Dans « Huit étapes vers le bonheur » Guéshé Kelsang Gyatso écrit :
Un homme plein de compassion trouva un jour un gros poisson au bord de la route. Il était tombé d’un chariot d’un pécheur et vivait encore. Voulant le sauver, l’homme le ramassa avec soin et le mit dans un étang non loin de là. Peu de temps après cependant, les habitants qui vivaient là s’aperçurent que tous les petits poissons avaient disparu de l’étang en question et seul y restait le gros poisson. Lorsqu’ils comprirent que le gros poisson avait mangé tous les autres, ils furent très irrités et le tuèrent. L’action compatissante de l’homme eut pour conséquence la mort de non seulement de tous les poissons de l’étang, mais aussi du gros poisson qu’il avait essayé de sauver.
Cette histoire nous montre que, si nous souhaitons vraiment aider les autres, nous avons besoin d’avoir plus que le simple désir compatissant de les aider. Il est nécessaire de développer aussi notre sagesse, car sans sagesse nos efforts pour aider pourront souvent avoir des retombées négatives.
En effet souvent, animés d’une grande compassion, nous cherchons à aider les autres pensant sans autre que nous en serons capables. Ainsi, persuadés de pouvoir le faire, nous sommes parfois finalement déçus, n’ayant pu faire grand-chose par ignorance ou par maladresse. Nous souffrons alors de ne pas avoir obtenu de résultat. En écoutant notre sagesse, nous sommes à même de savoir si la situation est à notre portée et si nous sommes capables d’aider vraiment.
Pourtant, il ne faut pas se laisser aller au découragement, mais persévérer dans nos actions. À chaque expérience, nous pouvons faire de notre mieux, sachant que le résultat ne nous appartient pas. Si notre intention est profonde et sincère, nous développons sur notre esprit les potentialités de pouvoir le faire à l’avenir jusqu’à ce que finalement nous obtiendrons effectivement un résultat.
Il est vrai que notre besoin de compassion est présent au plus profond de nous. Chaque individu éprouve le besoin d’aider l’autre, d’aider les autres. Il se peut même que notre besoin d’aider les autres soit si grand que nous nous oublions nous-même. Il est malgré tout difficile de savoir si notre sagesse, aussi petite soit-elle, est suffisante pour entreprendre cette démarche d’aide à autrui, sans que nous ayons des retombés négatives. Les multiples expériences que nous vivons nous confirment que notre sagesse n’était pas suffisament présente. Il est alors malgré tout difficile de ne pas nous sentir blessé et incompris lors d’échec de soutien apporté à des individus ou à des situations pour lesquelles nous nous sommes investis. En reprenant l’exemple du gros poisson, si l’homme plein de compassion aurait eu plus de sagesse, que se serait-il passé? Aurait-il laisser mourrir le gros poisson tombé du chariot en sachant que c’était sa destiné et en l’acceptant avec sagesse ou aurait-il réussi à induire plus de sagesse au gros poisson pour que ce dernier ne mange pas les petits poissons?