L’esprit de compassion est un esprit complètement pur qui ressent naturellement une sensibilité particulière à l’égard de tous les êtres vivants qui souffrent dans le samsara. Cet esprit est la base même de notre développement spirituel. C’est une précieuse qualité que partagent tous les êtres sensibles et qui rend notre vie humaine pleine de sens. L’esprit de compassion est une véritable source de vie. Chacun de nous possède au fond de lui cet esprit. Nos pensées, nos paroles et nos actions si elles sont inspirées par la compassion donnent une intense et bienfaisante dimension à tout ce que nous entreprenons. Elle est bien plus que de la sympathie pour autrui car elle repose sur une sagesse qui vient de notre cœur. Il ne s’agit pas d’avoir simplement une pensée bienveillante, c’est venir en aide aux autres avec discernement . À notre époque beaucoup de personnes se méprennent sur le sens de l’esprit de compassion et le réduise à la permissivité et à l’indulgence envers les autres. Elle est souvent un simple réflexe intellectuel qui nous évite de nous sentir responsable des situations que nous pouvons rencontrer.
En développant cet esprit de compassion, nous avons un souci désintéressé du bonheur des autres et nous voulons tout faire pour les libérer de leur souffrance. C’est en fait un altruisme qui fait partie de notre chemin spirituel. Par analogie nous sommes avec les autres pris par la tempête dans un océan avec ses vagues menaçantes, semblable au samsara avec toutes ses souffrances, sans un moment de répit. Rencontrer le dharma est semblable à croiser un bateau sur lequel nous pouvons monter et qui nous amène vers la terre ferme. Irons-nous seul sur ce bateau, en laissant tous les autres se noyer? Jusqu’à quel point pourrons-nous être heureux en faisant cela, en atteignant la terre ferme tout en sachant que les autres sont en train de se noyer? L’esprit de compassion consiste justement à aider les autres à monter également sur ce bateau et se libérer enfin.
Développer un esprit de compassion ne requiert pas un contexte particulier. Sans méditer forcément sur les souffrances terribles des êtres des règnes inférieurs, nous sommes plus à même de le développer pour les êtres qui nous sont proches dans notre vie quotidienne. Toute situation de notre vie courante peut convenir à cet entraînement. Voici une situation anodine qui me sert à pratiquer celui-ci. Me souvenant d’une séquence vidéo de l’inauguration du KMC-France, j’avais remarqué l’attitude de Vénérable Guéshé-la qui récitait le mantra OM MANI PAME HOUM à l’intention des poules et des oies de la basse-cour du château et me souvenant d’un enseignement reçu qui dit que : « Où nous pensons qu’un bouddha va, un bouddha va réellement. Et que fait un bouddha à l’endroit où il se trouve, il accorde ses bénédictions ». Puisque les animaux possèdent également un esprit, cet esprit est susceptible de recevoir les bénédictions d’un bouddha, quand bien même cet esprit est emprisonné dans les agrégats d’un animal. Et de cette réflexion j’en ai fait une pratique. Ainsi, lorsque je fais un nordic-walking dans la campagne près de chez moi, si je passe à proximité d’un troupeau de vaches par exemple, en posant mon regard sur chacune d’entre-elles, j’imagine qu’un bouddha va dans chaque esprit. Et en récitant le mantra à leur intention je ressens une grande compassion pour ces animaux.
Certains personnages ont démontré qu’ils étaient capables de relever d’importants défis. Cela nous prouve à quel point, dotés d’une forte motivation, nous sommes capables d’aller bien au-delà de ce que nous pensions être capables de faire. Comme l’illustre si bien la citation de M. Twain, je cite « C’est parce qu’ils ne savaient pas que c’était impossible, ils l’ont fait ». La compassion va nous amener à développer cette formidable énergie qui nous amène à atteindre le but final afin d’aider les autres. De manière objective le bonheur de tous les êtres vivants est en comparaison avec le bonheur d’une seule personne bien plus important. Pour illustrer cette situation, prenons une balance à fléau imaginons un être vivant sur un plateau et tous les autres sur l’autre, quel est le côté le plus lourd? Ainsi, lorsque nous appartenons à « Tous les autres », il est aisé de dire que bien sûr le bonheur de tous les autres est le plus important, mais lorsque nous sommes dans la catégorie « un être vivant », il nous est plus pénible d’admettre que le bonheur de tous les autres est le plus important. Bien qu’intellectuellement nous admettions cela, il est plus difficile de le mettre dans notre cœur. C’est pourquoi, nous devons méditer encore et encore pour faire grandir notre compréhension. Alors, la voie du bodhisattva, la voie de la compassion, la voie qui nous conduit à la pleine illumination s’ouvre dans notre esprit.