’impatience que nous ne remarquons même plus  lorsque nous perdons patience. Notre vie trépidante et stressante nous pousse à perdre patience. Pourquoi? Parce que des jours de vingt-quatre heures ne suffisent plus pour satisfaire tous nos désirs et tous nos objectifs. Nous sommes tellement attachés aux résultats immédiats de nos actions, que souvent un délai normal d’attente nous est insupportable. Notre impatience est un sous-produit de la peur : (1) la peur de perdre du temps précieux; (2) la peur de ne pas réussir; (3) la peur de décevoir; (4) la peur de ne pas satisfaire toutes nos envies; (5) et ainsi de suite. Nous sommes persuadés qu’il y a quelque chose à l’extérieur de notre esprit qui nous fait peur et fait perdre patience.

Pour stimuler votre imagination, voici un exemple que chacun a certainement vécu. Après un séjour chez des amis en banlieue parisienne, l’un d’eux me raccompagne à la Gare du Nord pour prendre mon TGV. Pour cela nous empruntons le périphérique de Paris. À peine sur l’autoroute, devant nous, un immense bouchon formé d’une multitude de camions bloquant toute circulation. Nous avançons à pas d’escargot, la grogne des automobilistes est palpable, tout le monde s’énerve y compris la personne qui me conduit à la gare. De toute évidence la situation est hors de notre contrôle. Alors pourquoi ajouter une souffrance supplémentaire sur notre esprit. « Cela ne sert à rien de perdre patience, je ne peux qu’accepter la situation! » « Bien sûr que du coup je vais perdre mon train, qu’à cela ne tienne j’en prendrai un autre ».

Un autre exemple : « Au début de mon burn-out j’ai perdu l’usage de la parole durant dix jours. Ce fût une période très accablante et pénible de ne pouvoir communiquer de vive voix. Au lieu de me laisser troubler par la situation j’ai utilisé les « SMS » sans m’énerver, faisant exploser ma facture de téléphone.  Un dernier exemple, qui vous est sûrement arrivé aussi. Vous êtes dans une file d’attente à la poste ou à la banque. Bien sûr vous êtes hyper pressé et n’hésitez pas à changer de file si l’une d’entre-elles semblent se résorber plus vite. Ne le faites pas! Je me suis trouvé ainsi derrière un retraité qui venait avec plusieurs carnets d’épargne y faire inscrire les intérêts et demander conseil pour un placement. Pendant que j’attendais mon tour, je voyais sous mes yeux la file que j’avais quittée avancer bien plus vite!

 Vous avez sûrement une multitude de situations dans lesquelles vous êtes confrontés à votre manque de patience!

Actualiser nos croyances

Je sors gentiment de ma déprime après avoir passé la majeure partie des quatre mois derniers dans mon studio. Lundi, à la suite de ma méditation, je balaye 360 degrés des yeux mon logis. Je constate que mon état d’esprit change selon les objets qu’il perçoit. Ceci est normal, me direz-vous, mais dans ce cas il y avait une dimension de plus dans ma réflexion : l’envie de changement! l’envie de renouveau!

Avec le temps, nous nous attachons aux choses parce que nous croyons qu’elles ont une certaine importance. Nous adoptons dans notre quotidien une multitudes d’activités et de gestes que, par habitude, nous faisons  presque machinalement, comme un rituel, parce que cela nous paraît important.

Les croyances, comme par ailleurs beaucoup de produits, ont-elles aussi une durée limite de consommation. Celles-ci changent avec le temps, c’est dans l’ordre de l’impermanence des objets et des phénomènes. Les croyances n’ont quant à elles aucune existence inhérente, elles existent en relation dépendante de notre état d’esprit. Les croyances de notre enfance sont pour la plupart devenues obsolètes et nous les avons éliminées de notre esprit. Alors il arrive un moment où certaines de celles-ci nous gênent, nous perturbent. C’est le moment de revisiter la collection de ses croyances, mais comment?

Pour cela, il y a quatre critères importants nous permettant une mise à jour de nos croyances.

  1. Le poids des arguments. Faire une liste exhaustive des avantages et des désavantages de conserver une croyance.
  2. L’observer avec un esprit objectif. Sans attachement, avoir un esprit critique, comme un scientifique en effectuant avec sagesse une contemplation analytique de sa pertinence. Il vous est sûrement arrivé la situation où une personne ou un ami vous fait remarquer une erreur manifeste. Et ainsi pris sur le fait, vous rétorquez : « Ah bon ! Moi je croyais faire juste ! J’ai toujours fait ainsi ».
  3. Ce qui est vrai ou faux n’est pas l’essentiel, la seule chose qui compte est de croire ce qui est le plus bénéfique. Il y a des raisons valides personnelles pour décider de croire ce qui est bénéfique pour soi-même. Ce qui est bénéfique pour soi ne l’est peut-être pas pour son voisin. Mais heureusement, ce qui est en fait vrai est ce qui est le plus bénéfique à croire. Plutôt que de raisonner sur ce qui est vrai ou faux, n’ayez pas peur de le faire sur ce qui est bénéfique à croire. Les choses vraies sont généralement les choses les plus bénéfiques à croire.
  4. À condition d’avoir appliqué un ou plusieurs des trois points ci-dessus nous pouvons déduire la fiabilité de la croyance observée. La fiabilité intégrale qui découle des enseignements du dharma doit nous aider à faire les bons choix.

Tout comme dans nos communes, il y a périodiquement un ramassage des objets encombrants et que nous profitions de cette occasion pour nous débarrasser de tout ce qui est inutile, nous pouvons également périodiquement contempler la liste de nos croyances et de les mettre à jour.

Quand est-ce la dernière fois où vous avez fait l’inventaire de vos croyances et de leur actualisation?

Attachement à la réussite

L’attachement est l’une des perturbations mentales les plus dévastatrices de notre paix intérieure. D’après les écrits bouddhistes nous, tous les êtres vivants, sommes dans le règne du désir. Notre attitude est donc fondamentalement orientée vers la quête du bonheur et l’évitement de la souffrance. Et notre principale erreur vient du fait que nous recherchons le bonheur à l’extérieur de notre esprit.

En méditant ces temps passés, j’ai réalisé à quel point l’attachement et plus précisément l’attachement à la réussite peut se transformer en souffrance voire en cauchemar dans notre vie. Pourquoi cela?

Depuis notre plus tendre enfance, nous somme confrontés à ce problème de réussite. Dans notre société, notre statut social est étroitement lié à notre degré de réussite. Notre auto-préoccupation renforce sensiblement notre besoin de réussir, en nous insinuant : « Je suis important, je dois gagner, je dois me battre pour être le meilleur ». Ainsi, grandit en nous un esprit de compétition qui nous pousse constamment à réussir. Si nous ne réussissons pas, nous nous exposons à la critique et au blâme de nos proches et des autres. Nous nous sentons alors coupable de ne pas réussir, nous perdons confiance ce qui à son tour réduit nos potentialités de réussir comme dans un cercle vicieux. Ainsi se développent en nous ce « devoir de réussir ».

Particulièrement dans le monde d’aujourd’hui celui qui n’a pas de réussite rencontrera des obstacles de toutes sortes. Les medias et la publicité nous conditionnent de manière subtile chaque instant de réussir. Durant notre scolarité, nous avons rencontré cette compétition pour être le premier de classe. Plus tard dans les études supérieures, l’accès à celles-ci était conditionnée par un concours d’entrée, comme par exemple « Seuls les 25 meilleurs seront admis ». Souvent, il en va de même pour une place dans le monde du travail.  Les cas de figure seraient nombreux et chacun a sûrement vécu à un moment ou à un autre dans sa vie une situation similaire.

Cela ne veut pas dire qu’il faut refreiner sa motivation et sa détermination de réussir. La réussite en soi est constructive et bienfaisante. Mais c’est l’attachement à la réussite qui mène à toutes sortes de perturbations telles que la culpabilité, la perte de l’estime de soi et la perte de confiance.
Dans les pires des cas l’attachement à la réussite peut même mener  à la dépression. Certains font des « sacrifices déraisonnables » pour réussir une carrière, mettant en péril leur santé physique et psychique en prenant des drogues. Certaines personnes vont jusqu’à mal agir envers et contre tous pour réussir coûte que coûte créant des souffrances pour eux-mêmes et leur entourage et la perte de la paix intérieure si importante au bonheur.

 Nous avons l’habitude d’attribuer notre manque de réussite à des causes extérieures, en ne prenant en considération que les effets immédiats et manifestes auxquels nous attribuons toute la responsabilité. C’est une mauvaise interprétation de la réalité. Ce sont là des causes circonstancielles qui viennent faire mûrir les causes substantielles que sont les graines karmiques présentes sur notre esprit. Par conséquent l’attachement à la réussite n’est simplement qu’un état d’esprit qui observe de manière partiale et subjective qu’une seule partie de l’expérience tout en ignorant la partie karmique de celle-ci.

Comment pouvons-nous alors objectivement éviter le piège de l’attachement à la réussite? Tout d’abord en acceptant, quelle que soit la dureté de l’expérience, que celle-ci est l’effet karmique de causes multiples provenant de nos vies antérieures. Puis de prendre en compte tous les aspects manifestes de l’expérience et de rechercher les moyens constructifs d’action qui nous permettrons d’éviter une expérience similaire dans le futur et en s’acceptant tel que l’on est au lieu de souffrir de ne pas être ce que l’on voudrait être.

Réflexions sur la loi du karma

Ma période de rétablissement de mon burn-out est propice à la méditation silencieuse et à la contemplation de la leçon du karma que je viens de traverser. Dans une de ces contemplations je me suis souvenu d’une expérience de lycée. Une expérience de physique qui illustre très bien le fonctionnement de la loi de causalité du karma : Le principe de la conservation de l’énergie ou la transformation de l’énergie. Nombreux sont ceux qui s’en souviendront.

Petits rappels de physique

Soit deux billes métalliques A et B suspendues chacune par un fil comme le montre la figure (a) dans leur position d’équilibre au repos. Si l’on écarte la bille A de sa position initiale, comme illustré sur la figure (b) et que nous la laissons revenir contre la bille B, celle-ci subissant le choc de la bille A va à son tour être éjectée de sa position d’équilibre de repos pour s’en éloigner avant de revenir.
Constatation : la bille A cause à la bille B un choc (effet) qui la déplace.

Prenons une situation un peu plus complexe. Disposons entre les billes A et B plusieurs billes identiques (?), également suspendues par un fil comme le montre la figure (c). à nouveau, comme illustré par la figure (d) de la même manière si l’on écarte la bille A de sa position initiale puis la laissons revenir contre la bille suivante, le choc va se transmettre de proche en proche, comme dans une collision en chaîne jusqu’à la bille B produisant son déplacement. Dans cette expérience les billes nommées (?) sont restées parfaitement immobiles.
Constatation : la bille A cause à la bille B le même choc que précédemment indépendamment du nombre de billes (?) disposées entre elles.

La loi du karma fonctionne de la même manière par analogie.

  1. Il ne peut pas se produire d’effet sans cause, pas plus qu’il ne peut y avoir de cause sans effet.
  2. L’effet et la cause sont de la même nature, (dans les expériences : le déplacement de la position d’équilibre.
  3. La cause peut avoir un effet aussi bien immédiat que différé, (plusieurs billes par analogie plusieurs vies. Observez la différence entre la première et la deuxième expérience.
  4. La cause peut être manifeste (immédiate) mais également non manifeste donc subtile si elle remonte à plusieurs vies antérieures, (plusieurs billes non connues).
  5. Ne pas attribuer subjectivement un effet ou une expérience à une cause manifeste, par exemple hier, la semaine dernière ou encore dans cette vie. Cela peut être le cas mais pas forcément. Une cause peut très bien remonter à plusieurs vies donc nous n’avons aucun souvenir, mais l’effet mûrit.
  6. Dans la deuxième expérience, les billes nommées (?) peuvent être nos propres vies antérieures comme des empreintes ou des causes collectives accumulées dans le passé, notion de karma collectif. (voir mon article « À cause de l’ignorance … ».

Mon expérience

Par ignorance j’ai à un moment donné mon assentiment à mon auto-préoccupation qui développa un fort attachement à mon rôle d’enseignant. Constatant la fin mon activité après sept années modestes de par le nombre de participants j’ai fait un faux raisonnement. J’ai attribué mon manque de réussite aux seules causes possibles durant cette période. Comme par exemple mon manque charisme, le niveau et le choix des thèmes, d’avoir choisi le mauvais jour de la semaine, l’endroit inadéquat et ainsi de suite. Tout cela créa un état dépressif qui nourrissait mon auto-préoccupation comme dans un cercle vicieux. En vérité tel n’était pas le cas. Pourquoi ? Parce que cette longue expérience était l’effet de mon karma provenant des vies antérieures, causes anciennes, et également d’une part de karma collectif des gens de ma région. Cette contemplation je peux aujourd’hui l’accepter sans jugement. Au contraire, ma longue activité a créé les causes pour que dans le futur il y aura certainement un centre du dharma dans la région. En faisant jour après jour des dédicaces accumulant ainsi du mérite vertueux celui-ci deviendra une réalité.

La colère (3ème et dernière partie)

Comment se développe la colère

La colère est une perturbation mentale, une sorte de cancer de notre esprit. Il est par conséquent très utile de comprendre comment la colère se développe. Et en comprenant comment elle se développe, le plus souvent nous pouvons  empêcher ses causes de se produire et de nous éviter la colère.

La colère est une réponse à une sensation de tristesse et de mécontentement qui survient systématiquement chaque fois que nous rencontrons des circonstances désagréables.

Lorsque nous rencontrons quelque chose que nous détestons ou que nous voudrions plutôt éviter, notre esprit est immédiatement atteint par une sensation malheureuse. À son tour cette sensation malheureuse se transforme en colère. Nous rencontrons chaque jour de telles situations par centaines.

Une grande partie de cette colère est la réaction de frustration à nos désirs qui ne se réalisent pas ou lorsque nous n’obtenons pas ce que nous voulons. Confrontés à notre colère, nous avons besoin de trouver une manière réaliste d’aborder de telles situations.

Les causes de la colère

Les principales causes de nos perturbations sont au nombre de six. Appliquées à la colère, nous avons :

  • La graine. C’est une potentialité provenant de notre karma antérieur sur notre esprit due à de précédentes perturbations relatives à la colère. Aussi longtemps que cette graine reste sur notre esprit des potentialités de colère subsistent. Donc nous devons finalement purifier toutes ces graines.
  • L’objet. C’est l’objet externe qui suscite notre colère de manière désagréable. Peut-être nous pensons pouvoir l’ignorer, mais cela est impossible quoi que vous fassiez où que vous alliez. Ce que nous avons besoin de faire, c’est de changer d’état d’esprit. Quelquefois il est plus bénéfique de se séparer de l’objet de la colère en question.
  • Par distraction ou en se laissant influencer par d’autres. Si nous sommes dans un environnement où des personnes se mettent facilement en colère, nous pouvons également être influencés par leur comportement. Nous devons garder notre vigilance pour ne pas faire de même.
  • Par de mauvaises habitudes. Spécialement si nous avons de l’attachement ou en prenant exemple sur des images de violence et de colère, en consommant de mauvais films ou de mauvaises vidéos.
  • Par familiarité. Si nous avons une certaine familiarité avec la colère, nous nous mettons facilement en colère. Ce qui est naturel est simplement ce qui est familier.
  • L’attention inappropriée. C’est la cause principale de la colère, sur laquelle nous pouvons immédiatement agir. C’est un esprit qui se focalise sur les aspects désagréables en les exagérant jusqu’à devenir insupportables pour déclencher la colère. Le monde que nous expérimentons est le monde auquel nous prêtons attention.

En résumé, sachant pourquoi nous nous mettons en colère, nous choisirons un état d’esprit approprié pour l’éviter, en sachant comment elle se développe et en pensant aux causes de celle-ci. Progressivement avec patience et persévérance, sans se décourager nous parviendrons finalement à surmonter notre colère dans de nombreuses situations.

Pourquoi nous devons identifier nos perturbations mentales

Habituellement, nous distinguons dans le monde extérieur ce que nous considérons comme bon ou précieux et ce que nous considérons comme mauvais ou sans valeur. Il serait bien plus salutaire d’avoir appris à distinguer les états d’esprit qui nous sont bénéfiques de ceux qui sont sans valeur. Quels sont donc ces états d’esprit sans valeur? Ce sont nos perturbations mentales, dont l’une des plus néfastes pour nous est l’auto-préoccupation.

Pour être efficace, il est très important d’identifier avec précision nos perturbations mentales. Lorsqu’un chirurgien opère un patient d’un cancer sur un organe vital, il doit minutieusement enlever les cellules cancéreuses sans endommager l’organe vital lui-même. Ainsi, mieux nous identifions notre cible avec précision, plus son élimination sera efficace.

La cause principale de nos perturbations mentales est l’attention inappropriée ou l’ignorance. Aussi plus nous identifions correctement nos perturbations mentales, plus nous obtiendrons rapidement leur éradication en appliquant les opposants spécifiques. Pour cela, nous devons prendre le temps d’identifier complétement la perturbation mentale dans notre esprit. Alors notre pratique donnera des résultats significatifs.

 Qu’est-ce que l’auto-préoccupation et quel est son objet? Ceci doit clairement être précisé, car cette distinction est importante. Si, pour obtenir notre bonheur, nous nous identifions incorrectement, en fait nous nous créerons seulement des problèmes. Tandis que si, pour obtenir notre bonheur, nous nous identifions correctement, alors nous atteindrons la cessation permanente de toute notre souffrance.

L’objet de notre auto-préoccupation est le JE qui existe de manière inhérente. Notre JE est en réalité un simple nom, une étiquette que nous imputons actuellement sur notre corps et notre esprit ordinaires. Mais nous pensons qu’il y a quelque chose derrière cette étiquette. Nous pensons qu’il y a quelque chose de véritablement solide indépendant de notre corps et de notre esprit. C’est cette chose qui possède notre corps et qui possède notre esprit. Nous saisissons ce corps et cet esprit et nous nous efforçons les protéger, parce que nous croyons à leur existence inhérente. C’est ce JE que nous essayons de rendre heureux et que nous chérissons tant. Il est l’objet de notre auto-préoccupation et nous donne le sentiment d’être suprêmement important.

Ainsi, comme nous l’avons sûrement dit mainte fois dans le passé : « Aime-toi, toi-même » n’est pas tout à fait exact. Parce que ce faisant, nous chérissons en fait le JE qui existe de façon inhérente, l’objet de notre auto-préoccupation, qui en réalité n’existe pas du tout. Notre véritable MOI est notre pureté naturelle et notre bonté naturelle. Notre esprit très subtil ou notre esprit racine, situé à notre cœur est notre véritable MOI, notre véritable JE. Lorsque nous nous identifions avec cette pureté naturelle et essayons d’obtenir son bonheur, nous libérons notre véritable JE des obstructions qui résultent de nos perturbations mentales.

Développer l’esprit qui chérit les autres

Chérir les autres est la meilleure méthode pour résoudre nos propres problèmes comme ceux des autres. Nous avons à comprendre pourquoi c’est si important, puis de le mettre réellement en pratique. Il y a essentiellement deux raisons à cela. La première est parce que la nature de chaque être est la bonté et deuxièmement c’est très bénéfique pour nous de le faire.

C’est la meilleure méthode parce que l’esprit qui chérit les autres nous aide à vaincre nos perturbations mentales, cause principale de notre malheur et de notre tristesse. Il nous aide à résoudre nos problèmes quotidiens et c’est le fondement de notre voie spirituelle.

Pour comprendre de quelle manière il nous aide à surmonter toutes nos perturbations, contemplons la jalousie, la colère et l’attachement qui empoisonnent si souvent notre existence.

Chérir les autres surmonte notre jalousie, parce que nous sommes heureux de la bonne fortune et du bonheur des autres. Chérir les autres nous aide à surmonter notre colère, parce qu’il s’agit d’un état d’esprit d’amour à l’opposé de la colère et qui souhaite juste que les autres soient heureux. De plus cela crée un contexte harmonieux de sorte qu’aucune base de conflits n’existe. Finalement chérir les autres surmonte notre attachement désirant, principale cause des relations disfonctionnelles et qui contribue à notre solitude. L’objet principal de notre attachement est nous-même tandis que l’objet de chérir les autres est justement les autres. En résultat, nous développons des relations stables et satisfaisantes et nous ne nous sentirons plus jamais seuls.

Pour comprendre de quelle manière il nous aide à résoudre tous nos problèmes quotidiens, nous pouvons observer comment chaque problème que nous éprouvons vient de notre auto-préoccupation, et toutes les bonnes choses viennent de chérir des autres. Nous devons éprouver chaque situation pour nous convaincre de la pertinence de cette méthode. La manière de résoudre tous nos problèmes quotidiens est l’esprit qui chérit les autres.

Pour comprendre de quelle manière chérir les autres est le fondement de notre voie spirituelle, nous contemplons comment c’est la racine d’un bon karma et par conséquent du vrai bonheur. Chérir les autres nous permet d’accumuler une grande quantité de mérite ou énergie mentale positive qui sera la principale cause de notre illumination.

La meilleure manière de mettre cela en pratique est (1) toutes les fois que nous sommes avec les autres nous considérons leur bonheur au moins aussi important que notre propre bonheur, (2) nous commençons avec notre famille et nos amis en les utilisant comme exemple de comment nous pouvons aimer les autres, (3) quand nous possédons quelque chose, au lieu d’être avare, nous devrions être heureux de pouvoir le partager parce qu’ils peuvent ainsi en profiter également, (4) réjouissons-nous de leur bonne fortune et de ses causes. De cette manière nous pouvons profiter de tous ce qui existe : être simplement heureux pour les autres. Et (5) nous utilisons chérir les autres en tant qu’antidote pour vaincre nos perturbations.

Pour réaliser l’esprit qui chérit les autres nous allons chercher à identifier les obstacles à cet amour qui chérit. Les deux principaux obstacles sont notre auto-préoccupation qui s’oppose à ce que nous reconnaissons honnêtement nos fautes et notre perspicacité à déceler les défauts des autres plutôt que leurs bonnes qualités. Alors qu’il est bien plus bénéfique d’affronter nos propres fautes et d’observer uniquement les bonnes qualités chez les autres. Ce faisant nous clarifions des situations qui sont mal comprises pour finalement mieux les comprendre.

Habituellement nous chérissons que ce que nous apprécions, ce que nous trouvons attrayant, ce que nous trouvons bon et nous ne chérissons pas ce que nous détestons, que nous trouvons contraire à nos idées ou qui manque de bonnes qualités.

Les enseignements habiles des bouddhas nous apprennent comment développer une vue différente. Ainsi, comprenant que tout est simplement une projection de notre esprit, le monde que nous expérimentons est le monde auquel nous prêtons attention. En d’autres termes, c’est de choisir de croire en ce qui est bénéfique pour notre esprit.

Ce qui ne veut pas dire que, comme une autruche, nous mettons la tête dans le sable et prétendons que les choses qui ne sont pas visibles n’existent pas, mais portons notre attention sur les objets d’une manière bénéfique pour nous. La principale cause de nos perturbations mentales est notre attention inappropriée. Nous exagérons voire même nous inventons les bonnes et les mauvaises qualités des objets et percevons de manière erronée toutes les choses tandis qu’en résultat nos perturbations augmentent. La voie de la libération est vraiment une reconsidération de notre vision des choses.

Le problème principal est que nous ne pouvons pas voir même nos propres défauts, cependant que nous sommes très habiles à voir les défauts des autres.

Nous ne savons pas voir de manière bénéfique les bonnes et les mauvaises qualités en nous-même ou chez les autres. La grande confusion à ce sujet est le principal obstacle à développer l’esprit qui chérit les autres.

N’oublions pas qu’une des fonctions principales du Dharma est de servir comme un miroir dans lequel nous pouvons voir nos propres fautes. En identifiant nos fautes nous pouvons finalement nous en débarrasser. Mais nous devons être prudent de ne pas utiliser ce miroir comme un télescope pour mieux voir les fautes chez les autres.

 [Tirés des enseignements reçus oralement de Kadam Ryan, mon Enseignant]

Adopter une stratégie gagnante pour surmonter nos fautes (2ème partie)

Parfois, nous prétendons ne pas avoir une certaine perturbation, comme l’attachement par exemple. Le fait de penser ainsi, ne supprime pas pour autant celle-ci. À un niveau plus subtil elle continue à sévir de manière moins évidente. C’est ainsi pire, parce qu’elle réapparaîtra ultérieurement de manière plus virulente.

Quand vous suivez les conseils que suggère une perturbation mentale, vous lui donnez votre assentiment. Mais le soulagement ne sera que de courte durée, car l’effet de votre désir incontrôlé ne sera que temporaire. En donnant votre accord à une perturbation mentale, par exemple l’attachement désirant, vous ensemencez dans votre esprit des nouvelles potentialités qui se manifesteront plus tard sous la forme de tendances à faire la même chose. Donc ce sera ainsi plus laborieux et difficile la prochaine fois. Le risque de développer de la culpabilité est grand en n’acceptant pas la présence de la perturbation mentale.

Accepter la présence d’une perturbation mentale en réalisant clairement qu’il s’agit d’un état d’esprit perfide vous amène à l’affronter. Nous ne pouvons éviter les conséquences de notre karma. Où que nous allions, notre karma nous suit. Cette acceptation requière de notre part d’accepter l’existence de la perturbation mentale mais pas de sa validité.

Nous acceptons l’existence de notre perturbation, car c’est dans la nature de l’esprit d’avoir des perturbations mentales. Nous ne devrions pas nous attendre que ce soit différent. C’est pourquoi, acceptons-la sans jugement. Mais nous n’acceptons pas sa validité reconnaissant la nature trompeuse de celle-ci. En refusant sa validité, nous ne croyons plus ses suggestions et son pouvoir sur nous sera détruit.

Nous devons cesser de nous identifier à nos perturbations mentales. Les perturbations mentales des autres gens ne sont pas un problème pour nous, parce que nous ne nous identifions à celles-ci. Tandis que nos propres perturbations sont un réel problème parce que nous nous identifions à elles. Si nous voulons éliminer les problèmes associés à nos perturbations, nous devons cesser de nous identifier à elles. Nous ne sommes pas ces perturbations mentales, elles ne sont que le cancer de notre esprit.

Pour prendre de la distance par rapport à nos perturbations mentales, nous pouvons le faire simplement en pensant explicitement : « Je ne suis pas cela, ce n’est pas moi » en nous référant au potentiel pur de notre esprit.

Si vous tentez de combattre vos perturbations mentales alors que vous vous identifiez à elles vous ne ferez que développer de la culpabilité sans pour autant vous en défaire. Tandis que si vous vous démarquez de ces mêmes perturbations, vous pouvez alors les combattre jusqu’à les anéantir.

Notre capacité de vaincre nos perturbations mentales ne réside pas dans le degré de compréhension de celles-ci mais plutôt dans notre détermination de s’en libérer. À tort, nous pensons parfois que le fait de ne pas y penser va finalement supprimer une perturbation mentale sur notre esprit. Cette attitude complaisante de l’oublier ne nous libère en rien de celle-ci.

Lorsque notre désir de nous libérer d’une perturbation mentale est plus grand que le désir de posséder le fruit de celle-ci, alors nous avons suffisamment d’énergie pour le faire. Dans le cas contraire, nous céderons à son chantage fallacieux.

Pour renforcer notre détermination de nous libérer d’une perturbation mentale, nous pouvons tenir compte de ceci :

  1. Nos perturbations sont des esprits nécessairement trompeurs.
  2. Nos perturbations détruisent notre paix intérieure en nous rendant misérables.
  3. Suivre nos perturbations ne fait que de nous enliser plus profondément dans le samsara. Or nous voulons nous en libérer, pour nous-mêmes et pour les autres.

Pour diminuer la virulence de nos perturbations mentales nous leurs appliquerons un opposant. Chaque perturbation mentale possède son opposant spécifique, mais dans tous les cas nous pouvons simplement  faire une méditation basée sur la respiration ou réciter un mantra particulier. Avec sagesse, en reconnaissant la présence d’une perturbation mentale, nous concentrons notre attention et notre énergie sur son élimination. Mieux vaut obtenir une profonde expérience de ces quelques outils, plutôt que d’en utiliser quantité d’autres de manière superficielle.

Adopter une stratégie gagnante pour surmonter nos fautes (1ère partie)

Le fait que nous faisons tant de fautes et d’erreurs malgré tous nos efforts pour les éviter diminue de façon significative notre confiance en soi. Nous avons tellement de perturbations mentales sur notre esprit que celui-ci est souvent hors de notre contrôle au point que nous sommes incapables de gérer les situations problématiques de notre vie. Même si nous tentons de surmonter nos fautes, elles nous maintiennent en échec parce que nous cédons continuellement à leur action. Et la conséquence de cette attitude est de renforcer notre sentiment d’impuissance pour finalement anéantir notre confiance en soi. Ayant moins de confiance, nous perdons le pouvoir de les combattre tandis que ce cercle vicieux se perpétue.

Comment inverser cette tendance néfaste pour notre esprit? Face à nos perturbations mentales, nous devons adopter une stratégie gagnante, grâce à laquelle nous pourrons compter nos victoires contre nos perturbations mentales. Ce faisant, nous retrouverons progressivement notre confiance jusqu’à ce que nous soyons à même de vaincre toutes nos perturbations mentales.

Pour expliquer cette stratégie, prenons une perturbation mentale qui nous est très familière : L’attachement désirant. Celui-ci peut se manifester de différentes manières comme par exemple l’alcool, la drogue, la cigarette, un partenaire, etc. L’attachement désirant est un état d’esprit qui pense qu’une certaine condition extérieure est la cause de notre bonheur. Et que sans cette condition précisément nous ne pouvons pas être heureux. Comme le bonheur est également un état d’esprit, la pensée d’une condition extérieure source de notre bonheur est une pure illusion. La seule vraie cause de notre bonheur est la paix intérieure, celle-là même qui est générée par des états d’esprit vertueux.

Voici comment cette stratégie fonctionne pour le cas de l’attachement à la cigarette. Lorsque nous pensons ou nous voyons une cigarette, automatiquement se produit en nous un intense désir de fumer. Dans ces conditions, prenons en compte les points ci-dessous.

  1. Quel est la nature du problème? La nature de l’attachement à la cigarette n’est pas quelque chose d’externe. Le problème est la sensation que produit la cigarette dans notre esprit.
  2. Quelle est la cause du problème? La cause de ce problème n’est elle non plus quelque chose d’externe, mais bien la perturbation mentale qui entretient cette sensation dans notre esprit.

Ainsi, pour venir à bout de notre attachement désirant, nous devons changer l’objet de nos désirs. Tant que nos désirs concernent des objets extérieurs comme la cigarette par exemple, nous réaliserons tôt ou tard que ce sont des bonheurs temporaires et trompeurs et qu’ils ils vont finalement nous décevoir. Tandis que si notre intention est d’obtenir des réalisations intérieures, seules sources de vrai bonheur, nous choisirons  de développer de tels états d’esprit vertueux. De façon générale, choisissons intentionnellement de négocier avec la perturbation mentale. C’est -à-dire qu’au lieu de donner suite instinctivement ou de manière impulsive à notre perturbation mentale, nous choisissons consciemment d’opter pour une action opposée à la perturbation mentale.

[Extrait d’un cours reçu de mon enseignant Kadam Ryan]

Comment bien pratiquer

À priori, mettre en pratique les enseignements ne nous semble pas si compliqué. Les vraies difficultés surviennent lorsque nous recherchons à pratiquer d’une manière habile et efficace. La toute première chose que nous nous efforçons de faire consiste à identifier nos perturbations mentales et ne pas s’identifier à elles. Lorsque nous disons : « Je suis contrarié !!! », alors que nous ne sommes pas la contrariété. Notre esprit est conditionné par une perturbation mentale qui est la contrariété. Nous devrions plutôt nous identifier à notre potentiel pur et voir nos perturbations mentales comme des obstacles à notre développement spirituel.

Le fait de nous identifier à nos perturbations mentales entraîne différents problèmes. En plus de nous conditionner et de nous distraire, celles-ci font obstruction à notre progression spirituelle. Elles développent en nous un sentiment de culpabilité d’être à une telle distance de l’objectif fixé. Nous avons alors le sentiment : « Pfff … je ne vais jamais y arriver, c’est trop dur! ». Le plus souvent aussi, nous supprimons momentanément nos perturbations sans pour autant les éliminer complètement et ce n’est pas suffisant.

L’entraînement principal consiste donc à observer notre esprit. Nous devrions être constamment vigilants afin que nous puissions identifier cette perturbation dès son apparition dans notre esprit. Par analogie, le skipper sur son voilier veille constamment à garder son cap, ne se laissant pas dériver de sa trajectoire. Plus il attend pour réagir, plus il devra manœuvrer pour reprendre la bonne direction. De même, si nous identifions assez tôt une perturbation mentale naissante, il est relativement facile de l’empêcher de croître et de retrouver notre paix intérieure.

C’est pourquoi, cette première difficulté est réellement la plus coriace. Une fois que nous identifions la perturbation mentale dans sa phase initiale, il est relativement facile de l’éliminer. Tout ceci découle d’une claire compréhension de sa signification karmique  et d’une ferme détermination de l’éliminer.

Nous devons être absolument clairs et intransigeants à leur sujet en développant des pensées et des affirmations telles que : « Cela n’est pas moi! » ou bien « Je ne me reconnais pas dans cette perturbation » ou encore « Je ne te donne pas mon assentiment! ». En prenant pour cible nos perturbations mentales, nous les démasquerons rapidement pour finalement les anéantir définitivement. Sans s’attacher au résultat, nous essayons juste de réussir ce défi en faisant de notre mieux.