Alors que j’étais en pleine retraite, dimanche il y a deux semaines, en début d’après-midi je fus soudain pris d’une douleur aigue au creux de l’estomac. Une douleur située dans la partie supérieure de l’estomac et qui me traversait de part en part de la poitrine jusque dans le dos. Je cherchais alors à comprendre la raison de cette douleur sans succès. Je pris le parti d’attendre, mais en vain. Tant et si bien qu’en début de soirée je demandais mon admission aux urgences de l’hôpital de ma région. Et c’est à partir de ce moment-là que j’ai eu une vision non-ordinaire de mon expérience qui ne faisait que de commencer. Cette vision est le fruit de nombreux conseils et enseignements instillés dans mon esprit par mon bienveillant enseignant Kadam Ryan durant les années passées ensemble au Centre Atisha de Genève.
Étant donné que mon esprit fonctionnait dans le contexte d’une pratique de retraite, Je vis alors le personnel à l’accueil non pas comme des êtres humains ordinaires mais comme des dakas et des dakinis qui m’accueillaient au pays pur en lapis-lazuli du Bouddha de la médecine. Je fus pris en charge par les médecins et infirmières qui me sont apparus comme étant des bodhisattvas entreprenant les investigations que mon cas exigeait. Je remarquai la fluidité de leurs actions dans le calme et le sourire. À ce moment-là ne pratiquaient-ils pas la prise et le don? Leur mission étant de faire cesser ma souffrance et de me donner le réconfort dont j’avais besoin et mon intention était de purifier rapidement le karma mûrissant qui m’avait conduit dans cette situation. Dès cet instant, quand bien même je ne connaissais ce qui m’affectait, je senti dans mon esprit une grande paix et une confiance que tout allait bien se passer.
Quelques heures plus tard, après que l’on ait écarté tout problème cardiaque et poursuivi mon voyage en passant d’un service à l’autre et d’un médecin à l’autre, progressivement le diagnostic se resserrait sur une lithiase du canal hépato-cholédoque, dans un premier temps au moyen d’ultra-sons puis par séance de scanner. Les résultats du scanner confirmaient la présence de calculs biliaires et c’est à ce moment-là que mon hospitalisation commença. Celle-ci devait commencer par une séance d’IRM le lendemain. Ainsi d’interminables heures passèrent à attendre mon tour. Ce fut une magnifique occasion de méditer et de pratiquer la patience. Je pensais : « Hier soir en arrivant, j’étais bien content que l’on s’occupe de moi avec empressement. Actuellement peut-être d’autres personnes dans une situation analogue nécessitent un traitement prioritaire ». Pour le personnel soignant je suis un patient. Et d’après le dictionnaire patient définit une personne soumise à un examen ou a un traitement médical et son homonyme est un adjectif qui qualifie celui qui fait preuve de patience, de tolérance et de calme.
Vers la fin de l’après-midi, ce que certains considèreraient comme de la malchance ou pire une malédiction arriva. Une infirmière vint me dire que l’installation d’IRM était tombée en panne et que ma séance serait reportée au mardi matin, par la même occasion on m’informa que j’allais pouvoir manger une collation. Moi qui n’avais rien mangé depuis dimanche à midi j’étais ravi. Dans l’attente de celle-ci, je fis la connaissance de mes voisins de chambre. Très vite je compris que leur cas était bien plus sérieux que le mien. C’est alors que je me suis souvenu de la méditation du Lamrim, « La mise à égalité de soi et des autres », qui dit : « … comment puis-je chérir uniquement moi-même et négliger les autres? Mon bonheur et ma souffrance sont insignifiants comparés au bonheur et à la souffrance de tous les êtres vivants ». Je me laissais imprégner par cette contemplation. Celle-ci m’aida beaucoup à supporter une nouvelle longue attente à jeun jusque vers 17 heures le mardi. Dans la soirée, le médecin vint me dire que j’allais subir une endoscopie chirurgicale pour extraire les calculs biliaires à l’origine de ma souffrance. Finalement, le vendredi, vu l’absence de syndrome inflammatoire, on m’enleva cette vésicule qui contenait d’autres calculs potentiellement capables de me faire vivre la même situation lors d’une deuxième intervention par laparoscopie consistant à l’ablation de la vésicule biliaire afin d’éviter d’autres migrations de calculs ultérieurement.
Me souvenant d’une phrase qui avait alors déjà marqué mon esprit, « le monde qui nous apparaît est celui auquel nous prêtons attention ». Nous sommes en fait libres de nous focaliser sur un objet ou sur un autre. L’esprit principal que j’ai expérimenté est la conscience du corps accompagné surtout par le facteur mental sensation. J’avais la sensation que quelque chose dans mon corps ne fonctionnait plus normalement alors que mon esprit l’observait. Ce quelque chose qui ne fonctionnait plus était une simple création de mon esprit et ma perception de la souffrance était liée d’une part à l’ignorance de saisie d’un soi et à la préoccupation de soi d’autre part qui rendaient l’expérience douloureuse. Ainsi, par cette expérience je réalise le chemin qui reste à faire pour me libérer totalement de la souffrance inhérente au samsara.
Puisse le mérite que j’ai accumulé tout au long de cette expérience de souffrance être profitable à tous ceux qui souffrent en ce moment de manière analogue afin que leur karma négatif responsable soit définitivement éradiqué.
Merci Max pour ce partage! Quelle belle mise en pratique des enseignements dans une période difficile! Et tout de bon pour la suite.
Vous etes un superb exemple d’un pratiquant pur.