En excursion en montagne par une belle journée d’été, nous ne sommes pas à l’abri d’un orage soudain. Dans ce cas nous chercherons au plus vite un abri sûr afin de ne pas être mouillés jusqu’aux os ou pire d’être victime de la foudre. Pourtant, la journée semblait si belle et sans problèmes de météo. Les événements sont parfois imprévisibles. Ce n’est pas seulement dans ce cas précis que nous allons chercher refuge. Ainsi dans la vie trépidante et agitée qui est souvent la nôtre, naturellement nous cherchons des environnements et des endroits paisibles, alors que nous sommes continuellement dans le bruit, le stress et la peur de ce qui peut arriver. Nos portes sensorielles, nos cinq sens, sont continuellement sollicitées par tout ce que perçoit notre esprit. Incapables de discerner l’aspect non-duel des phénomènes, par ignorance nous sommes convaincus de leur existence en dehors de notre esprit. Le plus souvent, nous n’avons pas la force nécessaire et ou la capacité de comprendre cela. C’est pourquoi, nous nous laissons envahir, nous nous laissons prendre en otage par certains aspects de notre quotidien. Alors nous souffrons, nous nous plaignons : « C’est trop de ceci! »; « Pas assez de cela! »; « C’est trop injuste! »; « Il fait trop chaud »; « Cette rue est peu engageante » et bien d’autres situations.
Alors, comme lorsque nous sommes pris par l’orage en montagne, naturellement nous cherchons à nous soustraire à toute situation inconfortable ou désagréable. C’est du moins ce qu’il serait bénéfique de faire. Pourtant, souvent nous ne le faisons pas. Pourquoi? Par manque de capacité à le faire, par complaisance, par paresse, par ignorance, par curiosité, par familiarité. Nous jugeons mal les situations et continuons à en subir les méfaits. Souvent ceci à notre insu.
Paradoxalement, certaines personnes se laissent volontiers distraire par toutes sortes de stimuli extérieurs pour se soustraire au silence de peur d’aller à la rencontre d’eux-mêmes et d’affronter leurs démons intérieurs. Le besoin de distractions devient alors une sorte de fuite pour ne pas assumer la réalité de la vie. Il suffit d’observer combien de personnes sont littéralement scotchées à leur téléphone portable qu’elles tiennent toujours dans la main ou bien qui ont les écouteurs plantés dans les oreilles du matin au soir. Je me suis même demandé si elles les gardaient pour dormir! Leur téléphone devient une sorte de bouée de sauvetage les empêchant de se noyer, rassurées d’exister, de pouvoir appeler et être appelées et la musique, souvent très forte, les absorbe complètement dans un univers virtuel. À tort ces personnes prennent cela comme un refuge, mais ne trouvent certainement pas en lui la paix intérieure.
Rappelons que dans les enseignements de Bouddha, il est dit que tout est création de l’esprit. Les conditions extérieures qui nous semblent si inconfortables sont pourtant la manifestation des perturbations mentales qui agitent notre propre esprit. Ce que perçoit notre esprit reflète exactement ce qui se manifeste en lui. Par ignorance, nous sommes persuadés de l’existence de ce que nous voyons, ressentons, aimons ou détestons comme étant à l’extérieur et séparé de nous. Et au lieu de rechercher leur signification nous les éludons tout en nous laissant absorber par les distractions, l’influence des autres, les mauvaises habitudes, la familiarité et l’attention inappropriée. Du point de vue spirituel, cette attitude est irresponsable et nous prend au piège plus profondément dans le samsara. De se réfugier dans les distractions et les plaisirs du samsara, ne résout en aucun cas les problèmes générés par les perturbations mentales actives dans notre esprit. Le fait de les ignorer, ne va pas les faire disparaître pour autant. Cela revient à dissimuler la poussière sous le tapis, et celle-ci ne tardera pas à faire une bosse bien visible.
Les situations engendrées par nos états d’esprit perturbés sont une opportunité essentielle pour comprendre ce qui nous arrive et ce que nous expérimentons. Avec discernement et sagesse, nous pouvons rechercher une issue favorable. Mais pour cela nous avons besoin de calme, de silence et de paix intérieure. Ces conditions s’avèrent bien plus difficiles, si nous sommes noyés dans les distractions de toutes sortes, dans le bruit et l’agitation. Concrètement, si nous sommes dans une situation pénible et inconfortable, il est clair que nous ne pouvons faire disparaître immédiatement les gens, les bruits ou tout autre phénomène nuisible par notre seule intention. Par contre, nous pouvons choisir une autre alternative, comme par exemple celle d’éviter les nuisances de toutes les sortes et si nous y sommes déjà plongés de nous en éloigner au plus vite.
Pour maintenir notre paix intérieure, seule source de bonheur, nous cherchons à nous protéger de toutes les situations qui viennent la troubler. Et la façon la plus simple pour rétablir cette paix intérieure, c’est de s’accorder un moment de répit, un moment privilégié de silence et de calme. Pour cela, il suffit de quelques minutes de méditation sur la respiration pour déjà en ressentir les bienfaits. Nous pouvons visualiser un endroit calme et paisible qui nous est familier dans lequel nous nous installons le temps de quelques profondes respirations. Les bienfaits de cette petite pause se traduisent très vite par une sensation de sérénité et de clarté nous permettant de nous confronter à nos véritables problèmes. Pour cela nous cherchons refuge dans notre cœur, à l’endroit même de notre sagesse intérieure, de notre vraie nature de bouddha. Ce désir émerge sitôt que nous comprenons la nature trompeuse du samsara et la nécessité de s’en libérer.